visite redoutable (meghonel)

Il est temps de mettre les choses à plat, de poser cartes sur table et de dire ce que vous avez sur le cœur. Des jours que vous ne vous êtes pas parlés, une semaine que vous ne vous êtes pas vu. C’est un véritable déchirement, car Meghan, tu l’as dans la peau. Non seulement cette histoire t’a foutu un coup, mais le fait de ne pas être avec elle n’as pas arrangé les choses. Tu souhaites lui parler, qu’elle ne t’en veuille pas pour cette prise de distance, ton silence. Mais d’avance, il est certain qu’elle ne pourra pas passer au-dessus de ça. Tu lui avais dit être présent pour elle. Et même si vous n’avez pas évoqué cette possibilité de ne pas être le père de la petite, elle souhaitait que rien de change. Que tu prouves que votre relation dépasse cette grossesse. Même si c’est le cas, elle aura probablement du mal à te croire, à te faire confiance. Toi qui récidives, tu prends des distances. Ce n’est pas juste pour elle. Mais après plusieurs messages restés sous vagues réponses, la blonde veut bien te voir. Alors, tu déposes Martin chez non pas sa sœur, mais chez son nouveau colocataire. Le meilleur-ami de votre cousin. Puis, tu files à travers le quartier à bord de ta voiture. Tu redoutes cette conversation, et sans que tu vas devoir confronter un mur. Noor t’avait bien mise en garde. T’es prêt à accueillir ce que tu mérites, même si tu n’as qu’une envie, c’est de venir te réfugier dans les bras de ton ex. Pourquoi, c’est si difficile que ça ? Tu as seulement à lui dire ces petits mots, ceux qui en disent long malgré qu’ils soient courts. Garé au pied de son immeuble par on ne sait quel miracle, tu te caches sous une casquette et pries pour que personne ne te reconnaisse. Pourtant, ta voiture ne passe plus inaperçu depuis longtemps. Caché sous ta casquette et tes lunettes de soleil, tu sonnes à son interphone. Et réponds à petite voix quand tu entends que ça décroche de l’autre côté du haut-parleur. « C’est Leo. » Ton cœur bat rapidement, tandis que ta gorge se met à se serrer de plus en plus rapidement comme si tu étais en train de faire une allergie. C’est douloureux, et l’attente n’a jamais été aussi longue. Interminable. Les secondes semblent être des heures. Tu n’as qu’une envie, c’est venir te réfugier à l’intérieur, la voir et t’assurer qu’elle désire encore de voir. Car toi, c’est tout ce que tu veux. Malgré tout ce qu’il a pu se passer. Malgré cette annonce qui a tout fait basculer. Au fond, les autres ont raison, la génétique, ça reste de la génétique, mais tu souhaitais vraiment en être le père. Son créateur.

De son index, elle caresse doucement la joue toute douce de la petite fille qui est en train de s’endormir. Sa respiration s’apaise petit à petit, mais Meghan reste à ses côtés. Elle sait qu’il va bientôt arriver, et elle ne sait pas ce qu’elle doit penser de tout ça. Elle n’avait plus envie d’y penser. Et pourtant son esprit y revient sans cesse. Elle s’était imaginé une version des choses, ce qu’elle voulait par-dessus tout et, force est de constater, que rien ne se passe jamais comme prévu. Mais au fond, tout va bien. Elle est en bonne santé. Adelaïde l’est aussi. Le reste n’est qu’accessoire. Ou tout du moins, c’est ce qu’elle essaye de se dire. Elle est interrompue dans son admiration de sa fille endormie par la sonnerie de l’interphone. Elle se lève alors et rejoint l’entrée, prenant soin de fermer la porte de sa chambre sans bruit. Elle décroche mais reste silencieuse. Pourquoi le simple fait d’entendre sa voix lui parait si étrange ? Si bon et à la fois si terrible ? « Tu peux monter. » Dit-elle en appuyant sur le bouton qui déverrouille la porte de l’immeuble. Elle ne repose le combiné qu’après avoir entendu la porte se refermer, puis ferme les yeux un instant. Elle ignore si elle a bien fait d’accepter de le voir. Mais elle en avait envie aussi. Tout un tas d’envies différentes. A croire que les hormones continuent de la rendre folle. Ou bien c’est juste que tout cela est compliqué. Trop compliqué. Elle rouvre les yeux quand elle entend l’ascenseur s’ouvrir, puis des pas sur le palier. Elle ouvre alors la porte avant qu’il ne sonne, et lui offre un faible sourire. « Entre. » C’est étrange de ne plus savoir quoi lui dire à nouveau, alors qu’ils s’étaient tellement rapprochés ces derniers mois. Mais finalement, peut-être que tout cela n’était qu’une illusion.

