Les propos de Iain, je les ai entendu, si Hannah savait bien mieux s’y prendre que moi, c’était simplement parce qu’elle était une mère. C’est d’un simple hochement de tête que je viens lui répondre, apportant ma tasse de café à mes lèvres, m’autorisant à boire une gorgée, de cette boisson chaude que je ne refuse pas. C’est quelque chose que je ne peux comprendre, j’avais quatorze ans quand ma mère a disparu de ma vie, seulement quatre années de plus que Duncan, sauf que contrairement à lui, ce n’est pas la vie qui me l’a enlevé, mais elle qui a décidé de tout abandonner, mari et enfants pour je ne sais quelle raison quelconque. Mes liens avec mes parents, ils ne sont pas ce que je peux dire être normaux, je n’ai aucune idée de ce qu’est devenue ma mère et avec mon père, même si la situation est bien moins tendue que par le passé, elle reste délicate, prête à dérraper à tout moment. La tasse sur la table en face de moi, je laisse mon regard s’y poser dessus, écoutant attentivement ce qu’est en train de me dire le lieutenant à mes côtés. Parler de toute cette situation, ce n’est pas quelque chose de facile, le décès d’Hannah n’est pas une plaie qui a cicatrisée et je doute qu’elle le soit un jour. Son absence a provoqué un vide immense, que je ne suis pas capable de combler, ni pour moi, ni même pour mon fils. Jouer les durs, montrer que tout vas bien, que depuis quelques mois, je vais beaucoup mieux, que je me fais au décès de ma femme, mais le pompier qui a versé des larmes, le jour de la cérémonie officielle, entouré du département des pompiers de New-York, il est toujours là, je me mets juste une façade. Je prête une oreille attentive à ce qu’est en train de me dire Iain, parce que son expérience est importante, parce qu’il donne l’impression de ne pas avoir été dans ma situation, celle d’un père complètement perdu face à ses enfants. « En Europe, hein ? » Dis-je en m’accordant un premier regard, depuis un petit moment à Iain, avec une légère pointe d’amusement. « J’ai pensé à partir après .. » Le décès d’Hannah, c’est bien le fond de ma pensée, qui ne trouve pas chemin jusqu’à mes lèvres. « Où, je sais pas, mais j’y ai pensé. J’ai pas eu autant de courage que toi. » Parce qu’il en faut pour prendre ses affaires et partir loin, tout abandonner derrière soi, comme il l’a fait. L’idée m’a traversé l’esprit, mais quitter New-York, mes deux frères, cette caserne, ce n’était juste pas possible et c’est toujours pas possible. « Je tiens à ce gosse, tu sais. » Ouvrir son coeur de temps en temps, ça fait du bien, je le fais un peu sans m’en rendre compte, dans le fil de la conversation, venu faire tomber quelques barrières. Un moment de faiblesse que je m’accorde, mais dont j’en ressens le besoin, même si je laisse une grimace marquer mon visage, une grimace qui traduit toute la peine que je ressens depuis le décès d’Hannah, toute ma vie qui a changé. Une nouvelle fois, je détourne mon regard du lieutenant, comme une façon de me protéger, garder la souffrance qui m’habite en moi, j’ai suffisamment de temps à la maison où je suis seul pour la laisser parler.
