(mm) after losing all I've lost, the best part is you're still here.

Au volant de sa voiture, Eris conduit en direction de l’est de Williamsburg. Aujourd’hui, elle ne travaille pas et dédie entièrement sa journée à sa meilleure amie. Meghan est d’ailleurs assise sur le siège passager. En ce mardi ensoleillé malgré des températures encore fraiches, Eris a endossé un double rôle : chauffeur de taxi et conseiller immobilier. En effet, la belle blonde a décidé de déménager et a demandé à Eris son aide pour choisir son futur logement. La brunette doit bien avouer que l’idée de voir son amie quitter la colocation dans laquelle elles vivent ne l’enchante pas tellement. Il ne faut pas oublier que c’est en grande partie parce que Meghan habitait déjà chez Tommy qu’Eris a accepté d’y poser ses valises. Cohabiter avec huit personnes à trente ans ne faisait clairement pas partie de sa bucketlist mais au moins, la présence de Meghan adoucit le tableau, le rend plus agréable et moins pathétique – elle espère. Malheureusement, cette aventure touche à sa fin. Au fond, Eris s’attendait à voir Meghan prendre cette décision. A présent qu’elle attend un enfant, elle doit penser à lui en premier. Impossible d’élever correctement un bébé dans une telle colocation. Souvent, Eris la compare à celle de l’Auberge Espagnole, film français connu où plusieurs étudiants de différentes nationalités se retrouvent à partager un toit à Barcelone sauf qu’eux, ils ne sont plus étudiants depuis un moment. Alors, c’est tout de suite moins drôle. En tout cas, Eris sent qu’elle commence à toucher ses limites elle-aussi. Voir Meghan s’en aller, ça la fait réfléchir encore plus surtout qu’à présent, son ancienne maison est vendue et qu’elle a les moyens de redevenir propriétaire. Bref, aujourd’hui, il ne s’agit pas d’elle mais bel et bien de Meghan. D’ailleurs, son gps l’informe qu’elles sont arrivées à destination. Eris trouve une place où se garer. Déjà le quartier a l’air charmant, ça me semble pas mal résidentiel. Un premier constat qui n’est pas difficile à faire et que Meghan doit partager. Elles retrouvent l’agent immobilier chargé du dossier de son amie devant l’immeuble où se trouve le logement libre. Evidemment, Eris ne perd pas de temps pour observer la façade. C’est principalement à Meghan que le professionnel s’adresse, permettant à Eris de rester en retrait pour observer les petits détails. Ils entrent dans le hall et aussitôt, la brunette remarque un problème d’électricité. Les lumières sautent. Deuxième constat, pas d’ascenseur alors que l’appartement est situé au troisième étage. Ça démarre mal mais Eris ne pose pas de conclusions hâtives, si ça se trouve l’appartement rattrapera ces détails-là. Ils démarrent l’ascension jusqu’à troisième étage.