Les peines de l’ascenseur se referment derrière toi, te confinant dans ce petit espace. À l’abri des regards, tu te permets d’enlever tout ce matériel superflu : casquettes et lunettes. Hors de question de se cacher. Des jours que tu le fais, évitant soigneusement de croiser la belle blonde. Ex qui doit très certainement rester confiné chez elle, à bercer délicatement Adelaïde. Sur l’écran d’annonce, les étages défilent, compressant davantage ce nœud dans ta gorge. Impossible de faire machine arrière. Tu as déjà bien trop attendu. Les messages de Meghan se font très rares et sont loin d’être des plus chaleureux. L’ascenseur annonce que tu es arrivé au bon étage. Une sonnerie retentie, t’inspire profondément, et les portes s’ouvrent.s Au ralenti, tu avances dans ce couloir qui semble interminable. Et tu la vois apparaître à sa porte, avant même de déposer ton index sur la sonnette. Toujours aussi sublime, mais moins radieuse qu’à son habitude. Elle n’a pas ce sourire qu’elle a habituellement. Il est bien plus léger qu’habituellement et sa voix ne semble rien présager de très joyeux. C’est comme lors de vos retrouvailles. Lorsqu’elle est venue sous prétexte d’avoir oublié quelque chose chez toi. Finalement, elle voulait uniquement te revoir pour t’annoncer sa grossesse et ta possible paternité. Retour à la case départ, là où tout était si compliqué entre vous. « Salut. » dis-tu légèrement, comme un enfant prêt à recevoir la claque de l’année. Sur ces ordres, tu entres et viens poser tes affaires dans l’entrée. Est-ce que tu devrais enlever tes chaussures ? C’est confus. « Comment tu vas ? » Mains dans les poches, tu restes debout, incapable de savoir où te mettre. T’agis comme dans ton enfance. Tu sais pertinemment que tu as fait une bêtise. Seul un fou serait incapable de reconnaître cette erreur. « La petite dort ? »

Le revoir lui parait étrange. Mais au fond, ce qui avait été le plus étrange, c’était sans doute de ne plus le voir pendant plusieurs semaines. Avant la naissance d’Adelaïde, ils se voyaient au moins trois fois par semaine, voire plus, échangeaient souvent des sms quand ils n’étaient pas ensemble. Et elle avait l’impression qu’entre eux, tout allait bien. Qu’ils formaient déjà un couple sans se l’être dit réellement. Mais ce n’était qu’un fantasme. Et Meghan ne sait que penser de la réaction de Leo face à tout ça. De la façon dont il avait pris la fuite et avait cessé de répondre à tous ses messages. Tout comme elle ne sait pas pourquoi il est là aujourd’hui. Elle espère sans doute qu’il dise certaines choses mais elle ne sait même pas quoi en penser. Tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle doit penser en priorité à cette petite fille qui dort dans sa chambre. « Bien… ça va. » Répond-t-elle sans trop y penser. En soi, elle va bien. Juste que tout ça lui pèse bien plus qu’elle le voudrait. Elle devrait être heureuse, simplement heureuse. Même si, forcément, il y a aussi des points négatifs à la vie de jeune maman. Mais elle avait tellement paniqué que finalement, elle estime que les choses se passent plutôt bien. « Oui, elle a des horaires réguliers pour les siestes. C’est pour ça que je t’ai proposé de venir à cette heure-là. » Elle ignorait s’il voulait la voir mais dans tous les cas, elle est plus disponible pour parler si Adelaïde dort. « Tu veux t’asseoir ? » De la tête, elle lui fait signe de la suivre, alors qu’elle va s’installer dans le canapé. Elle l’observe alors qu’il est encore debout. Tout ça lui semble à des milliers de kilomètres de leurs habitudes. Comme s’ils reprenaient à zéro. « De quoi est-ce que tu voulais me parler alors ? » Elle préfère entrer dans le vif du sujet dès maintenant. Arracher le pansement.

