(kenneth) i can't get enough

J'avais envie de voir Kenneth. C'est mal ? Non parce que, dites-le moi tout de suite. Je commence à me rendre compte que je craque, ouais, totalement pour ses beaux yeux. Le dernier après-midi passé ensemble m'a totalement retournée, chamboulée. D'abord le fait que la serveuse nous prenne pour un couple et le fait que j'ai avoué mon attirance, maladroitement. Comme une conne. Que dis-je, ce n'est pas la dernière fois que l'on s'est vu. Récemment, on a assisté à une scène tragique au supermarché et j'ai toujours du mal à m'en remettre. Voir tous ces gens blessés, inconscients, ça m'a totalement refroidi. La nuit, je revis ces moments, des images, un son, n'importe quoi peut me faire revivre la scène comme si j'y étais vraiment. Certains diront que je souffre d'un stress post-traumatique, mais moi, Leah la têtue, je vous dirais d'aller vous faire voir. J'ai échangé quelques sms avec Kenneth, car peut-être que je ne suis pas la seule à réagir comme ça. J'arrive à lui proposer de passer une soirée avec moi et il accepte. Soirée, nuit, peu importe. Je veux juste avoir ses bras qui me mettent en sécurité, car ce sentiment, je ne l'ai plus quand il est loin de moi. Et je veux passer une nuit entière car je commence à avoir de grosses cernes qui se creusent sous la poche des mes yeux. Je pourrais faire peur à un mort. J'attends dans mon appartement patiemment. J'ai commandé des pizzas, sorti une bonne bouteille de vin tout droit venue du Portugal et je l'attends. Je regarde l'heure, je joue avec mon téléphone et je sens une boule au ventre. Quand on sonne à la porte, mon coeur s'emballe, mon estomac se tord mais la seconde d'après, un grand sourire lumineux s'allume sur mon visage. J'ouvre la porte et dès que je le vois, ce visage si tendre et rassurant, je me mets sur la pointe des pieds pour me blottir fort fort fort dans ses bras. « t'es là... » que je souffle alors que mon corps ne cesse de trembler. Enfin je revis, enfin je retrouve mon oxygène et des couleurs. Je peux enfin souffler et me sentir bien, sans danger.
Parce que tu es là.

Cela faisait quelque temps que la tempête avait eu lieu, quelques jours que je n’avais pas de nouvelles de Leah aussi lorsque cette dernière m’avait contacté. Elle n’avait pas mis longtemps avant de m’avouer qu’elle dormait mal, ni pour me demander si je voulais bien passer la soirée avec elle. Je n’avais pas eu une once d’hésitation, j’avais accepté. Lui tourner le dos me semble inconcevable dans tous les cas et, le soir venu, je m’étais rapidement préparé pour ensuite prendre la route vers son appartement. C’est avec les mains vides que je sonne à sa porte, un peu gêné de ce détail justement. Je n’aime clairement pas venir chez quelqu’un sans avoir emmené un truc, ça fait impoli, mais je n’avais pas eu le choix. Le temps avait été relativement court entre nos échanges et le moment de partir de chez moi. La porte s’ouvre alors pour laisser apparaître mon amie, et je suis presque soulagé de la voir avec un sourire sur les lèvres, bien que je n’ai pu le voir que l’espace de quelques secondes. En effet, la belle vient directement se blottir dans mes bras et j’entoure son corps des miens, la serrant contre moi. Je souris à l’entente de ses paroles, mais le perds bien vite en réalisant à quel point elle est stressée. Ça se comprends à ses gestes, peut-être trop facilement pour une personne qui, comme moi, la connaît depuis des années. « Calme toi, Leah, ça va aller. » Je lui caresse doucement le dos, tentant de l’apaiser du mieux que possible. Ça ne me plaît pas de la sentir aussi tendue, tremblante de peur quant à ce qu’il pourrait arriver. Tournant légèrement la tête, je dépose un baiser sur sa tempe, avant de me reculer de quelques pas. Je fixe son visage, ramenant une main sur sa joue tout en scrutant les effets des nuits blanches qu’elle a passé, puis arbore une petite moue. « Je n'aime pas te voir comme ça. » Les yeux cernés, le teint pâle et la fatigue marquant les traits de son visage. Moi, j’aime la Leah souriante et enjouée, pas celle que j’ai face à moi. Qu’on ne se méprenne pas, elle reste belle, on parle de Leah Burgess après tout, cette femme magnifique sous toutes les coutures. Mais sa joie de vivre n’est clairement pas de la partie ce soir, je n’arrive pas à retrouver cette lueur de gaîté qui brille dans ses yeux habituellement. Ça me peine vraiment. « Rassure-moi, on ne va pas passer la soirée sur le pas de ta porte ? » Que je demande avec mon ton taquin dans le but de la faire rire quelque peu. Ou au moins de la faire sourire, comme lorsqu’elle a ouvert la porte avant de se jeter sur moi, ça serait déjà ça.