@Meghan Macleod

Pour une fois, elle sort de la maison avec plaisir. Ces derniers temps, elle préfère nettement rester à l’intérieur, devant un film ou une série, au fond de son lit, tout en piochant dans les réserves de gâteaux qu’elle s’est fait. Pas un programme très glamour mais il n’y a pas grand-monde pour la voir et en général, elle ne sort que pour aller au travail ou quand elle y est vraiment obligée. Donc plutôt en râlant. Mais pas aujourd’hui. Non, aujourd’hui, c’est pour quelque chose de positif qu’elle sort et donc elle est de bonne humeur pour une fois. Se trouver un nouveau logement risque de ne pas être une partie de plaisir mais elle en a plus que besoin. Et puis elle n’est pas seule pour le faire, puisqu’Eris a pris sa journée pour l’accompagner dans ses visites. Meghan a envie d’être optimiste et elle compte bien l’être aujourd’hui. Avec ce bébé qui grandit depuis presque cinq mois dans son ventre, il est temps qu’elle reprenne son indépendance. Plus de colocation trop nombreuse. D’abord parce qu’elle aurait du mal à le supporter. Ensuite, parce qu’elle ne voudrait pas déranger tout le monde avec un nouveau-né. De toute façon, c’était toujours fait pour être temporaire, alors on peut même dire qu’elle a traîné pour chercher autre chose. Mais c’est fini maintenant. Si elle reporte encore, elle risque d’être vraiment trop grosse et fatiguée pour envisager un déménagement. Là, elle peut encore sortir de la voiture d’Eris sans trop souffrir. « C’est vrai que ça semble bien. » Et elle s’est même un peu renseignée sur les écoles à proximité, même si elle a l’impression d’être folle en faisant ça. Ce bébé, elle a encore du mal à vraiment l’imaginer, alors rentrer à l’école, ça paraît tellement loin. Mais elle compte se trouver un logement qu’elle gardera, donc elle se doit de penser à l’avenir. Elles retrouvent rapidement l’agent immobilier, qui commence à expliquer certaines choses à Meghan. Elle l’écoute avec attention, espérant qu’il aura bien rencontré tous ses critères pour l’appartement qu’elle compte acheter. Au moins, le bâtiment semble en bon état et il a un certain cachet. Les deux amies le suivent à l’intérieur et là, Meghan est un peu moins convaincue. Elle aime moins, et les trois étages qu’elle monte difficilement ne l’y aident pas. N’avait-elle pas précisé qu’elle voulait un ascenseur ? Comment pourrait-elle monter aussi haut avec une poussette ? Elle hésite même à suivre l’agent à l’intérieur parce qu’un coup de cœur ne saurait pas la faire changer d’avis mais elle le fait quand même, par politesse. A peine arrivée dans l’appartement, elle fait une moue dubitative. « C’est… petit. » Pourquoi mentir ? Elle ne va pas acheter cet appartement pour lui faire plaisir. Il faut qu’il lui plaise et ce n’est pas vraiment le cas. En plus de ça, les toilettes sont difficiles à atteindre alors il vaut mieux ne pas avoir le Boeing en bout de piste. Et avec les envies pressantes qu’elle a souvent, ce n’est pas une bonne idée. « T’en penses quoi ? » Murmure-t-elle à Eris tout en suivant de loin l’agent qui part vers les chambres. « J’ai bien envie de passer tout de suite au suivant. Je peux lui demander tu crois ? » Elle ne sait pas vraiment ce qui se fait ou non. Elle n’a jamais acheté de logement auparavant. Eris elle, l’a déjà fait. Sans doute qu’elle pourra être plus efficace qu’elle. En plus du soutien moral qu’elle lui apporte sans arrêt.

C’est vrai que ça semble bien. Eris hoche la tête d’un air approbateur mais hélas, bien vite, l’enthousiasme des deux trentenaires chute. Problème d’électricité, absence d’ascenseur, appartement au troisième étage, ça fait tout de suite moins rêver mais elles laissent quand même une chance à l’agent immobilier. Enfin, c’est une façon de parler parce qu’Eris sent bien que la visite ne sera que de courte durée. Impossible pour Meghan de se passer d’un ascenseur avec le bébé qui ne tardera plus à arriver. Surtout qu’une fois l’appartement atteint, c’est loin d’être le coup de cœur. La brunette ne peut qu’être d’accord avec le constat de la blonde. Certes, Meghan ne demande pas un palace mais il y a une limite raisonnable à ne pas dépasser. Cette première proposition est clairement un échec, à tel point qu’Eris commence à douter des compétences de l’agent immobilier. Aucun des critères indiscutables de sa meilleure amie n’est présent dans ce logement. Est-ce une blague ? T’en penses quoi ? Bras croisés sous sa poitrine, Eris se penche vers Meghan pour lui glisser doucement. Tu me le demandes vraiment ? Le placard d’Harry Potter avait plus de cachet que cet appartement. C’est à peine si elle exagère et c’est bien triste. J’ai bien envie de passer tout de suite au suivant. Je peux lui demander tu crois ? Dans un premier temps, Eris hoche la tête avant de répondre sans hésitation. Bien sûr, ça vous fera gagner du temps à tous les deux. Par contre, rappelle-lui tes critères, j’ai pas franchement l’impression qu’il ait compris ce que tu recherches. Ce raté, elles en riront dans quelques temps à coup sûr mais pour l’instant, le temps pressant pour Meghan, il n’y a rien de drôle dans la situation. Eris espère que l’agent immobilier compte se rattraper sur le second logement.

