first meeting, hi little man (MEGHONEL)

M A R S , 2 0 1 9 – Le jour fatidique est arrivé. Assis dans une salle d’attente, droit, calme comme jamais on en ne t’avais connu, tu portes une casquette. Tu ne préfères pas que l’on te reconnaisse et qu’une photo de Meghan et toi paraisse dans les journaux. C’est déjà bien assez compliqué entre vous, évitons d’en rajouter une couche. Le cœur au ralenti, tes yeux se fixent sur des femmes bien enceintes. On ne peut passer à côté de leur grossesse tant l’évènement final approche. Tu ne te sens pas vraiment à ta place. La plupart sont venues en couple, semblent heureuses de partager ce moment. Alors que vous, vous ne savez pas vraiment quoi penser de tout ça. Vous n’êtes pas au point de vous réjouir, mais vous ne pleurez pas non plus. On vous regarde avec un grand sourire, vous prenant certainement pour un couple, des futurs parents. Elle, il n’y en a aucun doute, mais toi ? Il y a une certaine tension entre vous deux. Un silence vous surplombe. Tu appréhendes le rendez-vous. Habillé en tenue de sport, tu as accouru chercher Meghan en quittant l’entraînement plus tôt, et compte y retourner par la suite. Tu sens qu’il va falloir décompresser, que les minutes qui vont suivre vont être riches en émotions. « Dis, t’as faim ? Je vais aller me chercher quelque chose à la machine. » Tu ne peux tenir plus longtemps en place. Il faut que tes jambes, molles comme des spaghettis se mettent en action. Mais à peine levé que l’on vient appeler Madame Macleod. On est prêt à vous recevoir. Ton visage se décompose, la panique monte davantage en toi. T’essayes de reprendre le dessus, mais ton expression crie à l’aide.

Quatre fois. Déjà quatre fois qu’elle lit le début du paragraphe sans assimiler ce qu’elle lit pour autant. Elle avait pris un livre pour s’occuper dans la salle d’attente, et peut-être un peu pour éviter un silence gênant avec Leo, mais elle ne parvient pas à se concentrer sur les mots. Sa présence à côté d’elle, l’impatience liée à l’angoisse de ce rendez-vous. Pourtant, elle commence à en avoir l’habitude. Ce n’est pas non plus le premier auquel Leo est venu. Mais tout reste encore très confus, et ça lui paraît toujours étrange de ne pas être à l’aise avec lui. Quelque chose a changé, elle le sait. Elle est sans doute fautive, mais lui aussi. Auraient-ils été heureux de cette nouvelle s’ils avaient été encore ensemble ? Aurait-elle paniqué à l’idée de lui apprendre sa grossesse ? Plus que dans la réalité où ils avaient rompu ? Elle n’avait jamais senti Leo investi à cent pour cent dans leur relation, alors ajouter un bébé à l’équation l’aurait sans doute effrayée. Mais effrayée, elle l’est tout de même. Et elle s’imagine tout un tas de scénarios. Il est là pourtant, avec elle. Il est venu la chercher pour son rendez-vous et y assistera avec elle. Comme le ferait un futur papa. Il est là pour elle et ça, elle apprécie. Mais sans savoir ce qu’elle doit en penser pour autant. Surtout quand un doute persiste, encore et toujours. Au moment où Leo se lève, annonçant qu’il va au distributeur, la porte du cabinet s’ouvre et le nom de Macleod est prononcé. Elle se lève avant de poser les yeux sur Leo. Pourquoi fait-il cette tête ? Ne voulait-il pas être là ? « Si tu vas toujours à la machine, je veux bien une barre au chocolat. Tu n’auras qu’à me rejoindre à l’intérieur. » S’il a besoin d’un peu plus de temps, elle peut le lui accorder. Ainsi, ça lui laissera le temps de se préparer elle aussi. De toute façon, elle sait qu’on l’accueille juste dans le cabinet et que le médecin doit être en train de finir ailleurs. Elle regarde à nouveau Leo, avant de finalement hausser les épaules et rejoindre l’assistante qui l’a appelée.