C'est bête mais... je respire, je n'ai plus peur. Mon pouls est apaisé, ainsi que les battements de mon coeur. Je retrouve une paix intérieure incroyable rien qu'en étant dans ses bras. Eh, Kenneth, qu'est-ce que tu me fais ? Pourquoi je suis autant bien quand tu es là ? J'ai déjà peur de devoir te laisser partir, car dès que tu auras franchi le pas de la porte pour me dire au revoir, je vais retomber dans la peine et la tristesse. Je suis une fille sensible, très sensible, et non, pardonnez-moi mais l'épisode de la tempête de neige, elle reste vraiment gravée et je ne sais plus quoi faire pour m'en débarrasser. « mmh. » que je dis, faussement convaincue. Je sais que ça va aller, je suis juste miss chochotte quoi. Kenneth me serre fort dans ses bras, je fonds, mon oreille collée contre sa poitrine qui vibre et puis il relève mon visage pour le prendre délicatement entre ses mains. Automatiquement, un sourire s'étire et je plante mon regard dans le sien. Bizarrement, mon coeur ne s'est pas tellement calmé là, il palpite à foison dans ma cage thoracique. Un court instant, j'imagine ce que peut être le goût de ses lèves sur les miennes. Curieusement, je me pose vraiment la question. Mais que va-t-il en penser après lui avoir bêtement avoué mon attirance l'autre jour ? Je ne suis pas une séductrice, je ne compte pas le charmer, le draguer pour l'avoir dans mon lit. Oh ça non, il le sait très bien vu que comme une conne, je lui ai dit sur un plateau d'argent que j'étais vierge. « non, enfin tout dépendra de toi... » je passe mes bras autour de sa nuque et je reste un moment silencieuse, à fixer ses lèvres. Puis ses yeux. Olala. Je vais vraiment le faire ? Je crois que oui, j'en ai envie, j'en meeeurs d'envie depuis tellement longtemps. Et je pense que si je ne passe pas le cap, si je ne tente pas, je le regretterai toute ma vie. Je pourrais au moins dire que dans ma misérable existence, j'ai goûté les lèvres de Kenneth. Soupire, calme, tu peux le faire. Sans plus attendre, je me mets sur la pointe des pieds et je viens capturer tendrement ses lèvres en y mettant toute ma passion, tout ce que je peux bien ressentir quoi. Et merde, avec ce baiser, il peut me lire comme un livre ouvert. Ouaip, tu me plais Kenneth et peut-être bien un peu plus que tu ne le crois. Maintenant, cadeau, je t'offre un baiser, tu en fais ce que tu veux. Libre à toi de partir et de me laisser plantée là. Je t'en voudrais pas. Peut-être un chouilla peu mais je vais survivre.

