your body on top of mine. (thea)

C’est encore une soirée banale au Bilboquet. Les clients les plus riches et exigeants de New-York se sont donnés rendez-vous dans ce célèbre restaurant français de la grosse pomme. Swan les regarde passer, un sourire poli mais surtout hypocrite sur le visage alors qu’au final, pour la majorité des gens, il fait partie de ce monde. Des conneries tout ça. Jamais il ne souhaiterait être associé à ces bourgeois. Enfin, seulement pour son affaire. Il ne peut pas piffrer ce monde d’hypocrisie et de faux semblants mais il fait avec les soirs où il est de service pour une seule et bonne raison – du moins, elle l’est pour lui, pas sûr que beaucoup en pensent autant – : il se fait bien plus d’argent que ce qu’il y a écrit sur son contrat. Encore une fois, Swan a les poches plein d’argent. Il frôle le génie d’avoir trouvé cette combine pour refourguer sa came. Voiturier, c’est la planque parfaite. Le client dépose l’argent dans la boite à gants où l’ukrainien laisse la marchandise. Simple, rapide, efficace. Puis, personne ne se demande d’où lui vient tout ce liquide, lui le gosse de riche. Au moins, ça lui sert à quelque chose.

L’heure de la fermeture approche, le restaurant se vide doucement mais sûrement. Beaucoup de voitures ont quitté le parking privé du lieu. A nouveau, un couple souhaite quitter l’endroit. Swan sait parfaitement de qui il s’agit : l’un de ses clients est venu accompagné ce soir. Une belle brune. Un canon même. Swan l’a repéré dès son arrivé sur les lieux et il a aussi remarqué qu’elle s’est grandement ennuyée toute la soirée. La table se trouvant proche de l’entrée, il n’a pas pu s’empêcher de les observer discrètement, du coin de l’œil. Enfin, surtout elle. L’homme fait un arrêt par les toilettes, de quoi laisser Swan laisse un court instant avec l’inconnue mais rien ne l’arrête Swan. Alors, il l’aborde, lui qui n’est censé être là que pour garer et restituer les voitures. J’espère que la nourriture vous a plu. La compagnie n’avait pas l’air d’être alléchante. Il a ce sourire sur les lèvres, Swan, celui qu’il a quand il est amusé et qu’il ne tente même pas de s’en cacher. Un sourire agaçant pour beaucoup mais qu’importe. Ça se saurait s’il se souciait de ce que les autres pensent de lui.

@Thea Vryzakis

Swan se demande comment une fille comme elle peut en arriver à s’ennuyer ainsi un vendredi soir. Elle est terriblement attirante, la brunette. Ce n’est pas les prétendants qui doivent manquer. En tout cas, le voiturier aurait bien du mal à croire le contraire. Croisée dans un bar, l’étudiant n’aurait pas hésité une seule seconde à lancer la discussion. La preuve, ce soir alors qu’il est pourtant sur son lieu de travail, il ne peut résister à l’envie de l’aborder. Il s’en moque complètement qu’elle soit accompagnée d’un autre homme, un de ses clients par-dessus le marché et que cela soit mal vu. Lui, ce qu’il voit c’est son propre intérêt, rien d’autre. Elle soupire, l’inconnue. Un instant, l’ukrainien se demande si c’est bon signe, peut-être est-ce son intervention qui finit d’exaspérer la jeune femme. Finalement, ça n’a pas l’air d’être le cas. C’est une soirée que je compte bien oublier. Sauf si Swan la rend soudainement meilleure. Confiant, le gamin s’en croit capable. D’ailleurs, il s’en lance le défi. Il va tout faire pour que cette soirée se termine en beauté, pour elle comme pour lui. Mais j’imagine que la vôtre n’a pas été plus intéressante, si vous avez eu le temps de remarquer que je ne passais pas une bonne soirée. Impassible, Swan ne répond rien. Il s’en moque que cela puisse paraître déplacé ou étrange le fait qu’il l’ait observé durant son dîner. Il se moque de beaucoup de choses, c’est dans sa nature. Le regard de l’inconnue dévie vers l’intérieur du restaurant. Swan sent qu’elle n’a pas envie de revoir son cavalier d’un soir, que si elle pouvait, elle prendrait ses jambes à son cou aussitôt. Le problème, c’est qu’elle est venue avec lui alors Swan se doute bien qu’elle devra faire le chemin retour dans sa voiture sauf si il enfile sa cape de sauveur. Je peux vous aider à vous en débarrasser, si vous voulez. Ce ne serait pas la première fois. Il ment, Swan, avec un air si détaché qu’il ne doute pas une seconde d’être convaincant. Jamais quelque chose de la sorte ne s’est produit pour la simple et bonne raison qu’il ne pense qu’à lui. Bien évidemment qu’il en a déjà vu des femmes s’ennuyer à cause de leur mauvaise compagnie mais jamais il n’a eu envie de s’interposer, jusqu’à ce soir. Il vous suffit de vous planquer au coin de la rue, là, et moi je lui dis que vous êtes partie. Simple et efficace. Le gamin hoche les épaules ce qui lui donne cet air nonchalant qui lui colle à la peau. Il lui offre une porte de sortie et silencieusement, il espère qu’elle la prenne.

