A beautiful nightmare | Julia

Les jours défilaient dans cette ville où la perdition devient monnaie courante lorsqu’on ne sait guère où l’on va. Les lumières brillent pour les audacieux et s’éteignent pour les plus frileux,  ceux qui craignent les projecteurs et s’accrochent à des maillons qui ne leur correspondent pas, rendant leur quotidien morne, prêts à sombrer dans ces tréfonds de New York où il ne vaut mieux pas trainer seul. Les spots lumineux se taisaient tandis que le film commençait déjà à battre son plein, parlant de ces gens semblables, ceux que l’on croise au dehors des cinémas, dans les allées lugubres où les esprits peuvent tourbillonner et tomber. Ursula ne craignait le noir mais elle n’était guère à l’aise avec l’insécurité, pourtant, pour l’heure, c’est une boisson qui manquait à ses mains et elle fit l’impensable, quitter la salle en s’excusant auprès des autres personnes assises non loin d’elle pour s’offrir un coca à l’étage en dessous. Faisant preuve de paresse, c’est vers l’ascenseur qu’elle se dirigea, ascenseur où de nombreux fidèles stagnaient déjà pour emprunter le Saint Graal et occuper les salles du cinéma présentes à l’étage. Normalement réservé aux personnes avec un besoin réel, l’invalidité était absente des corps qu’elle détaillait rapidement. S’ensuivit un crissement langoureux et les portes béantes de l’ingénieux appareil s’ouvrirent. Plusieurs en sortirent tandis que leur troupe y entra. L’accès se ferma, une main habile tapota sur les touches afin de nommer les étages nécessaires à leur sortie puis plus rien, la course démarra et s’affola. La cage était coincée et malgré de nombreuses relances, rien ne redémarrait. Sirotant son coca, Ursula se tapa le front contre la cage, persuadée d’un coin du sort, l’un de ceux qui viennent vous pourrir la journée.