A peine la porte ouverte que Leah se jette sur moi, se blottissant dans mes bras, et je la serre un peu plus contre moi. Mon but est de l’apaiser, qu’elle cesse de trembler comme une feuille. Après quelques minutes comme ça, je me recule pour observer son visage. Le premier constat est alarmant, mais rien n’est irréparable. Elle va retrouver bonne mine, j’y crois dur comme fer. Le sourire qu’elle affiche me donne encore plus confiance et me fait sourire à mon tour. Je la questionne ensuite et sa réponse me fait froncer les sourcils. Comment ça tout dépendra de moi ? Elle passe ses bras autour de ma nuque pendant que je m’interroge. Je ne comprends vraiment pas et alors que je m’apprête à la questionner, elle me coupe dans mon élan en posant ses lèvres sur les miennes. Je cligne plusieurs fois les yeux, surpris par son geste, même si la douceur de ses lèvres me pousse à répondre à son baiser. Et c’est ce que je fais, l’espace de quelques secondes, avant de réaliser que je n’en ressens pas l'envie. Parce que ce ne sont pas les lèvres de Noor, me souffle ma conscience, et cette réflexion me percute de plein fouet. Je me recule alors, rompant le baiser, les yeux clos, réfléchissant à ce qu’il vient de se produire. Surtout à ce que je viens de faire... La repousser. Bordel, je ne pensais pas que ça arriverait un jour. « Je ne peux pas... » Je me mordille la lèvre, conscient qu’elle n’appréciera pas ce que je vais dire, mais il le faut. Je ne peux pas aller contre ce que je ressens, ni contre mes principes. « Je ne veux pas te blesser et sûrement que ça te fera du mal que je te repousse, mais si je ne le fais pas, ça finira par être encore pire... Je ne veux pas être ce mec qui profite de ton attirance pour lui. » J’ouvre les yeux pour examiner sa réaction, avant de continuer. « Il y a des années, j’aurai tout donné pour que tu fasses ça Leah, vraiment tout. Mais je suis tombé amoureux et mon coup de coeur pour toi a cessé. » J’ai trouvé Ella et j’ai su que ça serait l’amour de ma vie. Enfin... Je l’ai cru, et visiblement, ce n’est pas le cas puisqu’elle est partie loin de moi. « Et certes, Ella n’est plus là maintenant, mais le timing n’est pas le bon à nouveau... J’ai rencontré une fille et elle me plaît. » Même si je ne désire rien tenter de plus encore jusqu’à présent, par crainte de la souffrance qu’elle pourrait m’infliger à son tour. Et puis, ça ne serait pas trop rapide de me remettre avec une autre quelques mois après ma rupture avec Ella ? À mes yeux, sûrement oui. « Je suis vraiment désolé Leah, mais je tiens trop à notre amitié pour faire une connerie. Je te respecte trop pour continuer sur cette voie alors que j’en ai une autre en tête. » Un air triste se place sur mon visage. Je n’aime vraiment pas cette conversation, ayant bien trop peur de lui faire du mal. J’imagine bien que c’est le cas, elle m’a clairement fait comprendre que je lui plaisais, sauf qu’à ce moment-là, Noor n’était qu’une fille avec qui j’avais fini au lit après avoir été ivre. Désormais, elle représente bien plus que ça, je suis bien forcé de le reconnaître. Tout comme je suis forcé d’être respectueux envers les deux jeunes femmes.

