i lose my cool when she steps in the room. (noor)

Je lâche un soupir en regardant l’heure sur le réveil. Ça ne fait qu’une demi-heure que j’attends et j’ai l’impression que ça fait une éternité en réalité. Calista m’a dit de l’attendre bien sagement dans sa chambre, elle avait un truc à faire et devait être rapide. Sauf que je suis du genre à toujours devoir faire un truc, sinon je m’ennuie bien vite. Comme maintenant, tellement que je finis par fouiller un peu dans les livres qu’elle a laissé ouvert sur son bureau, lisant les petites annotations qu’elle a gribouillé en plus et qui sont relatif à notre quête. Rapidement, mon attention est captivée et je crois avoir mis le doigt sur quelque chose en zieutant dans deux bouquins à la fois, quand j’entends des bruits de pas dans le couloir. Je n’attends pas plus pour déposer les livres et marche vers la porte de sa chambre. Je l’ouvre, m’attendant à tomber sur la jeune femme et non sur quelqu’un d’autre, et commence ma tirade directement. « Dis donc, t’as été longue, j’ai peut-être une idée pour le... » Mais je me stoppe lorsque mes yeux se posent sur une silhouette qui ne m’est pas étrangère. C’est même le contraire et, non, il ne s’agit pas de Calista. Celle qui se tient face à moi, s’étant arrêté dans sa démarche, avec un visage tout autant étonné que le mien, c’est Noor. Cette fille que j’ai rencontrée dans un bar et avec qui j’avais passé une nuit bien chaude. Surtout un matin mouvementé, avec la découverte de cette capote qui n’avait pas tenu le coup. Je la détaille en silence, me remémorant ses courbes que j’ai appris à connaître ce soir-là, des images me revenant régulièrement en tête depuis cet instant qu’on a partagé. Bon dieu, qu’est ce qu’elle est belle... « Euh... Salut. » Je dis en tentant de me reprendre tout en essayant de briser la glace, bien qu’un simple "salut" n’est pas ce que je peux sortir de plus intelligent. En même temps, il ne fallait sûrement pas s’attendre à mieux. Je suis pris de cours, je ne m’attendais pas à retomber sur elle ici... D’ailleurs, comment ça se fait qu’elle soit dans cette maison ? Serait-ce l’une des colocataires de Calista ? Des questions dont j’obtiendrais des réponses assez rapidement, je pense.

@Noor Vargas-Calhoun

Sa journée à la laverie n’a pas été très mouvementée. Certes c’est rarement l’affluence, mais encore moins aujourd’hui. Pas même sa petite mamie habituelle pour venir lui tenir compagnie en lui racontant sa vie. Au moins l’avantage à ça c’est qu’elle a pu se plonger dans la lecture d’un livre qu’elle venait d’acheter, et dont elle n’arrive plus à décrocher. Même quand elle se fait remplacer en début d’après-midi et qu’elle monte dans les transports pour rentrer chez elle, son regard quitte à peine les lignes. Jusqu’à en louper son arrêt et devoir refaire plusieurs stations dans l’autre sens. Elle continue de tourner les pages quand elle monte jusqu’à l’appartement, laisse ses affaires dans l’entrée et prend la direction de sa chambre. « Dis donc, t’as été longue, j’ai peut-être une idée pour le... » La porte de celle de Calista s’est ouverte au moment où elle est passée devant et elle était tellement perdue dans ce qu’elle lisait, elle ne s’y attendait tellement pas, que ça lui a fait peur. Elle manque de faire tomber son livre, le rattrape de justesse comme elle peut et, dans un geste réflexe, place la main sur son cœur qui s’est légèrement emballé à cause de la surprise. Puis elle se tourne vers l’entrée de la chambre et pose de grands yeux étonnés sur l’homme face à elle. « Kenneth. » Jamais elle n’aurait pensé le voir ici. Jamais elle n’aurait pensé le revoir tout court en fait. « Euh... Salut. » Il y a une part d’elle qui est un peu paniquée, vu la façon dont ils s’étaient quittés après leur nuit ensemble et le fait qu’elle soit partie sans qu’ils aient le temps de vraiment en parler. Une autre part d’elle est heureuse. Elle s’était faite à l’idée qu’elle ne le reverrait surement jamais et peut-être qu’il ne le voudrait pas de toute façon, mais elle avait repensé à cette soirée plusieurs fois depuis. Et il y a la plus grande part d’elle, celle qui ne sait pas du tout comment réagir. « Que… Qu’est-ce que tu fais là ? Tu connais Calista ? » Question bête, ça semble évident, sinon il ne serait pas dans sa chambre. Se penchant légèrement elle jette un coup d’œil derrière lui et remarque qu’elle n’est même pas là. En fait, la question qu’elle se pose vraiment, c’est comment il la connait. Différentes solutions lui viennent à l’esprit, dont certaines qui la dérangent peut-être un peu, mais elle est sûr en tout cas qu’ils se connaissent bien, elle ne serait pas partie en le laissant là tout seul sinon.