La blonde semble plutôt bien aller, et si tu te fies à ses dires, ça confirme les choses. Elle a plutôt bonne mine et contrairement à ce qu’elle aurait pu penser par le passé, sa maison est bien tenue. Elle semble avoir trouvé le rythme qui lui convient, et s’être rapidement faite à ce rôle qui, sans aucun doute, lui va comme un gant. Seuls, il vous sera nettement plus facile d’avoir cette conversation qui a été par maintes fois repoussées. Il reste plus qu’à prier qu’Adelaïde ne se réveille pas dans un hurlement interminable. Oui, t’as envie de la voir, d’observer ses petites mains et son petit nez, mais tu veux surtout pouvoir parler à ton ex. Car les choses n’ont jamais été aussi tendues. Plus encore que lorsque vous vous êtes séparé l’année dernière. C’est comme une seconde rupture, car même si rien n’a été dit, tu te considérais comme étant avec elle. Vous ne vous êtes simplement pas embarrassé de toutes ses mondanités et aviez fait les choses naturellement, sans trop, vous posez de question. Alors tu dois faire face à une deuxième rupture. Rupture nettement plus difficile que la première, puisque les regrets et le manque sont immédiats. Tu sais que tu l’as dans la peau Meghan. Bien plus que n’importe quelle fille. On a beau la comparer à ton ex fiancée, Meghan est différente. C’était si simple avec elle. Tu secours la tête quand elle dit que la petite dort. C’est rassurant de savoir que vous ne serez pas être coupé en pleine conversation. Mais à toi d’aller droit au but et de ne pas passer par quatre-chemins comme tu peux le faire aussi souvent. « Ouais. » dis-tu en te raclant la gorge. Tu ne sais pas trop quoi faire de tes mains. Machinalement, tu les fais craquer à de multiples reprises. Nerveux, Shacklebolt ? Légèrement, dirais-tu en minimisant les choses. La suivant vers le canapé, tu restes debout sous sa phrase qui semble vouloir dire qu’elle n’avait pas de temps à perdre. Tout ce qui pouvait te rassurer. Ou pas. « Euh.. » Finalement, tu restes debout, comme un con. Ça serait trop étrange de venir s’asseoir à ses côtés. Trop distant ou trop proche. Au moins d’ici, tu gardes une distance acceptable. « Je voulais m’excuser.. » Au fil de la phrase, le volume de ta voix diminue. « M’excuser. » Reprends-tu plus assurer que la première fois. « J’avais besoin de prendre mes distances pour digérer les choses, et j’ai pas pensé à toi dans tout ça. » Clairement pas. « Je voulais pas te blesser, ou te fâcher, c’était pas mon but, vraiment. »

Meghan n’avait pas imaginé que les premières semaines d’Adelaïde se passeraient ainsi. Bien sûr, elle relativise. Elle va bien. Elles vont bien. Doucement, des routines se mettent en place. Et elle semble grandir si vite. Mais elle n’a pas réellement de père. En choisissant de poursuivre sa grossesse, elle savait que ça serait une possibilité. Que ça ne serait pas forcément facile. Mais les choses avaient eu le temps de changer… pour finalement revenir à la case départ. Mais elle avait fait en sorte de relativiser et de penser à autre chose. Et avec un nouveau-né à la maison, les choses à penser sont nombreuses. Alors quand Leo lui avait enfin montré signe de vie, Meghan n’avait pas accepté immédiatement sa proposition de se voir. Malgré l’envie. Malgré le manque généré par son absence. Parce qu’elle lui en veut aussi un peu. Comme elle s’en veut à elle aussi. Même si elle ne cesse de se répéter que rien de tout ça n’est de sa