i need you here with me / warner

Elle a attendu le soir toute la journée. Elle savait qu’elle allait voir Warner alors forcément, ça l’a aidé à survivre au travail. Elle a été de meilleure humeur encore que d’habitude, pourtant il en faut pour qu’elle soit encore plus enjouée. Mêmes les clients particulièrement chiants dont elle a dû s’occuper vers la fin de son service n’ont pas réussi à lui gâcher son enthousiasme. Savoir qu’elle va voir Warner, ça a vraiment le don de tout embellir. Elle a beau s’être dit qu’elle ne devait pas trop s’emballer, elle ne peut pas s’en empêcher. C’est l’effet qu’il a sur elle. Seulement, il a fallu qu’elle reçoive un message de sa part lui disant justement qu’ils ne peuvent pas se voir en fin de compte. Il est malade apparement, et sans trop entrer dans les détails, il lui explique qu’il vaut mieux qu’ils ne se voient pas pour ne pas qu’elle attrape ce qu’il a attrapé. Sauf qu’apparement, ça a l’air assez sérieux pour qu’il n’ait pas envie de la voir. Bien sûr, il n’en faut pas plus pour qu’elle s’inquiète et décide de ne pas l’écouter. Ce soir, elle va jouer le rôle d’un infirmière attentionnée et bienveillante. Sans aucune arrière-pensée bien sûr… A peine arrivée chez elle, elle prend une douche rapide, se change, et file au supermarché pour acheter de la soupe, des chocolats, un ours en peluche. Ca fait beaucoup, mais elle veut lui montrer qu’elle pense à lui. Elle ne met pas bien longtemps à arriver chez lui, il est à peine dix-huit heures en fait quand elle frappe à la porte. Elle a à peine le temps d’attendre qu’elle croise Kara en train de partir, qui la laisse entrer. Ca l’arrange pour le coup, elle sait que Warner ne l’aurait probablement pas laissé entrer. « T’es mort ? » S’écrie-t-elle alors qu’elle pose son manteau et ses sacs au salon. Sans attendre de réponse, elle commence à avancer dans l’appartement jusqu’à se retrouver face à la porte de sa chambre, où elle entre sans s’annoncer. En le voyant, elle a un petit sourire triste. « Tu mentais pas hein, t’as vraiment l’air malade. » Elle l’observe un instant, puis s’assied au bord du lit avant de poser sa main sur son front. « Et t'as bel et bien de la fièvre. » Qu’elle annonce comme s’ils n’étaient pas déjà au courant tous les deux. « Désolée d’être passée à l’improviste mais je tenais absolument à être là au moment où tu donneras ton dernier souffle. »

Elle est vraiment trop gentille. L’autre jour, elle lui prépare un pique-nique surprise et vient le sauver d’une journée de boulot désastreuse. Ce soir, elle lui a acheté de quoi lui remonter le moral, à défaut de pouvoir améliorer sa santé, et compte bien passer la soirée à ses côtés alors qu’il est en train d’agoniser. Une vraie petite femme, en fait. Elle s’étonne elle-même de s’investir autant dans cette non-relation non-officiellement-exclusive. Au fond, elle sait très bien que c’est ce dont elle a envie, être avec lui exclusivement. Mais elle ne veut pas lui faire peur en prononçant ces mots. Il a beau dire qu’il ne lui en veut plus, il a peut-être encore besoin d’un peu de temps pour se faire à une telle idée. Elle n’est pas pressée de toute façon, tant qu’il la laisse faire ce genre de choses, ça lui convient. Quoi qu’il en soit, ils n’auront pas le temps de parler de ça ce soir. Si vraiment, Warner est aussi malade qu’il le dit, il ne sera pas en état pour avoir une conversation sérieuse. Ou une conversation tout court, d’ailleurs. Mais elle est prête à prendre le risque d’attraper peu importe ce qui le rend malade juste pour passer un peu de temps avec lui. Elle peut constater en arrivant dans sa chambre qu’il est effectivement plutôt mal en point. Elle n’en a jamais douté, mais bon, elle peut au moins le constater. « Parce que t’avais pas envie de me voir et que tu savais pas comment me le dire ? » Elle plaisante bien sûr, il a toujours été trop honnête avec elle pour mentir sur ce genre de choses. Ce qu’elle constate aussi, c’est qu’il ne fait pas un malade très agréable. Elle avait oublié à quel point justement. Elle n’en est pas arrivée à regretter d’être venue, mais il lui donne envie de lever les yeux au ciel plus d’une fois. « Tu pourrais au moins faire semble d'être content de me voir. » réplique-t-elle en l’entendant lui répéter qu’elle n’aurait pas dû venir. « Je pensais te faire plaisir, je t’ai amené de la soupe, du chocolat, et même un ours en peluche. La prochaine fois je m’abstiendrais. » Qu’elle ajoute avec un sourire, montrant qu’elle n’en pense pas un mot. Rien ne peut entacher sa bonne humeur, même si bien sûr elle n’aime pas voir Warner dans cet état. « Tu regardais quoi ? Je peux venir ? » Elle lui demande en désignant la place vide à côté de lui dans le lit. Elle n’a pas peur d’être contaminée. Au pire, ils pourront agoniser ensemble comme ça.