S’il y a bien un endroit où je n’aurai pas pensé revoir Noor, c’était ici. Comment j’aurai pu le prévoir, en même temps ? La voir me laisse sans voix. Je panique, repensant à cette histoire de capote et pour laquelle j’ai été plus que lâche à ne pas chercher à la recontacter. Mais il n’y a pas que ça. Mes souvenirs me remontrent des scènes bien moins sages, ce n’est pas la première fois que ça se produit, et ça me perturbe. Pas les souvenirs en eux même, plutôt l’envie que j’ai de recommencer alors que je ne devrais pas avoir ce ressentit. Je ne fais pas l’amour comme ça, sans sentiment. Et pourtant, qu’est-ce que c’était bon... Ses baisers, ses courbes, ses gémissements... Oh bordel, il faut que j’arrête. Sa voix, toujours aussi mélodieuse à l’oreille, me ramène à la réalité et je la salue, tout simplement. Je ne peux rien formuler de plus, j’ai l’impression d’être en sueur tant la chaleur me prend... Quelqu’un a augmenté le chauffage ? Parce qu’il fait un peu plus chaud tout d’un coup. Elle est la première à m’interroger concernant ma présence ici, jetant un œil à l’intérieur de la chambre, vide. « Je suis l’un de ses élèves. » Une réponse simple, mais pourtant, j’ai la sensation qu’elle pourrait sonner bizarrement. Un élève et son professeur dans une chambre, seuls... Totalement bizarre. « On est ami aussi, on fait des fouilles ensembles, on devait en parler là d’où ma présence dans sa chambre. » Je suis littéralement en train de justifier ma présence dans cette maison, notamment dans cette chambre, celle d’une femme. Tout ça pourquoi ? Pour qu’elle ne puisse pas croire à tort qu’il se passe quelque chose entre Calista et moi, ni que je suis le genre de mec coureur de jupons. En fait, c’est surtout ça. Je ne veux pas qu’elle puisse penser qu’elle n’a été qu’une parmi tant d’autres, alors qu’elle a été la seule en six mois. Ce n’est pas rien pour moi, j’y pense tous les jours et ça ne fait que me troubler un peu plus. « Tu vis ici ? » C’est évident que oui, elle n’a pas sonné pour entrer et possède donc une clé. Calista n’est pas du genre à refiler ses clés à n’importe qui, sachant que sa fille est souvent à la maison. Je passe une main dans mes cheveux, me mordillant la lèvre inférieure. « Je voulais te contacter pour... Tu sais, cette histoire... Mais j'ai cruellement manqué courage. » Mon honnêteté me perdra un jour.