nightgaunt
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Invité a posté ce message Jeu 14 Fév 2019 - 10:27#
Il fait de son mieux, c’est ce qui est le plus important n’est-ce pas ? Iain, il n’a jamais prétendu être doué pour remonter le moral. Il a beau être un grand frère et un père, il y a des domaines où l’Écossais n’est pas plus doué qu’une autre personne. Malgré ça, ça ne l’empêche pas de tenter et de dire ce que lui pense de la situation, de quelle façon il pourrait essayer de la gérer s’il était à la place de Connor. Il n’est pas certain que ça soit très efficace, néanmoins c’est mieux que de rester les bras croisés à voir un collègue et ami souffrir. Peu importe que les deux lieutenants ne soient pas toujours sur la même longueur d’ondes, cette caserne est connue pour être une famille et les membres d’une famille se soutiennent toujours malgré les relations houleuses. Alors il tente mais ne ment jamais. A quoi bon lui dire qu’il a géré comme un professionnel après son divorce alors que ce n’est pas le cas ? Il a été au fond du trou, blessé d’avoir cru en une histoire qui s’est mal terminée, détruit d’avoir perdu celle qu’il pensait être la femme de sa vie et complètement paumé avec ses deux enfants. Parce que même s’il s’est occupé très tôt et souvent des deux, son ex-femme était là par moment et il pouvait se reposer sur elle. Après leur séparation et l’obtention de la garde de MJ et Parker, ça n’a plus été le cas. « J’avais besoin de retrouver un peu mes racines et de m’éloigner des Etats-Unis. » D’abord quelques mois passés en Écosse, dans sa famille où pour une fois son père n’avait pas été trop chiant, il avait ensuite fait ses valises pour voir du pays. Et si les enfants n’en garderont pas beaucoup de souvenirs, il sera toujours prêt à revivre cette expérience avec eux plus tard. « Je n’appellerai pas ça du courage. » Débute-t-il en haussant les épaules. « J’aurais pu affronter mon quotidien à Los Angeles, j’ai préféré partir et l’oublier. Et puis, j’avais besoin de temps pour moi et du temps pour les enfants. Mais ma situation était différente de la tienne. » Ses enfants plus jeunes que Duncan aussi. Iain n’est pas sûr que s’il avait perdu sa femme comme Connor il serait parti. Ou peut-être que si, seulement il ne serait jamais revenu. Ce que lui considère comme courageux c’est de rester dans une ville pleine de souvenirs et venir travailler dans un lieu où le brun côtoyait sa femme sans arrêt. Chaque endroit de la caserne doit lui rappeler Hannah. Rester ici, c’est courageux. « Je n’en doute pas et Duncan le sait. Vous avez besoin de temps tous les deux. Ce n’est pas le genre de blessure qui se guérit rapidement malheureusement. » Pour rien au monde il ne voudrait être à sa place, vivre et ressentir la même chose que Connor. C’est égoïste, toutefois ça ne l’empêche pas d’être présent et d’avoir une conversation posée et ouverte pour une fois.
Après ma séparation forcée avec Isobel, j’ai pris mes jambes à mon cou, mes affaires avec moi pour partir de New-York, comme a pu le faire Iain avec ses enfants lors de son divorce. Je ne regrette pas la décision que j’ai prise, même si je suis parti bien moins loin que le lieutenant présent à mes côtés. C’est en Europe qu’il s’est rendu, se rapprochant de sa famille, de ses racines, pendant que j’ai quitté Williamsburg pour vivre dans le Bronx. Quel grand changement ! Même à cette époque j’ai manqué de courage pour aller au bout de mon idée, préférant la mettre en place, mais ne pas prendre trop de distance avec ma vie, avec ma famille et mes habitudes. A mes yeux, ce qu’il a réussi à faire, c’est courageux, parce que je ne serais pas capable de le faire, je ne serais pas capable de prendre mes affaires, quitter ma vie New-Yorkaise avec Duncan à mes côtés. Bien trop d’habitudes, bien trop de souvenirs pour en partir, puis il reste mes deux frères, mon père malgré nos liens houleux, puis la famille de ma femme, à commencer par Eileen. « T’as eu le cran de le faire McLeod, c’est peut-être pas du courage pour toi, mais pour moi ça