may it be ✧ freya

Freya n’a jamais vu son fils être prêt aussi tôt. D’habitude, elle doit plutôt lui courir après pour qu’il accepte de mettre ses chaussures et c’est pour cette raison qu’ils sont souvent en retard. Mais pour une fois, c’est elle qui n’est pas prête. Penchée au-dessus de l’évier pour terminer la vaisselle, elle regrette déjà d’avoir accepté cette invitation faite par une copine que Zach s’est fait au foot. Elle n’a pas souvent ses après-midis de libre et en général, elle a une tonne de choses à faire. Comme tout le temps en fait. Parfois, elle a l’impression d’avoir au moins un peu le dessus sur les petits aléas du quotidien mais en ce moment, c’est loin d’être le cas. Le retour non désiré de Wyatt dans sa vie y est pour quelque chose. Avec son harcèlement et ses excuses sans fin, il est venu bouleverser sa vie, déjà pas toujours parfaitement organisée. Difficile de l’être quand on a un travail à plein temps et un jeune enfant. Et tout le reste à gérer à côté. Alors oui, elle aurait préféré pouvoir s’occuper de tout ce qu’elle doit faire au lieu d’aller passer sa journée à une adresse clairement trop riche pour elle. Mais c’était les yeux suppliants de Zach qui avaient fait pencher la balance. Planté à la porte de la cuisine, il attend, sans rien dire. Il n’ose plus depuis que Freya lui a demandé d’aller ranger un peu le salon s’il s’ennuyait trop en l’attendant. Finalement, elle peut vider l’évier et s’essuyer les mains. Elle analyse sa tenue, hésite à se changer un instant avant de poser à nouveau le regard sur son fils. Après tout, elle se fiche bien de sa tenue ou d’être jugée là-dessus par une mère de famille. Si elle devait se soucier de ce que pensent toutes les personnes dont elle croise le chemin, elle ne s’en sortirait plus. Un manteau enfilé et ils se mettent en route pour rejoindre le métro, puis l’adresse indiquée sur le bout de papier qu’avait récupéré Zach au football. Une fois sur place, Freya se demande sincèrement ce qu’elle fait là. Bien trop chic pour elle. Il y a même un portier qui demande l’autorisation au propriétaire des lieux de les faire monter. Pendant le trajet en ascenseur qui lui paraît interminable, Freya prend tout de même la peine de remettre ses cheveux en place, et son soutien-gorge un peu plus droit sous son pull. Et à peine la porte s’ouvre-t-elle que Zach disparaît, entraîné par une petite fille rousse, qui doit être Mary-Jane. Sa petite-copine-qui-est-pas-petite, comme il dit si bien. Et Freya se retrouve seule en face d’un homme qui tient un petit garçon, plus jeune. Elle fait un pas en avant, alors que celui-ci commente le départ précipité des deux enfants. « C’est ça. Il faut croire qu’il n’a pas peur des tempêtes. » De l’orage, un peu quand même, mais Freya aussi, donc ça paraît un peu plus normal. Elle sourit en voyant le petit garçon rire quand son père le qualifie de singe. Vu la position de l’homme, ça doit faire un moment qu’il le porte. C’est le genre de choses qu’on remarque quand on est parent. « Iain… Enchantée. Moi, c’est Freya. » Elle répète son nom pour être sûre de bien le prononcer. Elle n’a jamais entendu un tel prénom. Et d’ailleurs, elle n’a jamais vu d’homme comme lui. Il a une carrure qui en impose et ses cheveux qui tirent vers le roux ajoutent à un charme certain. « Rassurez-moi, vous n’en avez que deux des comme ça ? » Plaisante-t-elle en souriant au petit garçon accroché à son père. « Et donc comment s’appelle ce singe ? » Après tout, si son père se permet, elle doit pouvoir le faire aussi. Surtout que Freya dit ça d’une voix douce, absolument pas méchante. Parfois, ça peut être mal interprété alors qu’elle plaisante. Ça lui est déjà arrivé, surtout avec des mamans un peu trop sèches. Les papas, elle a un peu moins l’habitude de les côtoyer.