Toi qui te disais être totalement prêt pour l’échographie, te rends rapidement compte que tu te voilais la face. T’aimerais que le Doc soit finalement en retard, que le rendez-vous soit annulé, repoussé. Mais ça reste inévitable. Vous allez devoir y faire face. Meghan doit certainement percevoir cule ce trac qui est en toi. Pas compliqué, il faut dire. Elle te propose d’aller à la machine et de te rejoindre par la suite. Même la machine n’a rien d’assez fort pour calmer tes nerfs. « Ça marche, je fais au plus vite. » L’assistante t’explique comment les rejoindre et part avec Meghan. Tu les regardes partir, et fonces à la machine. Tu gagnes un peu de répit et souffle avant de te jeter dans la gueule du loup. Comme Meghan l’avait demandé, tu lui prends une barre de chocolat, et te prends un café.
Devant la porte du cabinet du médecin, tu vois ton ex assise face à un bureau, dans l’attente d’être reçu. Tu toques pour ne pas l’effrayer, et affiche un visage plus calme. « Je t’ai pris une barre, comme tu l’as demandé. Tiens. » En franchissant le seuil de la porte, tu lui tends la barre en question, et viens prendre place à côté d’elle. Minutieusement, tu regardes la pièce. C’est la première fois que tu mets les pieds dans ce genre de cabinet. Tu n’y avais jamais pensé. En recul, tu remarques la table d’examen. Finalement, ça ressemble à ce que tu as déjà vu dans les films. Doucement, tu bois ton café, puis le pose sur le bureau. « Je t’aurai bien proposé du café, mais j’ai lu que c’était déconseillé. » Tu ne sais pas vraiment pourquoi, mais tu l’as lu et ça t’a suffi pour ne pas t’encourager à lui en prendre. Et finalement, tu viens vraiment lui prêter ton attention, lui demandant enfin comment elle va. « Ça va ? Pas trop stressée ? » Lui demandes-tu en la regardant avec un léger sourire.

Tout cela est encore très nouveau pour elle et le vivre avec Leo, elle est loin d’y être habituée. Après tout, elle n’est même pas sûre qu’ils auraient vécu ça ensemble s’ils avaient toujours été en couple. Ou même si elle serait tombée enceinte sans leur rupture. Elle ne peut être sûre de rien, et tout ça lui fait peur. Encore plus quand elle se retrouve seule à attendre dans le cabinet du médecin. Elle sait que Leo panique aussi vis-à-vis de tout ça, alors elle veut lui laisser du temps et elle fait bonne figure pour tous les deux, mais tout est terriblement étrange pour elle. Effrayant surtout. Mais il est là, il a insisté pour l’être, et c’est sans doute positif. Malgré toutes les questions qui demeurent dans l’esprit de Meghan. Elle a sorti les résultats de sa dernière prise de sang de son sac et attend maintenant qu’on la rejoigne dans le cabinet. C’est Leo qui le fait en premier, et elle sourit en acceptant la barre de chocolat qu’il lui tend. Elle n’a pas spécialement faim, ou pas plus que d’habitude, mais elle l’ouvre tout de même pour prendre une première bouchée. « Merci. » Elle sourit avant de le regarder s’assoir à côté d’elle. Elle a toujours du mal à croire qu’il veuille être avec elle pour tout ça, sans même savoir s’il s’agit de son enfant ou non. L’odeur du café envahit ses narines alors qu’il boit le sien, et elle soupire un peu. Ce qu’il entend peut-être, parce qu’il précise pourquoi il ne lui en a pas pris. « Tu as bien fait. Même si c’est un peu frustrant parfois, surtout que je fatigue rapidement. » Elle a l’habitude de boire beaucoup de café aussi, alors ça ne l’enchante pas d’avoir dû arrêter tout d’un coup. En tout cas, elle apprécie tous les efforts que fait Leo. Il est attentionné et semble tellement différent de l’homme avec qui elle a rompu il y a à peine cinq mois. « Si, un peu pour être honnête. J’espère que tout va bien là-dedans. » Elle regarde et touche son ventre, par réflexe. « Enfin j’ai hâte de connaître le sexe du bébé malgré tout. Tu aurais une préférence, toi ? » Quand elle est nerveuse, elle parle beaucoup. Et tant que le médecin ne sera pas entré dans la pièce et lui aura dit tout ce qu’elle doit savoir, elle restera nerveuse.