l’est. Tu as décidé de ce que tu voulais, de c’que tu voulais plus. Et tu l’as fait. » Dis-je en apportant mon regard en direction du lieutenant, bien que mon index est en train de faire le tour de la tasse de café, que j’ai sur la table, en suivant le rebord de celle-ci. Pour preuve, je ne suis même pas capable de calmer mon fils, lui permettre d'évacuer sa colère, de l’aider dans le deuil de sa mère. Ce gamin que j’avoue aimer, que j’avoue tenir à lui, comme à la prunelle de mes yeux, que tout ce que je peux faire, c’est pour lui, pour son bonheur, même si je ne m’y prend pas de la meilleures de façons. Je ne me justifie pas, mais j’ai le besoin de le dire à haute voix, de laisser les mots sortir, de le dire à quelqu’un. « Tu pourras me passer le numéro de la salle de boxe ? » Je suis prêt à tout essayer pour Duncan, comme tenter l’idée qu’à eu Iain, en parlant de le mettre au sport, un sport de combat comme la boxe pour évacuer toute la colère qu’il retient en lui. « Engine 221, Truck 119, Squad 14, Ambulance 165. Feu d’appartement #1982 Bedford avenue. » Interrompu par la sonnerie de la caserne, celle qui annonce, quatre-vingt dix-huit pourcent du temps une nouvelle intervention. Un feu d’appartement, c’est ce sur quoi on va devoir agir. « C’est partit ! » Prononçais-je ne me relevant de ma chaise, laissant sur la table ma tasse de café, comme mon rapport que je n’ai toujours pas transmis au chef de la caserne, agissant par priorité, répondant à l’appel de la centrale. C’est la raison qui pousse cette caserne à connaître un mouvement de foule, avec tous pompiers, tous ambulanciers en direction du garage, prêt à enfiler cette tenue aussi célèbre que le fantasme qu’elle en dégage. De monter dans chaque équipe dans son camion en direction de Bedforf Avenue.
nightgaunt
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Invité a posté ce message Sam 16 Mar 2019 - 22:39#
Du courage, il a tellement de mal à le voir comme ça alors qu’à ses yeux c’était surtout une fuite le plus loin possible de tous ces souvenirs capables de lui faire du mal. Une fuite loin de son ex-femme aussi, la seule femme ayant été capable de le mettre plus bas que terre, de le briser. Il avait eu besoin de s’éloigner et il l’avait fait avec ses enfants. Peu importe ce que Connor peut lui dire et même penser, il verra toujours ça comme une façon de s’échapper plutôt que du courage. Il préfère rester silencieux. Inutile d’insister sur le sujet, ça ne les mènera à rien. Ils se contenteront de tourner inlassablement en rond pour savoir lequel des deux à raison. Aussi bornés l’un que l’autre, il sait que ça finira comme ça. Ce n’est pas pour rien que leur relation est en dents de scie : parce qu’ils ne sont pas toujours d’accord et qu’ils sont trop entêtés pour laisser l’autre avoir raison. Et il sait qu’il comprendra que son silence est une façon pour lui de continuer à être en désaccord avec lui sans pour autant le dire clairement. Sa demande concernant le numéro de la salle de boxe, c’est une façon parfaite de passer à autre chose, de changer de sujet. « Ouais, pas de souci. Je te le passe à la fin de notre garde. » Le temps qu’il le retrouve dans son portable surtout. L’alarme de la caserne se déclenche, son corps se tend, son oreille écoute la voix féminine et si familière leur annoncer qui va devoir partir et pourquoi : « Engine 221, Truck 119, Squad 14, Ambulance 165. Feu d’appartement #1982 Bedford avenue. » En moins de temps qu’il ne le faut pour le dire, Iain est sur ses deux pieds, sa chaise repoussée et son café abandonné sur la table. « C’est parti ! » Léger sourire aux lèvres, il lui donne une tape amicale sur l’épaule et le suit jusqu’au garage. Il n’est pas impatient ou heureux d’apprendre qu’un incendie s’est déclenché, mais il mentirait s’il disait ne pas être excité à chaque fois qu’il est sur le point d’entrer en action, de sentir l’adrénaline couler dans ses veines avant de faire tout ce qui est en son pouvoir pour sauver des vies. Sans compter que c’est là une façon parfaite de terminer leur discussion.