L’opération est lancée. Swan vient de proposer son aide à l’inconnue. Rien ne lui dit que cela fonctionnera mais il a une devise le gamin : « toujours essayer ». Il n’est pas effrayé par l’échec ou le refus. Si elle lui dit non, il passera à autre chose. Des femmes, il y en a d’autres même si celle-ci semble valoir le détour. Elle est plus âgée que lui, il en mettrait sa main à couper mais encore une fois, ce n’est pas ce qui lui fait peur. Il a confiance en lui, l’étudiant. Elle sourit, un mince sourire que Swan parvient tout de même à distinguer malgré la nuit tombée. Premièrement, qu’est ce qui me dit que je peux vous faire confiance, et deuxièmement, qu’est ce que vous avez à y gagner ? C’est au tour du jeune homme de sourire, un sourire bref mais amusé. Il aime les femmes de caractère et celle-ci semble en avoir. Rien, qu’il se contente de répondre en plongeant ses iris dans celles de la cliente. A elle de comprendre à quelle question il répond. Lui le sait. Sans un mot de plus, elle semble suivre son plan. Swan la suit du regard jusqu’à ce qu’elle soit hors de portée de vue. La première étape est passée, à lui de gérer le reste. Justement, le client dont elle veut se débarrasser sort à son tour du restaurant. Un coup d’œil à droite puis à gauche, il fronce les sourcils devant l’absence de la belle brunette. Swan s’avance vers lui. J’ai bien peur qu’elle ne soit partie. Je l’ai vu prendre un taxi. Menteur né, le Swan. A nouveau, on le croit sur parole. Visiblement gêné, le client demande à récupérer sa voiture. Bien évidemment. Hypocrisie quand tu nous tiens. Qu’est-ce qu’il peut être bon à prétendre les choses, Swan. Comme si il avait ne serait-ce qu’un minimum de respect pour ce pauvre gars.
Une poignée de minutes plus tard, Swan revient au volant du beau cabriolet et le client part sans demander son reste. Le gamin rejoint l’inconnue au coin de la rue. Il est parti, qu’il annonce calmement. Heureusement qu’il n’est pas du genre à poser des questions autrement il ne pourrait résister à la curiosité de savoir comment elle a pu finir dans un rendez-vous aussi raté que celui-ci.

Jusqu’ici, tout se déroule à merveille. Swan a lancé la conversation, ciblant parfaitement l’envie de la jeune femme d’en finir au plus vite avec son rendez-vous et justement, il vient à l’instant de le voir décamper au volant de sa splendide voiture. Le premier obstacle – qui n’en était pas vraiment un – est dépassé : la voilà seule. La conversation est toujours plus facile à faire avec une personne isolée.
Mon héros. Il n’irait pas jusque-là Swan mais il ne proteste pas. Au fond, il commence à se dire que tout ça est peut-être trop facile. L’inconnue aurait très bien pu se sortir de cette galère toute seule, sans son aide. Ça ne serait pas la première personne à se faire la malle lors d’un rendez-vous ou même à annoncer clairement à la fin d’un repas, préférer rentrer de son côté. Alors, il se met à réfléchir Swan et se dit que finalement, peut-être qu’il n’est pas le seul intéressé dans cette affaire. Peut-être qu’elle aussi voit son intérêt. Après tout, c’est plutôt rare de trouver un meilleur plan à la fin d’un diner désastreux mais il ne s’emballe pas, Swan. Ce n’est pas du tout cuit. Et maintenant ? A croire qu’elle a compris qu’il cherche à obtenir quelque chose lui aussi. Il la veut, elle. Pas du genre à se démonter, il répond sans sourciller. Je finis dans quelques minutes, je peux te ramener chez toi si tu veux. Comme ça, avec un naturel non feint, il passe du vouvoiement au tutoiement. Les jeunes de nos jours tutoient 95% des gens qu’ils connaissent. Swan n’aimerait pas que la belle brunette se retrouve à faire partie des 5% restants. Bien souvent, ce sont ceux qu’on ne connait pas et Swan, il a très envie de faire connaissance avec cette belle brune.

Il a conscience que tout se joue maintenant. Se débarrasser de son client n’était que la partie facile. A présent, ça se corse. Si Swan veut avoir toutes ses chances avec la belle inconnue, il doit la convaincre maintenant. Il sait qu’il a attiré son attention. Il l’intrigue, tout comme elle l’intrigue et c’est un bon début mais ça ne fait pas tout. Les prochaines minutes sont cruciales et pourtant, il décide de tenter le tout pour le tout : il propose de la raccompagner chez elle. Soyons honnête, il n’espère pas s’arrêter en bas de l’immeuble. Il veut monter, passer la nuit avec elle ou au moins une partie. Si cet idiot n’a pas su saisir sa chance, lui compte bien ne pas faire la même erreur. Ok, on en est déjà au tutoiement, ça me va. Pour avoir ton prénom, je dois faire quoi du coup ? Il pourrait saisir la perche tendue, demander quelque chose en échange mais pour le coup, il n’a pas vraiment envie d’en arriver là. Le chantage comme technique de drague, c’est mauvais. Ça craint, Swan aime penser qu’il peut mieux faire. Demander, et je suppose que tu viens de le faire. La présence de la brune ne lui fait tout de même pas oublier qu’il a encore quelques minutes de travail à faire alors lentement, il reprend la direction de l’entrée du restaurant, son interlocutrice à ses côtés. Swan. Et le tien ? Les derniers clients du restaurant sortent et c’est son collègue qui s’en charge, de quoi lui permettre de continuer la discussion. Et j’ai pas envie de rentrer chez moi maintenant. Il est encore tôt. L’étudiant a un léger sourire sur les lèvres. En effet, ça semblait beaucoup trop facile jusque-là. Voilà qu’elle montre un peu de difficulté ce qui n’est pas fait pour déplaire au garçon. On roule et on voit ce qu’on trouve ? Il aime conduire la nuit, Swan et surtout, il aime ne pas savoir. L’incertitude a quelque chose de grisant. En silence, il espère que ce soit également son cas. La proposition en ferait rire plus d’une mais si celle-ci accepte de l’accompagner, elle ne lui plaira que plus.