Garder son regard en direction du visage de la mère de Zach s’avère plus difficile que ce à quoi il s’attendait. Même s’il ne s’attendait pas à grand-chose en fait, conscient qu’il peut facilement être surpris. Comme toutes ses mères de famille le sont lorsqu’il débarque à une réunion et que, forcément, elles passent leur temps à le dévisager. Si dans un premier temps Iain s’en sentait presque gêné, il a fini par s’y faire et se mettre dans la tête que c’est comme affronter des fans un peu expansifs. Ce qui fonctionne très bien, hormis que ces femmes-là sont plus du genre à baver qu’à lui sauter dessus. Et là, il a l’impression d’être à leur place. Pas un seul instant il ne s’était attendu une personne plus jeune que lui – bien plus jeune – et aussi … eh bien sexy semble convenir à la perfection. Même avec des vêtements aussi banals, elle arrive à éveiller le démon qui sommeille en lui. « Tant mieux pour lui, il aurait eu quelques soucis à se faire autrement. » Sourire amusé peint sur ses lèvres, il regarde une nouvelle fois dans la direction que les enfants ont pris pour ensuite se concentrer sur Freya. « Si c’est plus simple, j’ai l’habitude de l’entendre prononcé à l’américaine. » Lui dit-il en l’entendant tenter de répéter son prénom aux consonances gaélique. « Enchanté aussi, Freya. » Un joli prénom pour une femme toute aussi jolie. Et au parfum envoûtant maintenant que les premières notes viennent jusqu’à lui. Finalement, accepter d’inviter Zach chez lui n’était pas une si mauvaise idée en mettant de côté Parker qui reste inlassablement accroché à son père qui fatigue. « Mon dieu non ! » Deux comme Parker ça serait signer sa fin, déjà que le gérer avec sa sœur n’est pas simple. « Ce singe c’est Parker qui va me faire le plaisir d’aller jouer avec les enfants pour laisser les adultes ensemble. » Nouvelle tentative. Iain se penche en avant pour permettre à son fils de descendre et qui, ô miracle, accepte enfin de le lâcher. Les débuts timides en action, il disparaît très vite, trottinant probablement jusqu’à la chambre de sa sœur permettant à son père de faire signe à Freya d’entrer. « Ça passe si je tutoie ? Je ne voudrais pas paraître trop familier. » Il pourrait comprendre qu’elle n’accepte pas. Ils ne se connaissent que depuis quelques minutes, mais il trouve tout de même plus agréable d’avoir une conversion sans avoir l’impression de faire un bond dans le temps, quelques siècles en arrière. Guidant la jeune femme jusqu’au salon, il s’approche du bar et sort deux verres, montrant l’un d’eux à Freya pour savoir si un verre l’intéresse.

Freya ne s’attendait clairement pas à ça. En général, quand Zach est invité chez un ami, elle doit faire la discussion avec une maman avec qui elle n’a pas grand-chose en commun. La plupart ont une vie de famille remplie, travaillent peu ou pas du tout, et ont un mari dont elles se plaignent. A côté, Freya n’a pas du tout la même vie, et se contente d’écouter en hochant la tête, comme si elle comprenait. Être maman célibataire, elle a toujours été dans une catégorie à part. Certes, elle n’est pas la seule, mais ce n’est pas la norme. Et souvent, le papa est quand même dans le paysage, juste plus avec la maman suite à un divorce. Alors Freya s’était préparée à ça, pas à être accueillie par un papa, et encore moins un papa aussi séduisant. Elle ne saurait même pas dire pourquoi, mais il lui plaît. Il dégage quelque chose qui l’impressionne, et l’attire un peu par la même occasion. Ce qui n’est absolument pas raisonnable. « Ça vient d’où comme prénom ? » Freya est curieuse. S’il dit qu’il y a une prononciation différente dans leur pays, c’est qu’il doit venir d’ailleurs. Même si elle trouve normal de prononcer son prénom comme lui, aussi difficile cela soit-il. Elle sourit en voyant le singe dénommé Parker partir dans la même direction que les deux plus grands. Zach a souvent du mal à jouer avec les plus petits, mais sans doute que ça ira s’il y a la sœur avec eux. Freya espère juste qu’il n’y aura pas de souci. Ça serait dommage de devoir rentrer alors que Zach avait hâte de venir. Et aussi parce qu’elle peut faire la conversation avec un homme séduisant, pour une fois. Elle tourne la tête vers lui lorsqu’il lui adresse la parole, sursaute presque parce qu’elle était perdue dans ses pensées. « Oh oui, bien sûr. Ça me donne toujours l’impression d’avoir une quarantaine d’années quand on me vouvoie. » Et puis même, elle préfère tutoyer les gens aussi. Là, peut-être qu’il lui faudra un petit temps d’adaptation, parce que Iain est plus âgé qu’elle, mais ça devrait le faire. Elle le suit jusqu’au salon, et le détaille peut-être un peu trop pendant qu’il est dos à elle. Remarque qu’il n’a pas d’alliance à sa main gauche quand il lui montre deux verres. « Un verre d’eau, ça sera très bien. Merci. » Elle ne va quand même pas lui demander de l’alcool à peine arrivée, et à cette heure-là de l’après-midi. Même si en vérité, ça la tenterait bien. « C’est rare de voir des papas à ce genre de play-date. » Peut-être que, subtilement, elle demande où est la maman des deux enfants. Peut-être.