Il est plus que temps pour elle de chercher un nouveau logement. La colocation ne devait être que temporaire et finalement, ç’avait été plus simple d’y rester. Au moins, elle a pu économiser un peu plus pendant ce temps et elle peut donc se permettre un prêt intéressant. De quoi se trouver un appartement pour le long terme. Quelque chose de stable pour elle et pour son bébé. Cette journée risque d’être fatigante, à moins d’un coup de cœur rapide. Heureusement qu’Eris est avec elle, parce que pour le coup de cœur, ça semble mal parti. Le premier appartement ne lui plaît pas du tout. Loin de rencontrer ses critères, elle demande tout de même son avis à sa meilleure amie. Son commentaire la fait rire. C’est vrai qu’à choisir, mieux vaut vivre dans un placard. « Au moins, Harry Potter était au rez-de-chaussée. » Ce qui sera plus pratique quand elle aura une poussette à rentrer. Enfin elle ne voit pas trop l’intérêt de suivre l’agent dans toutes les pièces alors qu’elle sait d’avance qu’elle n’achètera pas cet appartement, et Eris le lui confirme. Elle a des critères qui lui semblent important, encore plus quand on achète au lieu de louer. Elle veut être sûre de l’endroit où elle vivra. Meghan rejoint alors l’agent immobilier et lui explique son souhait sans y aller par quatre chemins. Elle n’a pas envie de s’embêter à visiter des logements qui ne lui correspondent pas, surtout si elle doit grimper beaucoup d’escaliers. « J’en ai un autre dans le coin, on peut peut-être continuer avec celui-ci. Et il a un ascenseur. » Un bon point. Meghan sourit à Eris. Ça ne doit pas être une partie de plaisir pour elle mais Meghan est heureuse qu’elle soit là. Faire tout ça toute seule ne l’aurait pas enchantée. Elles quittent alors l’appartement et commencent à descendre alors que l’agent referme tout. « Je suis trop idéaliste ou bien c’est possible de trouver un nid douillet pour un prix raisonnable ? » Elles sont à New York, l’immobilier est cher mais elle a un budget qu’elle juge suffisant. « Enfin j’espère qu’on n’en aura pas pour l’après-midi, tu dois avoir d’autres choses à faire. » Une fois en bas, l’agent immobilier les rejoint rapidement et elles peuvent rejoindre l’appartement suivant. Puis le suivant encore. Pas de grimaces à chaque fois, mais pas de coup de cœur non plus. Derrière ses sourires, Meghan sent bien que l’agent immobilier commence à en avoir marre. « J’ai un appartement qui vient d’arriver sur le marché, un peu plus au nord. Un peu hors du budget prévu mais à mon avis, il devrait vous plaire. Est-ce qu’on tente ? » Meghan regarde Eris, et hausse les épaules. Pourquoi pas ? Elle peut peut-être demander un prêt un peu plus élevé, si ça lui plaît vraiment.

Tentant de ne pas prendre cette première visite complètement raté trop sérieusement, Eris se permet une référence au placard peu spacieux d’Harry Potter, personnage principal de la saga de films connue de tous. La réponse de Meghan la fait sourire. Elle marque un point. Dans son malheur, le petit brun n’avait pas à monter trois étages même si une fois arrivé à Poudlard, ce fut autre chose. Le fait qu’elle divague aussi facilement sur la vie d’Harry Potter prouve à quel point cet appartement ne retient absolument pas son attention et très vite, Meghan informe l’agent immobilier qu’elle en est arrivée à la même conclusion. Ce dernier lui annonce avoir une autre possibilité, près d’ici et avec ascenseur. Voilà qui a l’air déjà mieux. Dans les escaliers, alors qu’elles prennent de l’avance sur le professionnel, Meghan reprend la parole. Je suis trop idéaliste ou bien c’est possible de trouver un nid douillet pour un prix raisonnable ? Mais non, t’es pas idéaliste ! Tu vas finir par trouver. Tous les apparts ne seront pas aussi nuls que celui-ci. Heureusement, d’ailleurs. Dans le cas contraire, New-York ferait déjà moins rêver. Enfin j’espère qu’on n’en aura pas pour l’après-midi, tu dois avoir d’autres choses à faire. Eris sourit. Ne t’en fais pas pour ça, ma journée t’est réservée même si j’envisage une fin de programme qui consiste à manger de la glace devant un bon film. Et encore, il n’a pas même pas à être bon. Tous ne peuvent pas l’être.
Malheureusement, les visites s’enchaînent et se ressemblent. Meghan n’a pas trop de remarques négatives à faire mais pas de coup de cœur non plus et Eris comprend qu’elle ne souhaite pas choisir par défaut. Elle achète après tout, elle a le droit de se montrer exigeante. Hélas, elle semble avoir complètement perdu espoir pour aujourd’hui et c’est ce moment même que choisit l’agent immobilier pour lui parler d’un nouveau logement, légèrement hors budget d’après ses dires. Après un regard entendu échangé avec Meghan, Eris annonce avec entrain histoire de remotiver la blonde. Allons-y !
Ah oui, quand même ! C’est sa première remarque. Eris n’a rien dit en apprenant qu’il s’agit d’un duplex alors qu’elle apprécie particulièrement ce type de logements. Elle n’a pas dit un mot durant toute la visite non plus, son attention dérobée par le bien immobilier. Elle adore, en vérité et ça doit se voir. Soudain, je regrette de ne pas être l’acheteuse. Elle plaisante bien sûr mais au fond, il y a une petite part de vérité. Si jusqu’à présent Meghan n’a pas eu de coup de cœur, Eris vient d’en avoir un.