faute. Et maintenant qu’il est là, elle a le cœur qui se serre, mais elle fait en sorte de ne pas le montrer. Il l’a blessée mais elle ne veut pas qu’il le voie. Même si c’est plus difficile qu’il n’y parait. Agir ainsi avec lui n’est plus naturel. Elle voudrait plutôt pouvoir se lover dans ses bras, et être heureuse, tout simplement. Assise sur le canapé, elle le regarde, se demandant ce qu’il a à lui dire. Espérant peut-être certains mots. Il avait besoin de distance, de temps. Ça ne l’étonne pas. Mais en effet, dans tout ça, il a oublié de prendre en compte ce qu’elle, elle ressentait. Ils auraient pu en parler. Au lieu de ça, il avait juste disparu. Et Meghan n’avait aucun moyen de savoir s’il allait revenir un jour. C’était sans doute ça le pire. « Je… d’accord. » Elle frotte ses mains sur son pantalon, dégageant des poussières invisibles. « Merci de t’excuser. » Elle ne sait pas ce qu’elle peut dire. Aurait-il réalisé qu’il l’avait blessée si elle ne le lui avait pas fait comprendre ? Meghan n’en sait rien. « Tu as eu le temps de digérer alors ? » Elle garde un ton neutre, alors qu’en vérité, elle espère tellement.

Tu savais que les choses n’allaient pas être faciles, mais là ça devient mission impossible de lui parler. Elle est tellement distante. Elle d’habitude quasi si bavarde que toi est muette comme une carpe. Ça ne t’aide pas. Tu radotes, et ne sais comment lui faire comprendre tes sentiments envers elle, et cette peine qui préexiste en toi. Tu aimerais avoir digéré cette annonce, mais elle est tout le temps dans ta tête. En grosses lettres, apparaît test négatif. Et au cas où tu oublierais, les lettres se mettent à clignoter pour attirer ton attention dessus. Juste pour s’assurer que tu n’oublies pas. Comment tu pourrais oublier une telle chose ? Pour la troisième fois de ta vie, ton cœur saigne, et rien ne semble vouloir arrêter cette hémorragie sans fin. Heureusement que ta famille est là pour toi. Car sans eux, tu serais totalement perdu, certainement en train de couler sous les eaux. La blonde t’écoute, assise sur le canapé. Elle semble être tout autant embarrassée de la situation. Alors tu viens à te demander si elle n’a pas accepté de te voir uniquement pour que tu arrêtes de la fatiguer par message. C’est une bonne technique pour te faire taire, puisque tu ne l’as relancé qu’une fois et des jours plus tard. Toujours début à la regarder, tu te passes une main derrière la nuque. Et finalement, tu te décides à venir t’asseoir à ses côtés. Tu ne viens pas la coller, comme tu aurais pu le faire habituellement. Tu gardes une certaine distance. « Pas vraiment. » Et tu ne lui rejettes pas la pierre. T’es responsable de ton implication bien trop forte pour ton cœur. Les barrières, tu les as toi-même enlevées. Alors, non tu n’accuseras pas Meghan d’être responsable de cette douleur qui est présente à l’intérieur de toi. Elle ne t’a pas mis un couteau sous la gorge, fais aucune promesse. Tu étais parfaitement conscient de la deuxième hypothèse. Tu aurais seulement voulu que la première soit la bonne. Mais t’es bien placé pour savoir que les choses ne se passent jamais comme on le désire. « C’est seulement un peu moins douloureux. » Légèrement. « Je me suis imaginé tout un monde, et la chute est brutale. » Le pire dans tout ça, c’est que tu agirais exactement de la même manière si tu devais tout recommencer. Tu ne fais pas les choses à moitié. Quand le cœur y est.