Difficile de ne pas remarquer la surprise dans le regard de la jeune mère. Bien sûr qu’elle ne s’attendait pas à tomber sur un homme. En général, ce sont les mères qui prévoient ce genre de goûter – un cliché selon lui – et il comprend parfaitement son étonnement. Lui l’est tout autant mais pour une autre raison. Une raison bien moins innocente que la sienne. Comme il peut être faible par moment ! Cela dit, loin de lui l’idée de tenter quoi que ce soit avec les enfants dans les parages. Ou peut-être en étant aussi discret que possible, uniquement pour tenter de voir si elle pourrait avoir un quelconque intérêt pour lui. Après tout, pourquoi pas ? Il est presque persuadé que MJ lui a dit que Zach n’avait pas de père. S’il sait que c’est techniquement impossible, ça signifie toutefois qu’elle est célibataire … en principe. Et pourquoi est-ce qu’il pense déjà à tout ça ? Se raclant la gorge, Iain redescend sur terre, chasse toutes pensées mal placées de son esprit. « D’Ecosse. J’en suis originaire même si mon accent se fait moins sentir depuis quelques années. » Principalement pour rentrer dans le moule aux Etats-Unis. Il s’est calé sur l’accent américain au détriment de celui de son pays natal qui ressort assez fortement lorsqu’il s’énerve ou lorsqu’il ne fait pas assez attention pour prendre celui qu’il a appris à son arrivée sur le sol américain. Puis il sourit à nouveau, ravi de savoir qu’il n’aura pas à avoir l’impression de faire la discussion avec une personnage âgée – ou d’avoir la sensation d’en être une lui-même. Une fois dans le salon, une boisson proposée, il accède à sa requête en attrapant le pichet d’eau fraîche, se sert un fond de whisky et lui apporte son verre. « Sage décision. » Ne peut-il s’empêcher d’ajouter alors que lui est incapable de résister à l’appel du whisky, même si ce n’est que pour deux gorgées. Certains diront qu’il a cet alcool dans les veines et Iain n’ira pas le nier. Son attention toujours portée sur Freya, il agite brièvement la tête à ce qu’elle dit. « Ça aurait été compliqué que la mère s’en occupe. Je ne suis même pas certain qu’elle aurait été capable de faire quoi que ce soit avec MJ en fait. » Ce qui est triste à dire. Raleigh ne sait même pas ce que ses enfants aiment, elle ne les a pas assez aimés pour se battre pour eux. C’est lui qui les a élevés, lui qui a soigné leurs blessures, qui est resté éveillé jusque tard dans la nuit lorsqu’ils ont été malade et qui a dû accepter d’être coiffé et maquillé par sa fille. « On ne s’en plaint pas, on est bien tous les trois même si je pense qu’il va falloir que je me laisse pousser les cheveux pour faire plaisir à MJ. » Qu’il plaisante même s’il en serait capable. « Elle m’a dit que tu élevais Zach seule ? Je ne veux pas être trop indiscret … Je suis juste curieux de nature. » Et trop désireux de savoir s’il peut ou non tenter d’aller un peu plus loin … juste un peu du moins.