Peut-être naïvement, Meghan avait espérer trouver un appartement rapidement et qui puisse correspondre à ses critères. Elle ne pensait pas que le temps lui paraitrait si long alors qu’elle découvre de nombreux appartements, sans qu’aucun ne lui plaise vraiment. Pourtant, l’agent immobilier lui avait dit que dans son budget, elle pourrait trouver. Plus la journée avance, et plus elle se dit qu’elle aurait déjà abandonné sans la présence d’Eris. C’est d’ailleurs encore sa meilleure amie qui la motive pour un logement que propose l’agent. En dehors de son budget, elle ne se fait pas trop d’illusion. Elle ne risque pas de payer plus cher que prévu s’il lui présente encore un appartement comme ceux qu’ils ont vu depuis le début de l’après-midi. « Après, on rentre et on prend la glace que tu m’as promis ? » Elle en a marre de porter son ventre, en plus de tout ça. Ses pieds commencent à en avoir marre, mais ils montent quand même dans l’ascenseur pour cette dernière visite. Une fois la porte ouverte, Meghan reste muette. Pas de dégoût cette fois, mais impressionnée. L’appartement est vraiment très lumineux, grand, bien conçu. Eris semble d’accord, vu l’expression sur son visage. Et chaque pièce présentée convainc encore un peu plus Meghan. Elle s’imagine parfaitement ici, et c’est la première fois depuis le début des visites qu’elle le pense. Même les escaliers pour arriver au deuxième niveau du duplex ne la dérangent pas tant que ça. Une fois la visite terminée, l’agent immobilier s’éloigne un peu d’elles, et Eris en profite pour dire tout son regret de ne pas être l’acheteuse. Meghan n’est pas la seule à être convaincue apparemment. « Il est beau hein ? J’arrive pas à croire qu’un appart pareil puisse exister. » Surtout après tout ce qu’elles ont vu pour l’instant. « Mais il est grand… très grand. Je n’ai pas besoin d’autant de pièces, surtout que tu sais que je déteste faire le ménage. » C’est le seul bémol. Ça, et le prix, plus élevé que ce qu’elle avait prévu. « C’est dommage, il me faudrait le même mais… coupé en deux. »

Les visites s’enchainent mais toujours rien. Les propositions d’appartements ne plaisent pas à Meghan qui commence d’une à s’agacer et de deux, à fatiguer. Pas étonnant, elle a un gros ventre à porter maintenant. Du coup, Eris prend son rôle à cœur, une nouvelle fois et l’encourage à passer au suivant, celui quelque peu hors budget mais qui apparemment vaudrait le coup. Elles verront bien une fois sur place parce que pour le moment, ils n’ont pas l’air d’avoir la même définition du « valoir le coup ». Après, on rentre et on prend la glace que tu m’as promis ? Eris lance un sourire à sa meilleure amie, un air attendri sur le visage avant de passer un bras sur ses épaules pour la rapprocher d’elle et déposer un baiser sur son front. Promis, qu’elle répond avant qu’elles ne prennent la route à nouveau. Heureusement qu’elle aime conduire parce que les kilomètres s’enchainent et la circulation new-yorkaise ne rend pas la tâche aisée.
Cependant, ce n’est pas pour rien puisqu’une fois le logement visité, Eris se rend compte que ça valait effectivement le coup. Elle adore, tout simplement et le fait comprendre à Meghan dans une petite boutade pourtant fondée. Bien que cette série de visites ne soit pas la plus passionnante qu’il soit, ça lui permet de se rendre compte qu’elle aussi elle a envie de partir. La colocation, c’est amusant cinq minutes mais à son âge, elle n’a pas envie de continuer à vivre avec autant de monde éternellement surtout que de base, elle a accepté parce que la blonde y vivait ce qui ne sera plus le cas dans peu de temps. Il est beau hein ? J’arrive pas à croire qu’un appart pareil puisse exister. Meghan lui ôte les mots de la bouche. Elle n’aurait pas dit mieux. Tous les appartements visités aujourd’hui réunis ne valent pas celui-là. Mais il est grand… très grand. Je n’ai pas besoin d’autant de pièces, surtout que tu sais que je déteste faire le ménage. Un sourire amusé pointe sur les lèvres de l’argentine. Personne n’aime faire le ménage, Meghan. Enfin personne de normalement constitué, qu’elle juge nécessaire de préciser. Il y a quand même meilleure façon d’occuper son temps libre. C’est dommage, il me faudrait le même mais… coupé en deux. Eris affiche une mine déçue. Si Meghan habitait ici, elle pourrait au moins profiter un minimum de ce duplex. C’est triste. Dommage que tu n’envisages plus la coloc, qu’elle finit par dire sur le ton de l’amusement. Il est parfait ce duplex ! qu’elle ne peut s’empêcher de dire, consciente de retourner le couteau dans la plaie.