Yep, il me repousse. Et c'est pas sans douleur. Ce baiser froid, étrangement partagé, ou pas, me glace le sang. Tout se calme dans ma tête et dans mon corps. Ce n'est pas grave. J'ai voulu essayé mh ? Je vais pas pleurer sur mon sort car j'ai reçu un stop du mec qui me plait depuis des années. Je le regarde à peine, un peu honteuse. Je ne sais pas si mes joues sont colorées à cause de ce malaise ou de la chaleur que j'éprouve là tout de suite. Et bam, Kenneth me parle d'une autre fille. Olala. Si j'avais ça ! Et moi qui me lance comme ça. Du coup, c'est encore plus compliqué à vivre pour moi tout ça. Moi qui pensais qu'il pouvait toujours avoir ce petit crush entre nous... j'ai tout gâché. Je me suis faites de fausses idées et me voilà totalement ridicule à avoir invité Kenneth dans mon appartement. J'imagine que maintenant, il va vouloir s'en aller. Personnellement, je reste muette pendant un moment. Je ne sais pas quoi dire. Plus il parle, et plus ça pique. Stop, arrête maintenant. « okay. » que je réponds simplement d'un air bête et moqueur. Ouais, je fous de ma gueule, de l'autodérision ça j'en ai, je vous promets. Je renifle et je passe la main sur mes joues pour les calmer. « c'est bizarre là maintenant non ? » à fond, l'ambiance est pourrie. J'ai envie de pleurer et de me rouler en boule, enfermée dans ma chambre. Mais il est là, et je devrais en profiter. Difficilement, mais ça devrait aller. Je me décale de lui et je viens m'asseoir dans le canapé en posant ma tête sur mes genoux pliés. « désolée, je pensais que... je suis trop conne. » allez une nouvelle insulte. Je joue avec une mèche de mes cheveux et j'ai presque envie de l'arracher tellement je suis en colère contre moi. Pourquoi tu as fait ça Leah ? Pourquoi ? Maintenant votre amitié est fichue et tu te retrouves seule avec tes chats comme d'hab.

Elle m’embrasse, me prenant par surprise, et si dans un premier temps, j’y réponds, je finis par la stopper. La réalité me revient en pleine face, tout comme cette prise de conscience sur ce qu’il se passe actuellement dans ma vie. Sur l’apparition de Noor et de la place qu’elle prend déjà dans celle-ci. Penser à elle me fait comprendre que ce baiser n’a aucun sens et qu’il ne fera qu’apporter de la souffrance. Bien plus que ce que je fais subir à mon amie à l’heure actuelle, en lui expliquant les raisons de l’arrêt soudain de nos deux bouches en contact. Elle me répond par un simple "okay", mais je vois à ses expressions, à son regard, que ce n'est pas le cas. Ça me peine bordel, ça me tue littéralement de lui faire du mal, mais je pense que j’ai eu la bonne réaction. Je n’aurai pas pu continuer tout ça et lui laisser croire qu’il pourrait y avoir plus entre nous, alors que je n’en ai pas envie. Et je savais que peu importe ma décision, je lui causerais du tort. J’ai juste préféré arracher le pansement maintenant et ne pas attendre que ça prenne encore plus d’ampleur pour elle. Elle me questionne ensuite, me demandant si c’est devenu bizarre désormais et j’arbore une légère grimace. « Un petit peu. » Beaucoup en fait, mais je tente juste de relativiser les choses et de ne pas envenimer la situation. Je ne veux pas non plus qu’elle se sente mal, ou coupable d’avoir instauré cette ambiance. Au fond, c’est bien plus moi le fautif qu’elle, c’est moi qui l’aie repoussé et pas l’inverse. Elle se détache de moi pour aller s’installer dans le canapé, pendant que je reste là, comme un idiot à la porte. Pourtant, ma réaction est immédiate lorsqu’elle s’insulte. Je ferme la porte et la rejoint, m’agenouillant devant elle, posant mes mains à plat sur le canapé, de part et d’autre de ses cuisses. « Arrête Leah, tu n’es pas conne. » Bien sûr qu’elle ne l’est pas, il faut qu’elle arrête de se rabaisser. « Tu ne pouvais pas savoir... » Je n’en avais pas moi-même conscience avant d’échanger ce baiser avec elle, donc non, elle n’aurait pas pu savoir pour tout ça. Je passe une main dans mes cheveux, angoissé comme jamais par ce qu’il pourrait se passer ensuite. Est-ce qu’elle va me pardonner de l’avoir rejeté de cette façon ? Ça me fait un peu peur qu’elle ne puisse pas le faire et que notre amitié ne tienne plus la route. « Je suis vraiment désolé, te faire de la peine, ce n’est pas ce que je veux. »