Finalement, ce rendez-vous pour les enfants s’annonce nettement plus intéressant. En général, Freya n’est jamais complètement à l’aise avec des mamans un peu trop guindées. Même si elle n’est pas la seule maman jeune à l’école, ce ne sont pas forcément celles qui organisent ce genre de choses. D’ailleurs, même elle ne le fait presque jamais, à moins que Zach n’insiste vraiment. Un enfant, ça lui suffit largement. En général, elle a hâte que ça se termine, attend presque une dispute entre les enfants qui signerait la fin de la rencontre. Là, pas tellement. Elle se sent bien avec ce papa. Elle est souvent plus à l’aise avec les papas, qui se mettent moins de pression que les mamans. Et puis peut-être qu’elle est intriguée par ce charisme qu’il dégage, par ses cheveux roux qui font tout son charme. Ce qu’elle comprend mieux une fois qu’il lui indique d’où il vient. « Oh d’accord. Ça doit être beau l’Ecosse. » A vrai dire, elle n’en sait rien. Elle ne s’est jamais trop renseignée sur ce pays, mais peut-être qu’elle le fera. Tout ce qu’elle sait, c’est que les hommes y portent des kilts, ce qui n’est pas le cas d’Iain. Et puis elle ne lui demandera pas s’il en porte parfois, ça serait trop gênant comme question. Quand elle le voit revenir avec un verre d’eau pour elle et un verre de whisky pour lui, elle regretterait presque d’avoir été raisonnable. Peut-être qu’elle demandera autre chose ensuite. Pour l’instant, elle voudrait bien savoir s’il y a une maman dans le tableau, même si tous les signes la poussent à penser que non. Le fait que ça soit lui organise ce genre de choses. Le fait qu’il n’ait pas d’alliance. Et peut-être un peu la décoration qui, loin d’être moche, n’est pas très féminine. Et Iain le lui confirme rapidement. La maman n’est pas présente. Freya ne peut s’empêcher de rapprocher leurs deux situations, même sans en connaître les détails. S’il a deux enfants, c’est que la maman a été là, à une époque. Elle est surprise d’entendre la question lui être retournée. Visiblement, Zach a parlé pour elle. Et dans les circonstances actuelles, elle ne peut s’empêcher de se demander si cela lui pèse de ne pas avoir de papa. « Oui, c’est ça. Enfin j’ai toujours pu compter sur l’aide de ma famille, heureusement. » Elle n’a pas envie de s’étendre là-dessus, parce que ça ne le concerne pas. Et puis en ce moment, elle préfère éviter de penser à tout ça. Elle boit une petite gorgée d’eau, essayant de penser à autre chose. « Ce n’est pas facile tous les jours, mais je pense que tu connais ça. » Même à deux, être parent ne doit pas être facile. Mais c’est ainsi, et Freya ne regrette absolument pas. « Et qu’est-ce que tu fais comme métier ? » Pour engager la conversation, ça semble normal de commencer par ça.

Ce n’est pas vraiment dans ses habitudes d’être aussi nostalgique, d’autant plus qu’il y retourne sur son île natale, mais à peine parle-t-il de l’Écosse qu’il est transporté là-bas. Vers ces montagnes qui parfois donnent l’impression de toucher les nuages, les Highlands qui changent de couleurs selon la saison et le vent frais venant fouetter son visage lorsqu’il se balade près de la côte. Il revoie tout comme s’il s’y trouvait et se retient de soupirer. Peut-être ira-t-il pour les fêtes de fin d’années même si ce n’est pas prévu. Sa mère en serait ravie, surtout si ça lui permet de voir ses petits-enfants en plus de ça. Il pourrait faire l’effort, tenter d’être poli avec son père. Si ce n’est pas pour lui, au moins pour le reste de sa famille. Une idée qu’il garde en tête et à laquelle il réfléchira plus sérieusement un autre jour. « Si tu as l’occasion un jour, je te le conseille fortement. Totalement par fierté écossaise. » Iain n’en a pas honte de toute façon. Fier de sa nationalité, de ses origines, son accent écossais s’est un peu gommé avec les années passées aux Etats-Unis mais reste là, dans un coin. Comme sa manie de s’énerver en gaélique. Chacun son verre en main, il lui fait signe de le suivre jusqu’au canapé sur lequel il s’installe, se lançant alors de son explication quant à l’absence de la mère des enfants. Et Freya lui confirme ensuite élever Zach seule. Information qui, malgré lui, lui fait plaisir à entendre. « La famille c’est toujours ce qui importe le plus. » Lui, il a eu sa sœur pour l’aider à défaut de ses parents, mais ça a toujours été bien assez pour lui. « J’imagine parfaitement, oui. En général, ils savent se tenir mais quand ils se disputent, surtout après une journée de travail, ce n’est pas simple. » Ou alors gérer quand l’un est malade mais pas l’autre. En fait, c’est tout un tas de petites choses qui parfois épuisent énormément. « Hm … je suis lieutenant pompier à la caserne de Williamsburg. » Il lui annonce avant de boire un peu de whisky. « Reconversion. Honnêtement, ça ne paierait pas un tel appartement. J’étais acteur avant ça. » Il ressent le besoin de s’expliquer alors même que Freya ne lui a rien demandé. « Et toi ? J’aurais pu faire passer un interrogatoire à ma fille, mais je me suis dit que ça me ferait perdre mon titre de père de l’année et j’y tiens. » Qu’il plaisante. Mais toujours aussi curieux, en apprendre plus sur elle le tente beaucoup.