Finalement, la journée prend une toute autre tournure quand, enfin, l’agent immobilier leur propose un appartement digne de ce nom. Et Meghan est vraiment impressionnée. Elle pourrait tout à fait s’imaginer vivre ici, installer un canapé là, et choisir cette chambre. Elle pourrait presque s’imaginer avec le bébé dans les bras, dans la cuisine ouverte. Presque, parce qu’elle a toujours du mal à se voir dans l’avenir. Mais ici, elle sait que ça pourrait lui convenir. Un ascenseur, un quartier qui semble sympa, et surtout un appartement à son goût, pratique et déjà bien équipé. Que demander de plus ? Elle s’en veut presque de se plaindre à Eris qu’il soit trop grand pour elle. Mais c’est la vérité. Qu’est-ce qu’elle ferait de tout cet espace ? Surtout que le nombre de mètres carré va avec le prix, plus élevé que ce qu’elle avait prévu. Aussi beau soit-il, ce n’est sans doute pas une très bonne idée. Même si aucun autre appartement vu aujourd’hui ne lui convient. Mais si celui-ci existe, il doit bien y en avoir d’autres ailleurs. Du moins, c’est ce qu’elle essaye de se dire en expliquant à Eris pourquoi il ne lui convient pas parfaitement. « Je sais bien. Mais avoir autant d’espace non utilisé à nettoyer, ça me paraît ridicule. » Et pourtant, elle reste partagée. Ce duplex lui plait vraiment. Elle se mordille la lèvre, tournant encore la tête, espérant peut-être trouver un défaut qu’elle aurait manqué. Eris a raison, il faudrait être plus nombreux pour vivre ici. Elle et sa fille, ça serait beaucoup trop grand. Seulement, l’objectif est justement de ne plus vivre en colocation. L’expérience ne l’a pas convaincue. Et à son âge, ça paraît ridicule de vivre avec autant de monde. « Je vais déjà être en colocation avec une petite fille qui risque d’être bruyante. Je ne peux pas imposer ça à d’autres personnes. » Et même elle, elle ne s’imaginerait plus vivre dans la maison actuelle, encore moins avec un jeune bébé. Inenvisageable. « C’est vraiment, vraiment, dommage… » Elle se répète mais elle n’arrive pas à faire une croix complète sur cet appartement. Elle a l’impression que c’est tout ce qu’elle a toujours voulu finalement.