« Je suis l’un de ses élèves. » Elle savait que Calista était du genre plutôt cool et proches de ses élèves, mais elle ne se doutait peut-être pas à ce point-là, et évidemment cette réponse ne fait que la perturber un peu plus. « On est ami aussi, on fait des fouilles ensembles, on devait en parler là d’où ma présence dans sa chambre. » Ça ne devrait pas vraiment avoir d’importance et il n’a pas à se justifier, mais ça la soulage qu’il le fasse, et elle comprend en effet mieux pourquoi il est là. « Oh, ok. T’étudies l’archéologie ? » Et double ration de questions cons. Il vient de lui dire qu’il est l’un de ses élèves et Calista est prof d’archéologie, il ne faut pas avoir fait des études supérieures pour savoir que c’est évident. A moins que Calista soit douée dans un autre domaine dont Noor n’a pas connaissance et qu’elle donne des cours particuliers, mais ce serait étonnant qu’elle ne soit pas au courant de ça. Elle repense à la conversation qu’ils avaient eue au bar et dans sa tête les pièces s’emboitent, elle comprend encore plus son gout pour les voyages maintenant. « Tu vis ici ? » C’est là qu’elle se rend compte que lui aussi a toutes les raisons de se demander ce qu’elle fait là. S’il connait si bien Calista, il a déjà dû venir ici et ne l’avait jamais vue. Ce qui est normal, puisqu’elle n’habitait pas encore là. « Oui, depuis peu, j’ai finalement retrouvé l’adresse, comme tu peux le voir. » Avec un sourire elle fait référence à ce moment dans le taxi où elle avait oublié son adresse et s’était donc retrouvée chez lui. Mais sa façon d’essayer de détendre l’atmosphère n’est peut-être pas terrible et elle doute que ce soit une blague très drôle au final. « Je voulais te contacter pour... Tu sais, cette histoire... Mais j'ai cruellement manqué courage. » Légèrement ses joues rosissent, mais pas pour la raison qu’il doit imaginer. Ça n’a rien à voir avec cette fameuse "histoire", non, c’est de le voir se mordiller la lèvre en passant une main dans ses cheveux qui lui provoque cette réaction, parce qu’elle se remet à penser à sa propre main à elle dans ses cheveux à lui, pendant qu’il la comblait de plaisir, et à quel point elle aurait bien envie de retourner y plonger les doigts, là maintenant. « T’en fais pas, j’ai pas été exemplaire de ce côté-là non plus. » Pas du tout même, à partir aussi précipitamment de chez lui et à ne pas vouloir affronter le problème. « Oh et, pas d’inquiétudes à avoir, rien de neuf là-dedans. » Elle fait quelques petites tapes sur son ventre avec sa main et se sent soudainement ridicule. Mais pourquoi est-ce qu’elle lui annonce qu’elle n’est pas enceinte en faisant ça, et pourquoi est-ce qu’elle a l’impression d’être aussi troublée en se présence.

« Parce que Calista donne des cours dans un autre domaine ? » J’arque un sourcil, petit air amusé sur le visage. Je la taquine, bien entendu, ce n’est vraiment pas méchant. Je préfère toutefois me reprendre et répondre clairement, pour qu’elle ne se méprenne pas. « Oui, c’est bien ce que j’étudie. Et toi, t’es étudiante ? » Je réalise que je ne sais pas grand chose d’elle, voir rien en fait. Y remédier ne serait pas de refus, même si je ne sais pas si on va se revoir par la suite. J’aimerais bien que ça soit le cas, par contre, elle me plaît bien cette fille. Me répondant, elle en profite pour plaisanter en faisant référence à notre retour en taxi lors de la soirée. Je souris légèrement. « Je vois ça, en effet, et j’en suis ravi. Ça t’évitera de finir chez des inconnus à présent. » À peine ais-je prononcé la fin de ma phrase que je me mords la lèvre inférieure. Je suis un abruti fini, à insinuer que c’est limite son mode opératoire et qu’elle pourrait s’amuser à le faire de maintes et maintes fois. Alors que je ne pense pas ça d’elle, loin de là. Au fond, j’ai l’impression qu’elle s’est juste laissé entraîner dans cette relation charnelle cette nuit-là, comme moi. Parce que l’alcool avait pris le pas sur la raison, parce que l’attirance physique avait fait son œuvre. Avouant mon manque de courage, la brune a les joues qui rosissent, mais pas le temps de m’en préoccuper puisqu’elle me fait comprendre ne pas être enceinte. Son geste me fait légèrement rire, ça a pour effet de détendre la situation. « Tu me rassures, je n’osais pas te poser la question. Je craignais une autre réponse... » J’ai beau être un mec mature, responsable et droit dans mes baskets, un gosse, je ne pourrais pas gérer. Je ne suis pas prêt à être père, je n’en ai pas la fibre et ça me ferait bien trop flipper de faire tout de travers avec un gamin qui serait de moi. Surtout s’il est issu d’une relation d’un soir, j’aurai dû mal à y faire face, encore moins lorsqu’il faudra expliquer les choses à ce gosse. Jetant un rapide coup d’œil dans la chambre de Calista, et ne sachant toujours pas quand elle va revenir, mon regard se repose sur la belle avec une idée derrière la tête. « Est-ce que ça te tenterait qu’on passe un peu de temps ensemble ? Je ne sais pas quand elle revient et j’apprécie ta compagnie, alors je me dis qu’on pourrait discuter un peu. » J’apprécie ta compagnie... Pourquoi je lui sors ça moi ? Ce n’est pas déjà assez étrange comme situation, il faut que j’en rajoute ? Évidemment que je l’ai apprécié, sa compagnie. Mon corps se souvient encore de ses baisers, même après autant de temps depuis l’acte. Et pourquoi je laisse ce genre de souvenir me revenir en tête aussi ? J’aime me torturer, il faut croire.