Pour une fois, lors de ce genre de rendez-vous pour les enfants, Freya a l’impression qu’elle n’aura pas besoin de mettre de l’eau dans son vin. Pas besoin de faire semblant d’apprécier une conversation trop longue sur la vie d’une maman au foyer. Non, Iain est différent. Principalement, parce que c’est un homme. Elle ne le connaît pas assez pour en savoir plus sur lui mais déjà, il l’accueille bien, et Freya se sent à l’aise. Peut-être un peu intriguée. Peut-être un peu attirée par ses épaules carrées. Et cet exotisme qu’il dégage, simplement parce qu’il vient d’ailleurs. L’Ecosse n’est pas forcément un pays qui la fait rêver, mais après tout, elle ne le connaît pas du tout. Enfin si elle a la chance d’aller en Europe un jour, ça ne serait pas son premier choix. « J’y penserais alors. » Dit-elle, plus pour lui faire plaisir qu’autre chose. C’est vrai que si les écossais sont aussi séduisants, elle pourrait reconsidérer. Tous les deux parents célibataires, il paraît normal d’en discuter un peu. Après tout, ils doivent avoir les mêmes galères parfois, même si leurs expériences sont aussi très différentes. Aucune famille n’est pareille, aucun enfant non plus. Et lui, il en a deux, ce qui ne doit pas aider. Surtout s’ils se disputent, comme il l’explique. « C’est vrai qu’au moins, Zach ne se dispute qu’avec moi. Ce qui n’est pas forcément plus supportable le soir. » Et pas toujours évident à gérer, mais Freya relativise toujours. Ils sont en bonne santé, arrivent à vivre correctement ou presque. C’est le principal. Elle hoche la tête en l’entendant dire qu’il est pompier. Elle peut tout à fait l’imaginer. Il en a la carrure. Oui, elle peut très bien l’imaginer en uniforme. Ce qui n’est peut-être pas une très bonne idée. Elle est étonnée d’apprendre ce qu’il faisait avant, et puis tout à coup, ça lui rappelle quelque chose. « Ah mais oui ! C'était une série policière non ? Comment ça s’appelait déjà ? » Elle se souvient avoir été déçue quand ç’avait été arrêté, même si elle regardait sans être passionnée. En fait, elle se souvient surtout de lui, dans une autre uniforme cette fois. C’est fou ça quand même. « J’aurais pu poser quelques questions moi, j’aurais été moins surprise en arrivant ici. » Elle sourit, avant de boire une courte gorgée. Elle croise les jambes et se tourne un peu plus vers Iain. « Je suis prof de yoga dans une salle de sport en ville. Je travaille parfois sur la musculation ou le vélo quand il y a besoin mais je fais surtout du yoga, et c’est ce que je préfère. » De loin même. Le reste, elle ne le fait que pour avoir un complément de salaire, et pour se faire bien voir du propriétaire.