Elle va sans doute finir par le regretter mais elle a décidé de quand même prendre le risque. Si Warner est contagieux, ils pourront toujours agoniser tous les deux. C’est une bonne manière de lui prouver qu’elle est déterminée à rester cette fois et qu’elle ne va pas le laisser tomber comme ça. Bien sûr, il aurait sans doute préféré qu’elle ne vienne pas et le laisse mourir en paix, mais une fois qu’elle a une idée en tête… Puis elle n’avait rien de mieux à faire ce soir de toute façon, alors une petite grippe, c’est divertissant au moins. Ce qui la rassure, c’est qu’il est quand même content de la voir. Il lui aurait dit franchement s’il n’avait pas apprécié sa présence, il a toujours été très honnête avec elle, alors là qu’il est malade, elle a encore plus tendance à le croire. En même temps, vu toutes les attentions qu’elle lui a préparé, c’est mieux pour lui qu’il soit content de la voir. Elle aurait été vraiment dégoutée d’avoir fait tout ça pour rien et de devoir rentrer chez elle. « Bien sûr, pourquoi tu as l’air si étonné ? » Elle pourrait être vexée, mais elle a décidé de ne pas lui tenir rigueur de quoi que ce soit. Elle s’absente quelques secondes le temps d’aller chercher l’énorme ours en peluche qu’elle a dû trimballer dans le métro. Il a un gros noeud rouge par lequel elle le traine, et peine un peu à le mettre dans le lit pour qu’il tienne compagnie à Warner. « Il s’appelle Hector. » Pas elle qui lui a donné ce nom, même si elle le trouve assez approprié, étrangement. « Et il m’a fait penser à toi alors je l’ai pris. » Sans trop réfléchir, elle doit bien l’avouer. Elle ne réfléchit pas non plus lorsqu’il lui fait savoir qu’elle peut la rejoindre dans le lit, tomber malade ne lui fait peur. Elle enlève ses chaussures, puis se glisse sur la couverture à côté de lui. Elle s’allonge sur le côté, cale ses mains sous sa joue, tournée vers lui. « Très bonne, jusqu’à ce que tu me dises qu’on pouvait pas se voir en fin de compte. Mais j’ai quand même décidé de venir et ma bonne humeur a très vite réapparue. » Elle ne lui retourne pas la question, pour des raisons évidentes. « J’avais beaucoup trop envie de te voir tu sais. » avoue-t-elle d’une voix un peu plus basse. « C’est pas bien parce que je vais peut-être mourir du coup, mais au moins je serais morte avec toi. » Elle exagère à peine, mais c’est pour qu’il comprenne bien l’effet qu’il a sur elle.