T’es bien heureux de ne pas pouvoir tomber enceinte, d’être un homme. Les femmes ont tellement de craintes, tu n’as rien à leur envier. Tu leur laisses avec plaisir tous ces problèmes auquel elles sont régulièrement confrontées. T’as du mal à comprendre ce qu’un pauvre café peut bien faire à un bébé. Tu penses qu’il doit seulement être plus actif lorsque la mère en boit. Mais tu ne vois pas vraiment le mal. Tu te contentes de suivre les recommandations et de ne pas chercher à comprendre le comment, du pourquoi. « Et t’as pensé à ralentir la cadence ? » Dis-tu pour la taquiner. Comme si ça faisait parti des plans de jolie blonde. Ce qui est totalement compréhensible. Elle ne vit pas avec les mêmes moyens que toi, et ne peut se permettre de ne pas travailler pendant des mois. Et toi-même, tu ne te le permettrais pas. Tu t’ennuierais bien plus qu’autre chose.
Tu réalises seulement maintenant qu’elle stresse, que cette grossesse n’est pas de tout repos. Vous n’en avez jamais véritablement parlé. Elle s’était inquiétée de ton implication, mais jamais tu ne lui avais demandé son état d’esprit. Elle semblait bien gérer la chose. Ça te suffisait. Ça te fait d’autant plus drôle lorsqu’elle vient toucher son ventre bien arrondi. Tu te demandes ce que ça peut bien faire. T’hésites à le toucher. D’un, tu ne sais comment elle interpréterait le geste et de deux, tu as trop peur de faire mal au petit bout. Et si tu étais maladroit ! « On va vite le savoir, t’en fais. Je suis certain que tout va bien. » Si le bébé est aussi robuste que sa mère, alors il n’y a aucun souci à se faire. Quand elle te demande si tu as une préférence niveau sexe du bébé, tu manques de t’étouffer avec ton café. Tu n’y avais jamais véritablement pensé. Pour toi, c’était un bébé, rien de plus ni moins. Tu n’avais pas du tout réfléchi au sexe, ne sachant déjà pas si tu es le véritable père de l’enfant. « Je n’y ai pas vraiment pensé. Tant que l’on ne nous annonce pas que c’est au veau, je peux tout accepter. » Tu réalises que tu as parlé d’un veau. Tu t’en veux d’avoir dit une connerie pareille. Dès fois, il serait préférable que tu te la fermes. T’essayes de rattraper ta bourde. « Et toi ? T’as une envie particulière ? » Le médecin fait son arrivée, et vous salue avant d’aller s’installer derrière son bureau. « Bonjour, Leonel, je suis … » T’allais dire que tu étais le père, mais tu t’es rapidement ravisé. Trop compliqué. « Enchanté. » Oui, c’est mieux comme ça.