« Parce que Calista donne des cours dans un autre domaine ? » Heureusement qu’il lui dit ça avec un air amusé, parce que sinon elle serait surement restée con, à se sentir très stupide. Mais puisqu’il la taquine, elle ne perd pas l’occasion de lui rendre la pareille. « Oh, tu sais, il y a un autre domaine qu’elle pratique beaucoup dans cette chambre alors... » Est-ce que c’est bizarre de plaisanter avec lui sur le sexe ? Vu l’intimité qu’ils ont partagée, elle imagine que ce n‘est pas trop gênant, et au pire, tant pis, ils ne sont plus à ça près niveau gêne. « Oui, c’est bien ce que j’étudie. Et toi, t’es étudiante ? » Elle secoue légèrement la tête pour répondre négativement. « J’ai jamais été très douée pour rester assise et concentrée bien longtemps. » Puis elle hausse les épaules, en espérant qu’il ne va pas la prendre pour une incapable. Elle aurait aimé, elle a même tenté, mais c’est comme ça, elle ne sait pas tenir en place, ce n’est pas fait pour elle. « Je vois ça, en effet, et j’en suis ravi. Ça t’évitera de finir chez des inconnus à présent. » Une réflexion qui la laisse sans voix et mal à l’aise. Elle ne sait pas trop comment le prendre. Est-ce qu’il pense que c’est une habitude chez elle de se comporter comme ce soir-là, ou est-ce qu’il le regrette tellement qu’il ne le souhaite pas à d’autre. « C’est mieux, oui. » C’est la seule chose qu’elle trouve à répondre, elle ne sait pas quoi dire de plus, et qu’est-ce qu’elle pourrait ajouter de toute façon, si c’est ce qu’il pense tant pis pour elle, c’est de sa faute. Ils en viennent ensuite à reparler de leur accident de préservatif et elle le rassure en lui annonçant qu’il y a finalement eu plus de peur que de mal. D’une façon un peu bizarre, mais au moins ça le fait rire. « Tu me rassures, je n’osais pas te poser la question. Je craignais une autre réponse... » Et c’est compréhensible. Elle a paniqué jusqu’à être vraiment sûre que tout ça n’avait eu aucune conséquence négative. Un enfant aussi jeunes et avec quelqu’un qu’on ne connait pas, ce n’est vraiment pas un truc à souhaiter. Alors elle lui répond avec un simple sourire rassurant, il n’a plus rien à craindre. « Est-ce que ça te tenterait qu’on passe un peu de temps ensemble ? Je ne sais pas quand elle revient et j’apprécie ta compagnie, alors je me dis qu’on pourrait discuter un peu. » Ses lèvres s’étirent un peu plus, elle est contente qu’il lui propose et de ne pas être la seule à le penser. « Ça me ferait vraiment plaisir. Et j’ai quelque chose pour toi au fait. » D’un signe de tête elle l’incite à la suivre et se dirige vers sa chambre. Elle pose son livre, récupère le t-shirt de Kenneth, avec lequel elle était partie sans s’en rendre compte, et lui tend. « Lavé et repassé. Je commençais à me demander ce que j’allais pouvoir en faire. » Peut-être à relaver au final, à moins qu’il veuille sentir la fille. Pendant un mois et demi il était resté sur le coin de son bureau, elle n’y avait pas touché. Elle ne sait pas trop pourquoi, parce que tout ce que ça a fait c’est lui rappeler à quel point elle avait été nulle et à quel point elle était déçue de ne surement jamais le revoir.

