friday is my second favorite f word / sloan

Derrière la caisse, Tiara lâche un soupir. Le dernier client est trop loin pour l’entendre, mais elle espère qu’il partira bientôt. Elle doit retrouver Sloan ce midi et, à mesure que le temps défile sur l’horloge, elle voit sa pause déjeuner se réduire. Pourtant, les horaires sont bien affichés sur la porte mais l’homme est entré dix minutes avant la fermeture et maintenant, il prend son temps. A croire qu’il prend une décision capitale, et qu’il avait besoin de ses accessoires sexuels ce midi. Après tout, il fait ce qu’il veut de sa vie, mais s’il pouvait se dépêcher, ça arrangerait Tiara. Heureusement, il finit par faire son choix et elle lui fait payer ses achats, soigneusement rangés dans un sac. Enfin, elle peut mettre l’alarme et fermer la boutique pour l’heure du midi. A pied, elle se presse pour rejoindre le parc au pied du Brooklyn Bridge. A mi-chemin entre son travail et celui de Sloan, ils ne peuvent quand même pas se permettre de faire ça tous les jours. Juste un jour par semaine, où ils ont une pause déjeuner un peu plus longue. En arrivant, elle consulte son téléphone pour savoir où trouver Sloan. Elle l’a prévenu de son retard et donc il est déjà dans la file d’attente d’un des seuls petits restaurants ouvert à cette saison. Il faut dire que c’est aussi l’un des seuls à permettre de manger à l’abri du froid, mais avec tout de même une belle vue sur le parc et le pont emblématique de New York. Elle le rejoint rapidement, doublant sans se gêner plusieurs personnes. « Ça va, je ne suis pas trop en retard en fait. » Il n’a pas encore commandé, donc tout va bien. « J’avais un client pour qui le choix de dildo était compliqué apparemment. Mais j’ai fini par en sortir vivante. » Elle parle de ça à voix haute, sans se soucier qu’on l’écoute ou même que Sloan ne soit pas forcément à l’aise avec ça. Mais elle aime bien lui raconter ses petites histoires. Son travail ne l’enchante pas forcément tous les jours, alors autant y trouver un peu d’humour.

Agacé était le mot juste. Cette matinée ressemblait à tout ce que tu n’aimais pas, t’avais pas été productif du tout, bloqué sur ces fameux codes que tu pensais avoir résolu la veille. Dans ce genre de cas, tu ne décrochais pas de ton écran, tu restais jusqu’à résoudre le problème mais aujourd’hui, tu ne pouvais pas. Tu resterais sans doute ce soir, c’était courant et comme c’était vendredi, il y avait peu de chance pour que tes collègues soient là, car ils avaient une vie privée, pour certains une vie de famille et pour d’autres, simplement des limites. Si le week-end semblait sacré pour eux, pour toi il ne l’était pas. Par contre, tes déjeuners avec Tiara que vous vous étiez habitués à prendre une fois par semaine le sont. Même le froid de l’hiver n’avait pas mis en standby ce petit rituel, vous aviez réussi à vous dégoter une place dans un petit restaurant qui donnait sur votre sujet de conversation favori: le parc. Avant d’entrer dans le restaurant, t’avais profité de te tirer une clope après avoir reçu le message de la retardataire. Tu ne comptais pas passer commande sans elle et puis t’avais eu besoin d’oublier ces lignes de codage quelques instants, la nicotine t’y aidait même si t’essayais d’éviter. T’avais fini par y entrer malgré tout et c’est au bout de quelques minutes que la voix de Tiara s’était faite entendre, apparemment soulagée de te voir encore dans la file. «Tu diras merci à la cigarette que je me suis allumé avant d’entrer» Tu la regardes amusé, avant que ton visage ne se fige légèrement en l’entendant parler du client qui l’a mise en retard. Avec le temps, tu commençais à t’habituer, c’était typiquement son genre de parler sans chercher à être un minimum discrète, elle se foutait bien des gens qui pouvaient les entourer. «S’il a fait si long, c’est peut-être parce qu’il les a testés entre deux rayons. Il était pas en sueur au moment de payer?» En répondant, tu t’étais fait légèrement plus discret qu’elle, mais pas suffisamment vu le soupir qu’avait lâché la femme devant toi avec son dessert dans les mains.  «Bon appétit à vous madame!» Et avec le sourire en plus de ça, ta mère serait fière de toi. Tout l'inverse de la grognasse devant vous qui avait levé les yeux au ciel pour finalement passer son chemin. Et hop, une de moins!