Elle en est fière de son ours en peluche, et pas seulement parce qu’elle a galéré à l’amener jusqu’ici. Elle n’a pas pu résister à le prendre avec elle quand elle l’a vu, il lui a tout de suite fait penser à Warner. Puis quand elle était petite, serrer une grosse peluche dans ses bras l’aidait toujours à se sentir mieux. Ca lui évitera de trop l’approcher si jamais il est vraiment malade, pas qu’elle n’a pas envie qu’il la prenne dans ses bras s’il en ressent l’envie, mais elle préfère être apte à s’occuper de lui plutôt que d’agoniser à ses côtés, contrairement à ce qu’elle veut bien dire et laisser penser. « C’est une petite fille dans le métro qui l’a baptisé. T’aimes pas ? » C’est en tout cas ce qu’elle comprend, mais il n’a plus le droit de changer maintenant, c’est la loi. Puis il ne peut pas prendre le risque d’offenser une petite fille aussi mignonne. Quant à pourquoi il lui a fait penser à Warner, c’est tout naturellement qu’elle trouve la réponse. « Parce que j’ai tout de suite eu envie de me blottir contre lui quand je l’ai vu. » répond-elle comme si ça tombait sous le sens. C’est en tout cas une logique imparable pour elle, et elle se trouve même un peu niaise à dire ça. Heureusement qu’il est trop malade pour s’en rendre compte, ou en tout cas lui faire une quelconque remarque là-dessus. Bien qu’avec Warner, tout est possible. Elle se glisse sous la couverture à côté de lui, avec son autorisation bien sûr. Elle en mourrait d’envie, le fait qu’elle soit venue jusqu’ici le montre bien de toute façon. Elle n’ose pas le toucher ou se mettre trop près, même si elle en meurt d’envie. « On peut mettre un film si tu veux, mais si t’as pas le courage, tu peux dormir, ça me va aussi. » Elle est plutôt fatiguée aussi pour le coup, ce ne serait pas la première fois qu’ils dorment ensemble, dans le même lit. Et il y a peu de chances que ça dérape ce soir au moins. « Si t’as faim je peux aussi aller te réchauffer ta soupe. En fait dis-moi ce que tu veux et je le ferais. T’as tous les droits ce soir. » Ca peut paraitre tendancieux comme proposition, surtout dans certaines oreilles. Mais il n’y a rien de plus prévenant et innocent que ce qu’elle lui propose là.

Elle est capable d’être un peu mignonne parfois, un peu fleur bleue. En temps normal, elle n’est pas du genre à juger les gens qui le sont, même si trop de niaiserie lui donne envie de vomir. Mais avec Warner, elle ne peut pas s’en empêcher. Elle a tellement envie de se blottir contre lui, mais elle sait qu’il ne vaut mieux pas. C’est un peu pour ça qu’elle a acheté cet énorme ours en peluche. Elle s’installe tout de même à ses côtés, mais garde une certaine distance. Elle sait très bien que dans quelques instants, elle ne pourra pas s’empêcher d’aller caler son corps contre le sien. « Tu m’en voudrais si je m’approchais un peu malgré tout ? » Elle ne veut pas le déranger trop non plus, elle ne sait pas où il a mal. Elle sait que parfois, les gens malades ont mal partout et qu’ils veulent surtout rester seuls. Bon, Warner n’a pas l’air embêté de la voir, bien au contraire, et ça la rassure. Mais s’il veut dormir, ou manger ou peu importe, il peut le faire. Elle ne bougera pas tant qu’il ne se sentira pas mieux, elle est déterminée. « C’est bizarre, ta bouche dit quelque chose mais tes yeux disent le contraire. » Et son état en général en fait. Il n’a pas l’air bien, elle voit bien qu’il meurt de fatigue. Elle s’en veut un peu pour la peine, quelque chose lui dit que si elle n’avait pas été là, il aurait pu se reposer sans problème. « Non, je bouge pas. » Elle se rapproche alors doucement, jusqu’à pouvoir sentir sa chaleur. Elle n’en a pas besoin, mais elle pose quand même une main sur son front, avant de la faire glisser sur le côté de sa tête, replaçant au passage une mèche de cheveux humide derrière son oreille. « T’es vraiment chaud. T’as pris ta température récemment ? » Lui demande-t-elle inquiète. De la fièvre, ce n’est jamais bon. Mais il est quand même cohérent, et surtout capable de se plaindre, ce qui l’empêche de s’inquiéter totalement. Elle secoue la tête d’un air amusé. « Je veux bien que tu sois malade mais c’est pas une raison pour faire le bébé. Il faut le mériter, tout ça. » Bon, il ne faut pas qu’elle se montre trop dure avec lui ce soir, mais il faut qu’il sache quand même que tout ne lui est pas dû comme ça. Plus sérieuse face à sa dernière question, elle ne le quitte pas des yeux. « C’était peut-être pas une bonne idée, mais j’avais besoin de te voir. De m’assurer que ça allait aller. » C’est comme ça maintenant, entre eux. En tout cas pour elle.