J'ai simplement touché ses lèvres, l'instant de quelques secondes et ce fut pour moi l'instant le plus long de ma vie je crois. J'ai embrassé Kenneth. Et j'ai tout fait foiré. Pourtant, j'avais espoir oui, conne que je suis, j'ai pensé que ça aurait pu être réciproque. Mais en même temps, qu'est-ce qu'il y a à envier d'une vierge comme moi ? D'une fille sans expériences qui fait des caprices de bébé et qui est handicapée d'une jambe. Non, c'est peut-être mieux comme ça. Kenneth a déjà une autre fille en tête et j'ai aucune chance, point final. Je m'attends à ce que Kenneth s'en aille, je m'éloigne plus loin dans le canapé et je prends mon téléphone pour pianoter nerveusement dessus. Mais Kenneth, il ne prend pas la fuite. Je le vois s'agenouiller près de moi et cherche le contact de mes jambes pour que je le regarde. Je l'observe en effet. Le coup dur, la tristesse se remplace par de la colère tout à coup. Calme Leah, ne t'enflamme pas. Ne gâche pas la chance de vous relever, déjà que tu as tout gâché. « j'ai juste une question, j'aimerais savoir pourquoi t'as pris cinq secondes à me repousser ? » je plie mes genoux vers moi pour qu'il arrête de me toucher et je plante mon regard dans le sien. « je remets pas en cause que tu l'aimes bien cette fille hein, mais pendant cinq putain de secondes, tu répondais au baiser. si tu l'aimais plus fort que moi, tu m'aurais repoussé après une seconde. » je lui tiens tête. Peut-être que je veux me donner raison, le mettre en tord. Je veux qu'il soit autant mal à l'aise que moi à l'heure actuelle. Je soupire, j'attache mes cheveux en queue de cheval et je me masse la nuque. Je peux pas rester en place, pas après ça, avec Kenneth juste à mes pieds qui me demande pardon. « laisse tomber, je ferai jamais le poids de toute façon. y'a toujours mieux. » je peux jamais faire la différence. il est évidant que je ne suis pas dans le top dix des femmes avec qui les hommes veulent être. C'pas grave, j'ai mon chat et ça me convient.

Après ce moment gênant entre nous, Leah m’offre une porte de sortie. En allant s’installer dans son salon, elle me donne l’opportunité de partir ou de rester et je choisis la seconde option, parce que partir à ce moment-là serait être lâche à mes yeux. Je ne peux pas la laisser dans cette situation, elle reste mon amie malgré tout et ça prime sur toutes les autres raisons qui me feraient partir. Alors je ferme la porte et la rejoint, m’agenouillant face à elle et plaçant mes mains contre ses cuisses, gestes qui ont l’effet escompté. Elle me regarde. Sauf que ce n’est plus de la tristesse qui emplit ses pupilles, mais plutôt de la rage, de la colère. Sentiments qu’elle déverse en me questionnant tout en relevant ses genoux pour que je ne puisse plus la toucher. Je la laisse parler avec de me relever pour faire quelques pas dans la pièce. « Je ne sais pas, je voulais peut-être juste voir ce que ça me ferait ressentir... Sur le coup, je n’ai pas su comme réagir, mais j’aurais dû te repousser dès le début, je le sais maintenant. » Ouais, j’aurai dû agir plus vite et je le conçois. Je ne suis pas certain que ça lui aurait fait moins de mal, mais ça aurait peut-être été un peu moins douloureux, non ? Je ne cherche pas du tout à lui faire du mal, si ça aurait été le cas, je lui aurais tout simplement dit ce que son baiser m’a fait ressentir. Ou plutôt, ce qu’il ne m’a pas fait ressentir. « Je n’avais pas envisagé que je tomberais sur elle, tu sais ? Je ne voulais pas que ça se passe comme ça. » Clairement, elle n’a vraiment pas choisi le bon timing. « Et puis, je ne savais pas que tu voulais que toi et moi, on... » Je me stoppe, cherchant les mots adéquats, mais rien ne vient. Elle voulait qu’on devienne quoi, au juste ? « En fait, je ne sais même pas ce que t’attendais de moi, Leah. » Je suis perdu en fait, moi. Ce baiser, il signifiait quoi pour elle ?