« J’y pense de plus en plus oui. Mais je dois aussi chercher à déménager alors le timing n’est pas parfait. » Pourtant, plus le temps passe, et moins elle se voit aller jusqu’au bout à temps plein. Elle a de l’argent de côté, ça pourrait être possible, même si un peu compliqué tout de même. Elle sait qu’elle doit aussi penser à sa santé dans tout ça. Ce bébé doit être la priorité. Et elle espère sincèrement que tout va bien dans son ventre, qu’il est bien au chaud et grandit correctement. Ce rendez-vous est là pour le confirmer. Elle apprécie tout de même que Leo tente de la rassurer. Lui aussi semble un peu stressé, mais ce n’est sans doute pas pour les mêmes raisons. Ou pas seulement. Un peu pour se changer les idées, elle le questionne sur le sexe du bébé, savoir ce qu’il préférerait. Peut-être que la question est un peu déplacée parce qu’il ne sait pas si c’est le sien, mais elle a envie de savoir. Elle a envie de l’impliquer comme il le désire. Sauf qu’il n’a pas vraiment la réponse qu’elle attendait. Il parle même de veau, ce qui lui fait froncer les sourcils. « J’espère que ça ne veut pas dire que tu me vois comme une vache. Une baleine, je pourrais comprendre, mais une vache… » Elle plaisante, se doutant que Leo a simplement choisi un animal au hasard. Elle aussi sera heureuse que ça soit une fille ou un garçon, ce qu’elle n’a pas le temps de répondre à Leo parce que son docteur entre dans le cabinet. Elle s’assoit en face d’eux alors que Leo semble hésiter quant à comment se présenter. Elle fait un sourire en coin. La gynécologue connaît la situation, parce que Meghan a suffisamment insisté pour tenter d’avoir une date exacte, sans succès. « Enchanté Leonel. N’hésitez pas si vous avez des questions surtout. » La femme d’une quarantaine d’années semble vouloir le mettre à l’aise, avant de reporter son attention vers Meghan. Analyse de la dernière prise de sang, questions sur les différentes douleurs que la future maman peut ressentir, tant de sujets qui sécurisent un peu Meghan. Le jargon médical, ça la connaît. Vient enfin le moment de l’examen en tant que tel, et elle grimpe sur le siège avant de remonter son pull juste en-dessous de sa poitrine. Heureusement qu’elle a réfléchi ce matin et qu’elle n’a pas mis de robe. Elle tend la main vers Leonel, avec un sourire un peu penaud. « Tu vas bien ? » Encore une fois, c’est elle qui s’inquiète plutôt que l’inverse. C’est plus fort qu’elle.

Tu n’avais pas pensé au fait qu’elle vivait toujours chez ton meilleur-pote, Tommy. Vivre dans une si grande coloc avec un bébé, c’est loin d’être chose facile. Alors, il n’y a rien de surprenant. Ça va certainement lui demander des frais supplémentaires, en plus de ceux du bébé. T’es conscient des frais que cela engage. « N’hésite pas, si jamais tu as besoin d’aide pour le déménagement. Je m’arrangerai avec le travail. » Des bras de plus ne sont jamais du luxe, on ne lesrechigne jamais. Et avec ton Cayenne, facile d’y longer des affaires. Ce n’est pas la place qui manque. Et toi-même tu te demandes si tu dois prévoir une chambre. Et même si la maison est grande, malheureusement, il n’y a plus une chambre de libre. Et tu n’es pas certain que tes trois autres colocataires acceptent un enfant de plus. Tu ne te poses pas vraiment la question au sujet de Martin. Lui qui veut quelqu’un pour jouer à tous les jeux avec lui, il sera gaga. Il ne s’arrêtera pas pour autant de te bassiner avec son petit chien, mais c’est un autre sujet.