Meghan ne peut s’empêcher de se demander pourquoi il est là s’il n’a pas encore eu le temps de digérer la nouvelle. S’il n’a pas digéré, cela ne signifie-t-il pas qu’il ne sait toujours pas ce qu’il veut ? Et ça, Meghan n’a pas besoin de l’entendre à nouveau. Elle a toujours du mal à croire à tout ça. Elle est toujours terriblement blessée. Elle avait pourtant essayé de protéger son cœur en refusant d’officialiser avec Leo. Au fond, ce n’était qu’un mot. La vérité, c’est qu’elle était tombée à nouveau amoureuse de lui. Sans doute encore plus que la première fois. Si elle a seulement arrêté. Mais elle avait espéré, trop. Encore. A croire qu’elle n’apprend pas. Mais au-delà de ce qu’elle, elle ressent, elle voit bien que Leo ne va pas bien non plus. Que tout ça n’est pas facile non plus pour lui. Pourtant, il n’a plus de responsabilité, plus d’implication dans toute cette histoire trop compliquée. Au final, elle est celle sur qui toutes les responsabilités retombent. « Je comprends… c’était pareil pour moi. » Parfois, elle espère encore que les choses aient été différentes. Mais ça reste un espoir, qu’elle ne peut pas concrétiser. « Mais j’ai dû revenir dans le monde réel, je n’ai pas eu le choix. » Pas quand elle avait une petite fille qui dépendait entièrement d’elle. Dans le monde dont elle avait rêvé, elles auraient formé une famille avec Leo. Dans le monde réel, sa fille n’a pas de père et l’aide qu’elle a lui vient d’Eris et d’Aaron, dès qu’ils ne sont pas au travail. Mais régulièrement, elle se sent seule dans tout ça, même si elle fait de son mieux pour ne pas le montrer. Elle ne peut pas faiblir alors qu’il y a sa fille pour qui elle doit être au top. Elle tourne un peu la tête vers Leo, qui s’est assis à côté d’elle, essayant de comprendre pourquoi il est là. « Je suppose que tu ne sais pas non plus ce que tu veux… » Soupire-t-elle, préférant ne pas trop se faire d’espoirs. Il est venu pour s’excuser, voilà tout. Et il va repartir.

Sur la même longueur d’onde, Meghan revient à la réalité, non sans trop avoir le choix. Difficile de faire autrement avec un bébé à la maison. Les choses auraient été beaucoup plus simple, si vous aviez pu rester dans une bulle parallèle au monde réel. C’est toujours plus sympa. On peut se créer un univers sans limite, rendre possible l’impossible. Seulement, un jour, il faut redescendre de son petit nuage, et se confronter à la réalité. Ce n’est pas si simple. Ça fait toujours aussi mal. Voir plus. On se dit que tout ce qu’on avait imaginé n’arrivera jamais. Ça reste uniquement dans notre tête. Une simple imagination. Assis à côté de la blonde, t’essayes d’être des plus honnêtes avec elle. Lui dire ce que tu ressens vraiment. Avec cette dernière phrase, t’espères qu’elle comprendra quels sont tes sentiments envers elle. Pourtant, elle se demande si tu ignores ce que tu veux à l’heure actuelle. Ça fait des mois que tu sais ce que tu veux, ou presque, du moins. Tu minimisais tes sentiments. Tu te disais que tout cela venait du fait qu’elle était enceinte, et qu’elle allait pouvoir te promettre ce que tu désires depuis longtemps. Une petite famille. Bien que tu en ais déjà une. Aujourd’hui, loin d’elle depuis seulement quelques jours, tu sais que tout cela était bien réel. Alors, tu la regardes. Ce n’est pas un reproche qu’elle te fait. Elle semble triste. Mais c’est peut-être interpréter les choses. T’as l’impression que c’est le