let's play a breaking game [feat. Leah]

Allez Leah, souris, smile chérie, tu as un rencard. Un ren-card. Bon, pas du genre tout mignon tout romantique qu'on t'a proposé en rue sous un soleil couchant. Via Tinder, tout simplement. Et ça me convient. C'est vrai, pourquoi pas ? Je suis célibataire depuis ma naissance, vierge en plus, j'arrive à un certain âge où je me dis que je dois me bouger pour ne pas terminer seule avec mes chats. Et puis, j'ai envie de faire de nouvelles rencontres. Pour une fois ! Je déteste l'imprévu, j'adore la routine et rester dans mon cocon, qu'on ne me fasse pas chier. Mais je me rends compte que ce n'est pas spécialement bien pour moi, c'est même néfaste. Après l'épisode du râteau monumental de Kenneth, j'ai bien envie de reprendre confiance en moi et de croire que peut-être dans ce monde je peux plaire réellement à quelqu'un. Je plisse les plis de ma robe rouge passion et je prends un taxi pour me rendre au lieu de rendez-vous ; au Harlem Nights. Je trouve facilement mon date, très élégant comme sur la photo et étrangement, le courant passe plutôt bien. Je suis à l'aise les gars, je ne tremble pas comme un feuille morte et j'arrive même à rire aux éclats sans me forcer. Tout se passait bien, il était en train de m'expliquer comment son chien est devenu célèbre à la télé lorsqu'une voix familière me fait hérisser les poils. Eliott. Putain, pourquoi je lui ai dit hier que j'avais un date tinder ce soir-même ? Je le regarde avec de gros yeux et je plante mes griffes dans la table. « très drôle... excuse-moi, c'est mon frère. il se montre un peu trop protecteur. inutile de faire attention à lui. » que je lance au jeune homme en face de moi mais bizarrement, il se rétracte, casse la proximité qui s'était installée entre nous et pose son dos dans le dossier de sa chaise. Je me mords la joue puis je me lève pour faire face à cet imbécile d'Eliott. « qu'est-ce que tu fous ici ? fiche le camp avant que je te botte le cul. » et ça, je peux le faire. Je relâche son bras que j'ai tordu de mes doigts crochus et je le fusille du regard en mode vénère. Non mais c'est pas open air ici, qu'il aille chercher un autre couple à faire chier.

C'est pas possible, je ne sais pas ce qui me retient de lui fracasser le nez. Je l'adore Eliott hein, mais à petite dose. Faut toujours qu'il se mêle des affaires des autres. Et ce qui regarde mon cul ne regarde que moi. J'y tenais à ce rendez-vous, vraiment. J'ai un peu de feeling avec un garçon, pour une fois. Quelqu'un s'intéresse à moi. J'suis pas Leah la bonne copine au caractère de feu pour lui. Je suis quelqu'un qu'il veut apprendre à connaitre, il me l'a dit lors de nos nombreuses conversations sur l'application. Là, je rage tellement que j'en ai presque les larmes aux yeux. Je fusille mon ""ami"" du regard alors qu'il prend une chaise pour s'installer. Pardon ? Mon rencard a un sourire mal à l'aise sur le visage lorsqu'il lance que notre mère est notre soeur et je passe une main sur mon crâne pour le masser doucement. « ça suffit, putain, tu fais chier. » et je ne me gêne pas pour lui donner un coup de pied dans sa jambe. Merde, j'aurais bien aimé lui briser les bijoux de famille. Je porte mon regard sur mon rencard en faisant une petite moue. « on va remettre ça à plus tard d'accord ? je t'appelle en rentrant. » bordel ça me tue de faire ça. Le mec accepte bizarrement et s'en va, comme ça. J'ai même pas le temps de l'enlacer. Fuck, et dire que j'aurais voulu l'embrasser, au moins une fois. Au lieu de ça, j'ai ce con de Sherwin qui me colle aux basques. Dès qu'il est parti, je ne me gêne pas pour foutre une claque sur la tête d'Eliott. « qu'est-ce qui t'as pris bordel ? tu peux pas me laisser vivre non ? faut toujours que tu pompes mon air. » la claque était amicale, pas assez forte. Dommage. Je prends ma bière pour la porter à mes lèvres et je la bois d'une traite pour calmer mes nerfs. 

Peut-être que l'aide d'Eliott aurait été nécessaire si vraiment mon rencard ne me plaisait pas. Mais là, c'était tout le contraire. Je me sentais vivante, niaise, comme si j'avais douze ans. J'étais à mon aise, pas stressée, totalement détendue. Et ça, pour que Leah Burgess soit relax, il en faut beaucoup hein. Mes potes peuvent en témoigner. Je rage en voyant le bel homme quitter la table, me laissant en tête à tête avec ce con qui me sert de pote et je grogne. J'ai pas peur de le frapper ou de lui lancer des piques. Je suis encore gentille et je ne sais pas ce qui me retient de réellement le blesser avec mon venin. Sans doute que j'ai encore trop de respect pour lui, chose qu'il n'a pas visiblement avec moi. Eliott essaye de dédramatiser mes conclusions mais je suis bornée et têtue, trop pessimiste. « mais tu comprends pas tête de nœud. c'est pas tous les jours qu'un gars me plait et qu'en plus ça soit réciproque. c'est la première fois que j'ai un rencard en cinq ans. pour UNE fois, je pouvais bien me passer de tes conneries. » je soupire. Grandis Sherwin, je sais pas, occupe-toi une autre occupation dans la vie plutôt que casser mes coups avec les mecs ? Je grimace en voyant que ma bière est vide alors je fais signe au serveur le plus proche pour qu'il m'en remette une. Je lève un sourcil en le regardant sévèrement et je pouffe de rire. « mensonge, tu recommenceras car t'adore ça, me foutre dans l'embarras. » j'ai raison ou pas ? Je déglutis puis je jette un coup d'oeil à la sortie du bar, au cas où le mec m'attendrait dehors, mais non, il est bel et bien parti. Je reprends mon attention sur Eliott.  « c'est à se demander si on est vraiment amis... imagine que je débarque dans ta chambre alors que t'es à deux doigts de conclure avec une de tes pouffes et que je sorte une connerie pour casser ton coup, mh ? » peut-être qu'en échangeant les rôles, il va peut-être se rende compte qu'en effet, ça c'est pas cool. Mais c'est Eliott, on parle du plus gros chieur de la planète qui ne peut pas avoir de compassion pour les autres.