i'm only human / aspen

C’est rare que l’appartement soit si calme. Avec quatre personne résidant au même endroit, il y a beaucoup de passage et d’activité en règle générale, bien que la journée, elle ne soit pas souvent là. Elle travaille dans un studio dans un autre coin de la ville, et là, elle vient tout juste de rentrer. Elle a tourné une vidéo aujourd’hui, et elle a tellement été prise qu’elle n’a même pas tout fini avant de rentrer. Elle est passée chercher à manger au Thaï en bas de chez elle de rentrer, elle a prévu de finir un peu le montage de ses vidéos après avoir dîné, posée devant la télé. Une soirée tranquille en somme. Elle ne s’arrête jamais vraiment de travailler, elle a toujours quelque chose en tête, une nouvelle idée, une façon de monter ses vidéos. Sa créativité ne la laisse jamais tranquille, et c’est bien loin de la déranger. Seulement parfois, ça peut quelque peu freiner les échanges entre êtres humains tant elle peut être obnubilée par ce qu’elle fait.
Quand elle rentre, elle remarque que du bruit provient du salon. La télé est allumée, sans doute quelqu’un en train de passer la même soirée (à peu de choses près) qu’elle avait prévu. Elle va devoir avoir de la compagnie pour travailler du coup, elle n’a pas envie d’aller s’enfermer dans sa chambre tout de suite, surtout qu’elle n’a pas encore mangé. Et il est hors de question pour elle de manger dans sa chambre. « Tu regardes quoi ? » Demande-t-elle en entrant dans le salon, sans même voir à qui elle s’adresse. « Ca te dérange si je m’installe ? » Elle ajoute en s’asseyant tout de même sur le canapé sans attendre de réponse, constatant que c’est Aspen qui aura la chance de lui tenir compagnie ce soir. Elle a un petit sourire en repensant à ce qu’elles ont vécu par le passé et à leur situation actuelle. Un peu improbable, mais pas non plus exceptionnelle. Isabel commence à déballer son repas, s’étant installée en tailleur sur les coussins du canapé. « Si j’avais su qu’il y avait du monde, je t’aurais pris quelque chose. A moins que tu aies déjà mangé ? » Elle aurait pu appeler avant, ou elle peut toujours partager, si jamais la blonde y tient vraiment.

Cette soirée, elle en a rêvé toute la journée. Pouvoir se poser tranquillement et manger quelque chose de consistant, c’est presque un rêvé éveillé. Elle n’a pas passé une journée si horrible que ça en soit, mais ça va lui faire du bien de penser à autre chose qu’à son nombre d’abonnés ou son nombre de vues pour une fois. Qu’elle ne soit pas seule chamboule quelque peu ses plans, mais elle va pouvoir s’en accommoder. Elle voulait terminer la saison de la série qu’elle suit en ce moment, mais elle trouvera bien un autre moment pour le faire. Elle s’installe aux côtés d’Aspen, qui regarde « une série », selon ses dires. Elle a vaguement le sentiment de la déranger mais ça ne va pas suffire à la faire partir. Elle se sent moins coupable lorsque sa colocataire lui apprend qu’elle a elle aussi commandé quelque chose à manger. Moins coupable mais aussi soulagée de ne pas avoir à partager son dîner. Pas qu’elle ne soit pas généreuse, mais elle en a rêvé toute la journée et elle a vraiment très faim. « Tu as commandé quoi ? » Elle est gentille, elle essaye de faire la conversation même si ce n’est pas forcément nécessaire. Peut-être qu’elle la dérange plus qu’autre chose au final. « Si jamais ça devient trop long, on pourra toujours partager. » Elle finit par proposer ça, parce qu’au final elle ne veut pas la voir mourir de faim. Elle se rend très vite compte qu’Aspen n’a pas l’air beaucoup plus à l’aise qu’elle. Dire qu’à une époque, ce n’était absolument pas comme ça entre elles… Beaucoup plus naturel, elle se sentait bien moins mal à l’aise. « J’ai travaillé toute la journée. » explique-t-elle en haussant les épaules. « Ca va, mais j’ai connu des journées plus fun. » Pour la plupart des gens, ce qu’elle fait dans la vie, son métier, s’apparente plus à un hobby qu’autre chose. Elle ne sait pas vraiment ce qu’Aspen en pense non plus, mais ça n’a pas d’importance. Elle sait ce qu’elle vaut et elle gagne très bien sa vie comme ça. « Et toi, ça a été ? » Demande-t-elle à son tour, commençant à piocher dans son plat.