Tu sais que tu as mis les pieds dans le plat. Elle fronce des sourcils à l’évocation du veau. Pourtant, tu le sais, il ne faut surtout pas contrarier une femme enceinte. T’es pas bête à ce point. Tu ouvres la bouche pour essayer de rattraper le tire, quitte à couper la parole à Meghan, mais le docteur fait son entrée avant même que tu puisses dire quoi que ce soit. Ta bourde restera malheureusement dans l’esprit de ton ex. Et l’entrée de la professionnelle fait d’autant plus monter la pression. Les choses sérieuses vont commencer. Tu hoches la tête lorsqu’elle te dit de ne pas hésiter si tu as des questions. Des questions t’en as plein, trop même. Comme le pourquoi du comment sur le café. Viennent ensuite tous les bilans de santé. Un mélange de mots incompréhensible, tirés d’une langue dont tu n’as jamais eu connaissance. Là, tu en as des questions. Leucocytes … T’y comprends absolument rien. Mais personne ne semble s’alarmer, crier. C’est que tout va bien non ? Sans perdre une seconde de plus, vient le moment de l’examen. Meghan prend place sur le siège et dévoile son bidon. Les yeux grands ouverts, tu découvres pour la première fois son ventre arrondi nu. Ça te fait tout drôle, lui qui était souvent couvert par des vêtements amples. La main de blonde se tend vers toi. Tu t’empresses de la prendre entre non pas une de tes mains, mais les deux. « Euh … ouais, ouais. » Dis-tu les yeux toujours fixés sur son ventre. T’arrives pas à te dire que c’est impoli. Ils ne décollent pas de leur cible. Tu sens ton cœur qui s’emballe, et machinalement, tu déposes un baiser sur la main de Meghan. Le docteur met en place son matériel, et dépose le gel sur le ventre de la blondinette. « Prêts à faire une grande rencontre ? » Prêt ? À moitié, mais tu fais oui de la tête, fixant dorénavant le moniteur de l’échographe. Tu n’as jamais reçu une telle pression. Bien plus grande encore qu’à l’annonce d’être possiblement papa. À l’aide la sonde, le docteur dévoile le dessus du ventre. Cherchant le petit être qui se cache derrière. « Ah voilà, un petit pied. » Un petit pied ? Les yeux fixés sur l’écran, tu prends soudainement conscience qu’il y a quelqu’un qui grandit en Meghan. Tu trouves ça surprenant. Moins flippant tant c’est tout petit, et mignon. « Il semblerait que ce soit des jumeaux. » Là, la panique reprend le dessus. Et tu serres, broies la main de ton tex. « Comment ça des jumeaux ?! » Tu sens tes jambes qui sont en train de faiblir, ton corps tout entier céder. Rapidement, tu tires une chaise cachée derrière toi, et t’assois dessus. Tu ne peux pas te ridiculiser comme ça, et reprends la main de Meghan, tout en lui murmurant. « Des jumeaux ? »

« Je risque de te prendre au mot. C’est gentil de proposer en tout cas. » Elle aura bien besoin d’aide pour son déménagement même si elle n’y est pas encore. Elle doit déjà commencer les visites, mais elle espère bien que tout sera prêt pour l’arrivée du bébé. Meghan n’a peut-être pas fait les choses dans l’ordre qu’elle prévoyait, même loin de là, mais elle veut quand même que certaines choses soient logiques. Elle espère aussi que tout ira bien pour ce bébé et ce rendez-vous est là pour la rassurer. Du moins, elle l’espère. Elle n’est pas tout à fait à l’aise, plus stressée qu’elle ne devrait l’être, parce que Leo est là aussi. Rapidement, elle est un peu plus à l’aise, à travers le jargon médical. De bonnes nouvelles, car elle est en forme à priori. Maintenant, il reste à vérifier que c’est aussi le cas du bébé qui grandit dans son ventre. Installée sur la table d’examen, le ventre à l’air et la main dans celles de Leo, elle stresse à nouveau un peu. Comme lors des précédentes écographies. Peut-être même un peu plus, parce que Leo est là, parce qu’ils peuvent savoir le sexe aujourd’hui. Elle a envie de le savoir, pour pouvoir se préparer à tout ça, mais elle se dit que ça rendra aussi la chose un peu plus réelle. De toute façon, avec son ventre, elle ne peut plus vraiment l’ignorer. Elle frémit quand la médecin passe le gel sur son ventre, et scrute ensuite l’écran à la recherche de ce qu’elle montre. Le