Sourire stocké aux lèvres pendant toute la visite de ce duplex, Eris est plus que convaincue. Hélas, ce n’est pas elle qui achète aujourd’hui et bien que Meghan semble apprécier le logement, ça ne parait pas être une raison suffisante pour elle afin de proposer une offre. La brunette trouve ça forcément dommage mais elle comprend aussi les arguments de sa meilleure amie et elle doit bien admettre que celle-ci n’a pas tort. Ce duplex a beau être magnifique, il n’est pas adapté à une mère célibataire. Trois chambres chacune équipées d’une salle de bain, rien que ça, ça fait beaucoup. Pourtant, Eris le sait : elle serait capable de faire une offre. Ça ne serait certes pas raisonnable mais elle en serait capable. Cependant, encore une fois, si elles sont là aujourd’hui, c’est pour Meghan. C’est elle qui cherche en urgence à déménager de cette maison de fous. Je sais bien. Mais avoir autant d’espace non utilisé à nettoyer, ça me paraît ridicule. La brunette affiche une mine triste, abattue. Meghan semble avoir pris sa décision et une nouvelle fois, c’est un non. Les raisons du rejet ne sont pas les mêmes que pour les précédents appartements visités mais le résultat est le même. Elle s’autorise tout de même une remarque sur le ton de la plaisanterie sachant très bien que bientôt la colocation sera derrière Meghan et non pas, devant. Je vais déjà être en colocation avec une petite fille qui risque d’être bruyante. Je ne peux pas imposer ça à d’autres personnes. La blonde marque un point et encore une fois, Eris ne peut que l’admettre. C’est vrai qu’elle connait peu de personnes qui seraient prêtes à habiter avec un nourrisson qui n’est pas le leur ce qui est tout de même assez compréhensible. C’est vraiment, vraiment, dommage… La brunette a l’impression que malgré ses dires, Meghan ne semble pas vouloir tout à fait renoncer à ce duplex. Ses mots et son attitude sont en totale contradiction. T’as envie, hein ? Avoue. C’est mal ce qu’elle fait. Elle est censée être la voix de la raison aujourd’hui, la bonne conseillère qui pense avant tout au bien de Meghan mais c’est plus fort qu’elle, elle adore ce logement. Soudain, l’idée lui vient à l’esprit sans même qu’elle s’y attende. C’est fou, irréfléchi et avant même qu’elle ne réalise, les mots ont déjà franchi ses lèvres. Tu sais, moi ça ne m’embêterait pas de vivre avec ta petite fille. Je l’aime déjà après tout… Bien Eris, prends-la par les sentiments surtout. Réalisant ce qu’elle est en train de faire, elle se rattrape vite. Non, c’est moche ce que je fais là ! T’as raison, c’est beaucoup trop grand, il te faut autre chose. Je délire là. Elle est folle. Elle le prouve encore aujourd’hui.

Après de nombreuses visites décevantes, c’est très frustrant d’en arriver là. De devoir dire non à un appartement, encore, mais pas pour les mêmes raisons. Ici, elle pourrait s’imaginer. Voir où irait un canapé, où serait sa chambre. Elle se voit derrière le comptoir de la cuisine aménagée. Mais dans tout cet espace, il reste forcément des endroits dont elle ne saurait que faire. Après tout, elle serait seule avec sa fille. Même si celle-ci va grandir, elles n’auront pas besoin d’autant de place. Et le budget qui va avec ces mètres carrés en plus est au-dessus du sien. Des arguments qui font forcément pencher la balance vers le non, alors même qu’elle est séduite par le duplex. Eris le sent, bien entendu, et elle ne l’aide pas vraiment dans sa décision. Au contraire, elle a plutôt tendance à la tenter davantage. Elle secoue la tête, dépitée. Déçue que cet après-midi entière de visites n’ait servi à rien. Et dire qu’il va falloir remettre ça. Elle soupire, avant de retirer sa veste. Plus à l’aise ainsi, elle regarde à nouveau l’appartement, quand elle est interrompue dans ses pensées par une idée d’Eris. A-t-elle bien compris ce qu’elle sous-entend ? Son amie se reprend, prétendant un délire passager, mais maintenant qu’elle en a parlé, Meghan se pose réellement la question. « Tu parlais sérieusement ? Tu pourrais l’envisager ? » Elle fronce les sourcils. Visiblement, le duplex plait aussi à Eris, mais ce n’était pas ce qu’elles avaient prévu. En fait, Meghan ne sait pas trop que son amie avait prévu pour la suite. Avec cette idée, elle voit une possibilité de couper la poire en deux - et l'appartement aussi - de satisfaire tout le monde finalement. « C’est vrai qu’on serait toutes les deux mieux qu’à la maison là-bas… » Et de loin. Pas au niveau du logement en tant que tel, mais plutôt de l’ambiance qui fait très garçonnière la plupart du temps. Hors de question pour Meghan d’élever sa fille dans cet environnement. Et elle doute qu’Eris veuille y rester encore longtemps. « Mais je ne pourrais pas t’imposer ça, c’est complètement fou. » Elle essaye d’être raisonnable même si, dans un coin de sa tête, elle se dit que ça ne serait peut-être pas si fou que ça.