J’affiche une fausse mine de dégoût à l’évocation du fait que Calista pratique des choses sexuelles dans sa chambre. Beaucoup, qui plus est, de quoi bien traumatisé un jeune garçon saint et pur comme moi... Oui, bon, ce sont des conneries, ça ne me choque en rien. Je me doute bien qu’elle s’amuse de son corps comme tout le monde, même moi, je le fais. Mais malgré tout, je ne tiens pas à le savoir aussi clairement, pas alors que je l’attends assis sur son lit depuis tout à l’heure... Eurk. « Je n’ai pas très envie de savoir ça. » Que je lâche dans un premier temps, avant de changer complètement de ton pour un bien plus taquin. « Tout comme elle n’a sûrement pas envie de savoir que t’as couché avec son meilleur élève. » Oh non, ce n’est pas de la vantardise, ma prof elle-même m’a dit que je l’étais. Je tiens ses paroles de la principale concernée, source sûre et sans aucune prétention possible de ma part. Confirmant ce que la brune avait sûrement déjà compris, je la questionne en retour sur ses études et sa réponse me tire un petit sourire. « Pourtant, je connais un moment où t’étais assise et bien concentrée. » Mon ton se veut tout autant taquin qu’avant, un peu plus coquin aussi mine de rien, mais je tente de me convaincre que ce n’est pas le cas. Et que non, ce n’est en aucun cas du flirt qui se passe, juste une discussion en bonne et due forme. Malheureusement, je ne parviens pas à retenir des propos qui ont un effet négatif, totalement involontaire de ma part, et je m’en rends compte lorsque je la sens mal à l’aise. À mon tour, je me sens mal face à sa réponse, regrettant vraiment ce que j’ai pu lui faire croire. « Je ne voulais rien insinuer de déplacer, Noor. C’est juste que tu pourrais tomber sur quelqu’un de mauvais. » Quelqu’un qui ne serait pas aussi gentil que moi, en gros. Je n’aimerais pas un jour devoir lire les gros titres de faits divers en sachant qu’elle serait une des victimes citées. Ça serait vraiment dommage de perdre une femme aussi intéressante. La discussion dévie sur un sujet un peu plus sensible, la capote qui a craqué et le risque d’une grossesse non désirée. Fort heureusement, elle n’est pas enceinte et je me sens soulagé d’un poids immense. J’avais tellement peur qu’elle finisse par réapparaître dans ma vie, avec un gros bidon et un gosse à l’intérieur. Ça aurait été la fin de tout. Cette frayeur passée, je lui propose qu’on passe un peu de temps ensemble. Je ne compte pas attendre indéfiniment et seul le retour de mon amie et, au fond, je ne dis pas non à quelques minutes avec la belle Noor. Une proposition qu’elle accepte, ajoutant même qu’elle a un truc pour moi. Je fronce légèrement les sourcils, la suivant dans la direction indiquée, arrivant dans une pièce que je devine être sa chambre. Ok, qu’est-ce qu’elle a pour moi ? Je ne peux pas empêcher mon cerveau de se faire des films, jusqu’à ce qu’elle me tende un t-shirt. Le mien, je le reconnais au premier coup d’œil. Je souris à ce qu’elle prononce quand je le récupère de ses mains. « Je commençais à me dire que je ne le reverrais jamais. » Au pire, il aurait été entre de bonnes mains, j’en suis certain. Je prends ensuite le temps d’observer sa chambre, me sentant privilégié de pouvoir découvrir son univers. « Et du coup, tu fais quoi dans la vie ? » Petit retour en arrière dans notre conversation. Si elle n’étudie pas, elle fait forcément quelque chose à la place, non ?