moment de tout lui dire, ou tu la perdras pour de bon. T’es déjà assez chanceux qu’elle accepte de te revoir, de te parler. Deux fois qu’elle le fait. Rare sont les femmes qui donne deux chances. Une c’est déjà bien assez. Toi-même, tu n’as pas donné cette deuxième chance à Jordan. Tu n’as pas cherché à comprendre, t’as simplement dit stop. Meghan, t’y crois dur comme fer. T’espères que c’est une véritable chance qu’elle t’offre à nouveau, alors tu sautes. A son souffle, tu veux la rassurer, tu sens qu’elle en a besoin. Qu’elle attend quelque chose de toi. Tu lui fais face, la regardes, et tente de capter son attention. « Je sais parfaitement ce que je veux. Je crois même que ça fait longtemps que je le sais. » Dévoiler tes sentiments n’a jamais été ton fort. Alors que parler, c’est si simple. « Regarde-moi, s’il te plaît. » Tu prends ton courage à deux mains, car tu crois qu’elle partage la même chose que toi. Sinon, pourquoi essayerait-elle de comprendre ta fuite. Elle pourrait tout simplement s’en foutre, et ne pas chercher à te revoir. Pourtant, elle fait tout le contraire. « Je tiens réellement à toi, bien plus que je ne le pensais. Et j’ai envie qu’on se donne une autre chance. Une véritable, qu’on arrête de se cacher derrière des excuses. » Au pire, tu te trompes et elle te dira non. Tu tomberas encore plus bas, mais t’es fait pour te relever.

Elle ne peut s’empêcher de regretter cette distance imposée entre eux, alors même qu’il est là. Mais la vérité, c’est que quelque chose a changé le jour où ils ont appris qu’Adelaïde n’était pas le fruit de leur amour. Et l’absence de Leo n’a rien arrangé. Maintenant, elle a l’impression de consolider un peu plus ce mur entre eux. Pourtant, elle voudrait que tout soit plus simple. Mais elle sait aussi que c’est impossible. Le destin semble décidé à lui refuser le bonheur plutôt traditionnel auquel elle aspire. Alors elle se protège, parce qu’elle a assez souffert. Parce qu’elle n’a pas besoin d’une autre déception. Pas maintenant. Et pourtant, quand Leo déclare savoir depuis longtemps, elle ne peut s’empêcher d’espérer. Il ne dirait pas ça pour lui dire qu’il ne veut plus rien avoir à faire avec elle. Ça serait juste cruel, et il ne l’est pas. Il ne l’a jamais été. Elle le regarde, un peu hésitante au début, avant de fixer son regard dans le sien. D’un simple regard, il peut lui dire tellement. Lui faire ressentir tellement de choses. Et pourtant, elle a besoin qu’il dise les choses, clairement. Et il le fait, sans cesser de la regarder. Une fois qu’il a fini de parler, Meghan réalise qu’elle a oublié de respirer. Par anxiété, puis peut-être par peur de manquer un seul mot de ce qu’il a dit. « Je… je ne me cache derrière aucune excuse. » Plus maintenant du moins. Elle avait pourtant imposé une certaine distance entre eux, un peu artificielle, en prétendant vouloir attendre que ses hormones reviennent à un niveau raisonnable. Mais elle avait eu raison de le faire. Ou peut-être pas. Elle n’en sait rien. « C’est aussi ce que je veux. C’est ce que j’ai toujours voulu. » Être avec lui. Qu’ils aient un avenir. Et elle a déjà été déçue à deux reprises. Mais elle voudrait aussi croire que cette fois pourrait être la bonne. « Mais je préfère qu’on y aille doucement. Parce que moi, j’ai une petite fille qui n’a pas besoin de ça. Surtout qu’Adrian ne répond toujours pas à mes appels. Alors tout est déjà assez compliqué. Trop compliqué. »