pied, elle le voit aussi, et elle sourit. C’est elle qui est en train de fabriquer ce petit être humain au creux de son ventre. Elle, et seulement elle. Peu importe qui a mis une petite graine ici, elle sait qu’elle aimera cet enfant plus que tout. « Il semblerait que ce soit des jumeaux. » Il faut peut-être deux secondes pour qu’elle cesse de regarder l’écran et qu’elle comprenne ce qu’il vient de lui être dit. Elle sent les mains de Leo serrer plus fort la sienne, et elle se redresse dans le siège, obligeant la gynécologue à bouger son appareil. Des jumeaux ? Deux ? C’est… impossible. Elle entend Leo réagir avant elle, le sent lâcher sa main et quand elle se tourne vers lui, elle voit qu’il s’est assis. Il est sous le choc aussi, mais est encore capable de parler. Elle, elle essaye de se faire à l’idée, sans y parvenir. Elle avait posé la question pourtant, parce qu’elle sait qu’il y a ce gêne dans sa famille. Comment peut-elle le découvrir seulement maintenant ? « Je… Mais… vous êtes sûre ? » Il ne peut pas y avoir une erreur. Si elle a vu deux têtes ou trois pieds, ça paraît normal. Mais Meghan ne l’accepte pas. Déjà, elle panique régulièrement à l’idée de devenir maman d’un seul bébé… alors deux. « Si vous voulez bien rester immobile, je peux vous montrer. » Non sans faire la moue, Meghan s’appuie dans le fond du siège et la laisse remettre l’appareil sur son ventre. Elle n’ose pas regarder et préfère se tourner vers Leo cette fois. « C’est pas possible. Dis-moi que c’est une blague. » Une très mauvaise blague si c’est le cas. Bien sûr, elle s’y adaptera. Ce n’est pas comment si elle avait le choix. Mais… deux bébés, c’est beaucoup trop.

Elle peut te prendre au mot, tu ne parles pas pour faire plaisir. Tu n’as pas pour habitude de brasser le vent, et tu ne veux plus lui donner de faux espoirs. C’est derrière vous tout ça, vous avancez maintenant. Preuve, vous êtes là tous les deux, dans l’attente de savoir si tout va bien du côté du bébé. Ou des bébés. Tu ne sais plus où tu en es. C’est complètement flou dans ta tête. Aussi perplexe par la nouvelle, Meghan peine à sortir sa phrase. Elle se relève, peu fière de la situation. Tes yeux n’arrivent pas à se décoller d’elle. T’espères qu’un regard insistant va lever cette nouvelle accablante. T’as beaucoup de mal à imaginer l’avenir avec déjà un bébé alors deux. Quel travail ça doit être ! Adieu les nuits, les petits moments de plaisir, de repos. La blonde demande confirmation. Elle non plus ne veut pas y croire. Deux petits monstres qui se battent dans son ventre arrondi. Le docteur souhaite à nouveau nous montrer les deux ombres. Les mains jointes, tu te rapproches du bord de la chaise, et tu pries pour qu’elle se soit trompée. La sonde vient à nouveau se glisser sur le ventre de Meghan. Le souffle coupé, tu regardes l’écran. Tu penses pouvoir y voir quelque chose, mais t’as déjà du mal à reconnaître un pied, alors un deuxième bébé. A nouveau on peut voir un bébé. « Voilà le premier bébé, et le deuxième, il est … » Tu ne prends même pas la peine d’admirer ce petit être. Tu veux vérifier cette appréhension. Elle cherche pendant un certain temps, et plus les secondes passent plus tu te dis que rien ne va se passer, qu’elle ne va rien trouver. L’une de tes mains vient se poser sur l’épaule de Meghan. Tu veux lui montrer que tu seras là, peu importe ce qui va se produire par la suite. Cette boule au ventre commence à disparaître. Vous ne voyez rien d’autre et revenez sans cesse sur ce premier bébé. « Y en a pas ? Y a qu’un seul bébé ? » C’est déjà assez compliqué comme ça. Le docteur prend son temps. « Il semblerait que je me sois trompée. Il n’y en qu’à. Excusez-moi, mais je vois que je vous enlève un poids. » Dit-elle en plaisantant tandis que tu retrouves un sourire radieux. Tes yeux pétillent. Non, vous n’allez pas perdre goût à la vie ! « C’est sûr ? » Elle confirme s’être trompée, et qu’il n’y a n'as pas de deuxième fœtus à l’horizon. Tu frottes l’épaule de ton ex, tout heureux de la nouvelle. Pour la première fois, tu ne penses pas au fait d’être le père ou non, tu vois le moment présent.