Je me sens bête c'est tout, un sentiment horrible qui me brûle de l'intérieur. Ce qui me rend triste, c'est pas que Kenneth me dise que l'attirance n'est pas réciproque, c'est le fait que j'ai tout gâché entre nous. Cette sensation de paix et de sécurité quand je suis avec lui... j'ai l'impression que je pourrais jamais la ravoir. J'ai perdu quelque chose qui bouscule tout mon monde et je suis en colère contre moi. Je me déteste, je pourrais même me foutre des claques. Et au lieu de m'énerver contre ma petite personne, je remets quai la faute sur lui. C'est mal, très mal. Je dis des choses que je pourrais sans doute regretter. Je renifle, j'essaye de reprendre mes esprits et j'hausse les épaules à sa réflexion. « et j'aurais pas dû essayer. » car au moins, notre amitié serait toujours là. Tant pis, j'aurais appris tôt ou tard qu'il serait en couple avec quelqu'un et j'aurais été soulagée de ne pas m'être ridiculisée ce jour-ci. Qu'est-ce que j'imaginais vraiment ? Je ne sais pas. J'avais pas de but précis en fait, juste l'envie de te sauter dessus. « on à qu'à oublier, je... je veux plus en parler. » d'ailleurs je pense que j'ai envie que tu t'en ailles, sérieusement. Je ne vois pas comment passer une bonne soirée avec cette pluie froide qui vient de s'abattre sur nous. Je regarde Kenneth et je fais une petite moue désolée. « j'aimerais être un peu seule. » pour ne pas dire 'dégage maintenant et va voir ta pouffe'. Non Leah, reste courtoise, c'est pas la faute de Kenny. C'est la tienne, uniquement la tienne. T'es née en étant débile et tu mourras en étant débile. On ne peut pas changer la fatalité des choses.

Je ne vais pas lui dire qu’elle a raison, qu’elle n’aurait pas dû essayer, ça serait en partie faux. D’un côté, je lui suis reconnaissant de l’avoir fait. Au moins, ça m’a permis de réaliser que cette attirance que j’avais pour elle, ce petit crush, je ne le ressens plus. Une chose que je ne vais pas lui dire, ça ne ferait que remuer le couteau dans la plaie, alors je me tais. Mais d’un autre côté, notre amitié vient de prendre un coup et à voir sa réaction, je ne sais pas trop si elle s’en relèvera. Ça me tue parce qu’elle compte énormément pour moi et que je ne suis pas prêt à la perdre, pas pour un truc comme ça. Elle souhaite oublier, est-ce que ça sera possible ? Honnêtement, j’en doute, mais encore une fois, je préfère ne pas dire le contraire à voix haute. « D’accord. » Je me contente d’acquiescer, prêt à me taire pour le reste de la soirée, juste pour ne pas gaffer un peu plus. Au moment où je songe à m’asseoir à ses côtés, elle ouvre de nouveau la bouche, me désarçonnant complètement. « Tu… Je… » Que je commence par dire, bafouillant quelque peu, avant de me racler la gorge et de me taire l’espace de quelques secondes. Ce qui est pour le mieux, finalement, parce qu’évidemment, j’avais la première intention de tenter de lui faire changer d’avis. J’ai toujours été comme ça, à ne pas supporter la vue d’un proche malheureux. Sauf que là, ce soir, c’est à cause de moi qu’elle l’est Leah et rester un peu plus ici ne serait pas la meilleure des solutions. « Ok Leah. » Ok, je vais la laisser seule, comme elle le désire. « Mais avant, n’oublie pas que je serais toujours là si t’en as le besoin. N’hésite pas. » Il n’y a rien qui change de mon côté, j’ose espérer qu’elle le comprendra et que, de son côté, elle pourra faire abstraction de toute cette histoire.