the last man standing (matthew)

Doucement, le taxi ralentit jusqu'à effectuer un arrêt complet le long du trottoir. Dehors, quelques fêtards sont déjà en train de griller leur première - ou leur dixième - cigarette de la soirée. Encore à l'intérieur, Yara fouille dans son petit sac pour en sortir quelques billets avec lesquels elle paie sa course. « Je vous attends ? » demande le chauffeur en prenant les dollars que la jeune femme lui tend. Un sourire germe au coin des lèvres de Yara tandis qu'elle hoche la tête. « Non, c'est pas la peine. Merci ! » Sur ces mots, elle ouvre la portière et quitte le taxi. Devant le bar, elle reconnait une vague connaissance à qui elle adresse un signe de main avant de pénétrer à l'intérieur du bâtiment.

Des airs de rock se font entendre dès l'entrée et cela la fait sourire. Venir ici est toujours une bonne idée. Elle ne vit pas au sein de Williamsburg depuis longtemps mais elle y a vite pris ses marques. Surtout en ce qui concerne les établissements dans lesquels il est possible de faire la fête jusqu'au bout de la nuit. Et ça, elle le doit aussi bien à ses amis qu'à Matthew, qu'elle a rencontré au cours d'une soirée comme celle-ci. Celui qui n'était qu'un inconnu est finalement devenu un ami lorsqu'ils ont réalisé que, dans les fêtes, les seuls encore debout à quatre heures du matin, verre à la main et énergie au maximum, ce sont eux. Depuis, Yara ne compte plus le nombre de soirées qu'elle a partagé avec le musicien et les membres de son groupe. Parfois, la blonde les rejoint seule. Parfois, elle vient avec un groupe d'amis. Ce soir-là, c'est néanmoins avec elle-même comme seule compagnie qu'elle avance peu à peu dans la salle, à la recherche du petit groupe.

Quelques secondes sont nécessaires mais elle finit par les repérer, tous installés près du jeu de fléchettes. Quelques consommations sont déjà sur la table, côtoyant serviettes en papier et téléphones, mais aucun verre n'est vide. Cela ne fait visiblement pas longtemps qu'ils sont dans les parages, eux aussi. Tant mieux. Au moins, elle n'a rien loupé. Du moins, sans doute rien d'intéressant. Avec entrain, Yara traverse la distance qui les sépare et s'approche de la table. « Je vois qu'on ne m'a pas attendu... Bravo, les gars ! », s'exclame-t-elle avec un air mi-offusqué, mi-ironique. Ce n'est pourtant qu'une taquinerie et la lueur maligne de ses yeux trahit son amusement. Elle continue néanmoins son petit jeu et pose sa main sur l'épaule de Matthew lorsqu'elle se penche... pour lui piquer le verre posé devant lui. « Je te prends juste une gorgée ! » assure-t-elle en se redressant. Pourtant, elle le garde dans sa main jusqu'à ce qu'elle tire un tabouret non loin de là et qu'elle se fasse une place parmi le petit groupe. Elle tient néanmoins promesse : à peine assise, elle avale une première gorgée de la boisson de son ami avant de pousser le verre en sa direction, consciente que le priver de sa consommation n'est pas vraiment la meilleure des idées. L'instant suivant, elle se débarrasse de sa veste, prête à aller chercher son propre verre auprès du barman, à quelques pas de là.

Elle est comme ça, Yara. Elle va, elle vient, elle sourit, elle rigole. Elle ne se soucie de rien ou presque, tant qu'elle se sent heureuse et bien dans sa peau. Alors, lorsqu'elle débarque au milieu du groupe et qu'elle touche l'épaule de Matthew, elle ne remarque pas les réactions de Liz. Elle l'aime plutôt bien, pourtant, Liz. Matthew est probablement le membre du groupe avec qui Yara a le plus discuté depuis leur rencontre mais elle apprécie également les trois autres, qu'elle salue avec le même entrain, loin de se douter que son comportement ne met pas tout le monde à l'aise. On ne peut pourtant pas totalement la blâmer : elle ne connait pas toute la vie de ses nouveaux amis et elle ne s'est jamais posée la moindre question sur le lien qui unit Matthew à la chanteuse de son groupe. « La belle excuse ! », réplique-t-elle avec un air narquois quand le brun justifie la présence de leurs consommations comme étant un cadeau de la maison.

Les verres gratuits sont probablement l'un des avantages qu'a le groupe, tout comme le fait de connaître suffisamment le barman pour se permettre de l'appeler et d'être servi sans bouger. Yara ne s'en plaint pas. Elle en est même plutôt heureuse. Elle n'est pourtant pas feignante et aurait pu aisément se lever et aller jusqu'au comptoir mais pourquoi ne pas en profiter, après tout ? « Ah les avantages d'être avec des rock star ! », plaisante-t-elle alors qu'elle regarde le jeune homme se diriger vers leur table. Des rock star dont elle ignorait tout lors de leur rencontre, en réalité. En effet, si les amis de Yara avaient reconnu Liz puis les membres du groupe relativement facilement, la jeune femme, elle, ignorait tout de leur notoriété naissante. Aujourd'hui, The French sonne comme un nom familier aux oreilles de la blonde mais elle ne s'en préoccupe pas pour autant, trop je m'en foutiste pour se vanter de ses fréquentations. « Je vais vous prendre un mojito, s'il vous plait. », reprend-elle lorsque le barman parvient à sa hauteur. Elle lui adresse un sourire et le remercie alors qu'il tourne déjà les talons pour s'atteler à la préparation du cocktail.

Laissant sa commande entre les bonnes mains du professionnel, la jeune femme prend appui contre le fond de son fauteuil et observe les alentours avant de reporter son attention sur Matthew qui reprend le fil de la conversation lorsqu'il se saisit de son verre, fraîchement abandonné par Yara la voleuse. « Y en a un qui est pris par le boulot, une autre par la famille et les deux autres sont en dehors de la ville. », répondit-elle. Elle avait pourtant essayé de négocier et avait sorti toute une liste d'arguments. Elle avait même promis de payer sa tournée plusieurs fois dans la soirée. Mais la blonde s'est heurtée à des refus et a finalement rendu les armes. « Tant pis, ils le regretteront ! », assure-t-elle. Elle n'a en tout cas pas perdu son entrain, elle qui continue à sourire et à parler gaiement. Un sourire qui se fait d'ailleurs un peu plus grand quand le barman refait surface dans son champ de vision, le verre qui lui est destiné à la main. Elle ne tarde donc pas à s'en saisir, en soufflant un remerciement, avant de se tourner vers ses compagnons et de lever son verre. « A la vôtre ! », lance-t-elle bien que les autres aient déjà avalé la majorité de leur consommation.