Sans parvenir à faire autrement, Iain la détaille lorsqu’il le peut. Pour avoir croisé un bon nombre de mères – célibataires ou non – depuis la naissance de ses enfants, il peut dire ne jamais en avoir vu d’aussi séduisantes. Freya a ce petit côté innocent qui se mélange à un corps parfait qu’il devine sans mal sous ses vêtements. De quoi séduire n’importe quel homme et surtout lui. Une chance qu’il sache se tenir malgré ses petits coups d’œil dès qu’elle ne regarde pas vers lui. Et puis surtout, c’est la mère d’un camarade de sa fille. Risquer de jouer au gros lourd ce n’est pas vraiment une bonne idée, ni son genre. Il ne voudrait pas causer un éloignement entre les deux enfants qui semblent s’entendre à merveille – et Iain soupçonne qu’il y a plus que ça. Laissant de côté son discours de fier écossais concernant son pays, il s’intéresse surtout à Freya et à son fils. « J’imagine. Je compte plus le nombre de fois où en rentrant j’ai simplement envie de me poser et de rien faire d’autre. » Alors, évidemment, se disputer avec ses enfants ou les entendre le faire tous les deux, ce n’est pas l’idéal. Il prend sur lui, même si parfois, il craque, mais c’est aussi une des choses qu’il a appris en étant père. Ça et le fait que se promener nu dans son logement n’est plus possible. Dommage. « LAPD. » Répond-il en riant. « Oui, ils ont été d’une originalité débordante. » Cela dit, ça n’avait pas freiné le succès de la série et les nombreuses récompenses que l’équipe et les acteurs avaient reçu durant le temps où elle avait durée. « Parfois les surprises ça a du bon. » Comme le fait de découvrir que la mère d’un petit garçon est aussi séduisante et célibataire par exemple. Séduisante, célibataire et prof de yoga. Comment pourrait-il ne pas être rêveur entendant autant de bonnes nouvelles s’enchaîner ? « Je sais que certains hommes en font, mais … je suis plutôt sûr de me casser quelque chose si je tentais le yoga. » Il a de la souplesse mais il ne faut pas abuser non plus. Non, lui préfère la musculation. « Et ce n’est pas trop fatigant ? Supporter certains chieurs ? Parce que je suis certain qu’il y en a. » Des gros lourds comme il en a souvent vu à la salle de sport qui draguent tout ce qui bouge. D’accord, il rentre dans la seconde catégorie, mais ça ne lui viendrait pas à l’idée de faire un commentaire graveleux aux femmes venant se dépenser. A vrai dire, il ne parle à personne quand il va ce qui règle tout.

« C’est normal si parfois, je trouve ma journée de travail plus reposante que la soirée ? » Elle se mordille l'intérieur de la joue, gênée par cette confession. Mais Iain la met en confiance, et elle sent qu’il pense la même chose qu’elle. Être parent n’est jamais facile. Le faire seul n’arrange en rien les choses. Et encore, ça doit être pire pour lui, qui a deux enfants, et un travail qui doit être beaucoup plus fatigant, surtout psychologiquement. Oui, elle, elle fait du sport toute la journée, mais elle n’est pas confrontée à beaucoup de dangers. On peut toujours trouver pire que soi. Même si parfois, elle a du mal à se le dire, surtout quand Zach semble déborder d’énergie tout le temps, même après une journée d’école. Mais pour l’instant, elle n’a pas à s’en inquiéter. Il est en train de jouer avec d’autres enfants, et les quelques bruits qui viennent du couloir ne sont que des rires et quelques cris sortis de jeux. Et en attendant, elle peut profiter de la conversation qu’elle a avec Iain. Conversation qui s’avère encore plus intéressante quand elle réalise qu’elle l’a déjà quelque part. Qu’elle a possiblement déjà fantasmé sur lui devant son écran de télévision. Pas vraiment un aveu qu’elle est prête à faire et à ce moment, elle est heureuse de ne pas rougir trop facilement. Il n’a sûrement rien remarqué. « Au moins, on sait de quoi ça parle dès le premier regard. » Elle, la série ne l’avait jamais passionnée, mais elle ne va quand même pas faire de critiques. Surtout qu’il était la seule partie qui l’intéressait. « C’est vrai. » Oui, aujourd’hui, elle avait été agréablement surprise. Qu’est-ce que ça aurait changé qu’elle sache que ça serait un homme célibataire qui l’accueillerait aujourd’hui ? Sans doute rien.  « Pourquoi est-ce que tout le monde pense ça ? Quand on débute, il suffit d’y aller progressivement. C’est normal de ne pas réussir certaines postures dès le départ, mais tout le monde a les outils pour réussir. » Après tout, la souplesse, ça se travaille, même si tout le monde n’a pas les mêmes avantages de départ. Freya défendra toujours le yoga, quoiqu’il arrive. Même si elle sait aussi que ce n’est pas fait pour tout le monde. « Ça peut l’être parfois. Mais quand mon patron n’est pas dans le coin, je ne me gêne pas pour les remettre à leur place et après, leur égo est tellement blessé que je ne les entends plus. » Ce serait mal connaître Freya que de penser qu’elle va se laisser faire. Encore moins par un homme qui se croit tout permis. « Enfin je suppose que tu rencontres moins de chieurs en tant que pompier. Ce qui ne veut pas dire que c’est un métier moins fatigant. »