C’est impossible, complètement impossible. Meghan a beau savoir qu’elle n’a pas trop le choix, elle n’arrive pas à accepter cette éventualité. A ce stade de sa grossesse, ne devrait-elle pas déjà le savoir si elle était enceinte de jumeaux ? N’aurait-elle pas dû entendre deux battements de cœur à la première écographie ? Ou l’apprendre à n’importe quel moment… avant ? Déjà qu’elle n’est pas sûre d’être prête pour un enfant, elle n’imagine pas avec deux. Certes, elle n’est pas seule dans tout ça, mais au fond, rien n’est sûr. Elle ignore de quoi sera fait l’avenir alors cette nouvelle incertitude qui vient s’ajouter, ça ne la ravit pas. Enfin elle demande quand même confirmation à la gynécologue. Elle la suit depuis le début de sa grossesse, comment peut-elle voir un second bébé seulement maintenant ? La sonde à nouveau sur le ventre de Meghan, l’attention de tout le monde est fixée sur le petit écran. Elle voit bien le bébé, mais à part quelques ombres, rien d’autre. La main de Leo se pose sur l’épaule de Meghan, mais elle ne se détourne pas de l’échographie. Elle compte même le nombre de pieds, mais elle n’en voit que deux. Deux pieds, ça ne fait qu’un bébé ça. Leo semble d’accord avec elle, et tout autant rassuré de cette nouvelle. Le docteur confirme et Meghan sent un poids énorme s’évaporer, effectivement. Elle se demande comment c’est possible de se tromper ainsi. En une petite phrase, elle avait failli tout bouleverser. Cette grossesse n’était déjà pas prévue, elle n’avait pas besoin d’autres surprises. « Sûre et certaine. La sonde devait avoir un problème tout à l’heure. » L’excuse facile. Meghan fronce les sourcils mais son visage est beaucoup plus détendu. « Merci mon dieu. » Elle pousse un soupir, avant de regarder Leo. Il semble être dans le même état qu’elle. Elle a beau ne pas croire spécialement en Dieu comme ses parents, elle veut bien remercier n’importe qui à cet instant. « Je sais pas toi mais un bébé, ça me suffit. » Deux, elle n’aurait jamais vu le soleil, ou n’aurait jamais eu de nuit complète avant très longtemps. Elle ne sait pas comment ses parents ont fait, mais elle veut bien leur tirer son chapeau. Enfin pour ça, il faudrait qu’elle les prévienne qu’elle est enceinte et de sa situation très particulière. « Vous avez décidé si vous voulez savoir le sexe ? » Avec tout ça, Meghan avait oublié ce détail, qui n’en est pas un d’ailleurs. A nouveau, son regard se tourne vers l’écran. Peut-elle croire ce que dit la gynécologue après tout ça ? Pourquoi ne se tromperait-elle pas encore une fois ? Mais elle a aussi terriblement envie de savoir. « Oh oui, on veut savoir. Hein Leo ? » Elle le regarde quand même, pour avoir sa confirmation. Et quand le médecin a leur accord à tous les deux, elle bouge à nouveau la sonde, semble d’autant plus attentive à ce qu’elle voit à l’écran pour ne pas faire encore une erreur. « Il semble que vous allez avoir une petite fille, toutes mes félicitations. » En effet, Meghan aurait tendance à être d’accord avec elle. Elle ne voit rien à l’entrejambe, donc ça paraît logique. Et elle se sent tellement heureuse. Une petite fille. Sa fille. « Une fille… on va avoir une fille. » Elle se tourne vers Leo, un grand sourire aux lèvres. Elle pourrait presque l’embrasser, mais quelque chose la retient. Tout comme elle réalise qu’elle a qualifié cet enfant comme s’il était le sien, alors qu’elle n’en est toujours pas sûre. Mais peu importe, elle choisit de se concentrer sur le bonheur qui l’envahit plutôt que sur tous les doutes qui persistent.