« Je n’ai pas très envie de savoir ça. » A sa tête faussement dégoûtée elle se met à rire. Elle se doute qu’il n’a pas envie qu’on lui parle de ça et c’est bien la raison pour laquelle elle l’a fait. Se dire qu’il pourrait imaginer sa prof pendant qu’elle est en train de faire cours à sa promo, elle l’avoue, ça l’amuse pas mal. « Tout comme elle n’a sûrement pas envie de savoir que t’as couché avec son meilleur élève. » Petit froncement de nez à l’évocation de cette idée. Peut-être pas en effet, et même si ça ne la dérangeait pas de savoir ça, Noor ne va pas surement pas se risquer à lui en parler. Elle ne manque pas de remarquer au passage les fleurs qu’il se lance et ça la fait sourire. « Et t’es monsieur doué dans tout ce qu’il fait alors ? » Son regard est aussi évocateur que possible, il comprend surement bien où elle veut en venir. Après le sexe, parce qu’il est vraiment bon élève pour ça, très bon élève, c’est l’archéologie. Elle est curieuse de connaitre ses autres talents. Ou peut-être qu’elle devrait plutôt arrêter de tenter le diable et de se tenter elle-même à parler de ce sujet. La conversation revient sur les études, moins dangereux. « Pourtant, je connais un moment où t’étais assise et bien concentrée. » A nouveau elle rit, il marque un point. « Mais malheureusement, il n’y a pas d’alcool et de conversations avec des gens intéressants comme toi en cours. » C’est évident que si c’était le cas, elle n’aurait pas arrêté pendant sa deuxième année. Non pas qu’elle soit alcoolique, mais ça aide quand même pas mal à rester en place. Malheureusement ce n’est pas le cas, et écouter des profs parfois barbants pendant une, voire deux heures, qui râlent dès qu’ils entendent la moindre petite discussion, vraiment pas pour elle. Son manque d’aventure a fini par avoir raison d’elle. Le sourire qu’elle avait collé au visage depuis quelques minutes s’efface quelque peu après l’une de ses remarques qu’elle ne sait pas comment prendre. « Je ne voulais rien insinuer de déplacer, Noor. C’est juste que tu pourrais tomber sur quelqu’un de mauvais. » Pour se donner bonne contenance elle essaie de se reprendre et hoche la tête. « T’as raison. Enfin de toute façon, je crois qu’on m’y reprendra plus. » Oh elle l’avait aimée sa nuit avec Kenneth, ça elle ne le regrette toujours pas depuis qu’elle lui avait dit, mais le réveil, ça avait fait redescendre l’euphorie. Et faire ça ce n’est même pas son genre, d’habitude elle prend la peine de connaitre les hommes au moins un minimum avant d’envisager d’aller plus loin. Peu importe, sa bonne humeur revient quand il lui propose qu’ils passent un peu de temps ensemble et elle l’entraine dans sa chambre, en profitant pour lui rendre son t-shirt. « Je commençais à me dire que je ne le reverrais jamais. » C’est également ce qu’elle pensait et elle s’était un peu sentie comme une voleuse. « Tu lui manquais beaucoup. » Elle ne sait pas s’en empêcher, elle est obligée d’ajouter une connerie. « Et du coup, tu fais quoi dans la vie ? » Alors qu’elle lui fait un signe de la tête pour lui dire qu’il peut s’asseoir sur son lit, elle s’installe en face, sur sa chaise de bureau, une jambe relevée et l’autre la faisant légèrement tourner de droite à gauche. « Je travaille à mi-temps dans une petite laverie, pour le plaisir, aussi bizarre que ça puisse paraître. » Rares sont ceux à la croire, mais c’est bien vrai. Ce boulot elle n’en a pas besoin, si elle reste c’est uniquement parce qu’elle s’y sent comme chez elle et qu’elle aime passer du temps avec des gens qui sont à l’opposé de son milieu. « Et je suis proprio… du Barcade. » Petit détail qu’elle avait omis de lui préciser quand ils s’y étaient rencontrés. « La bouteille volée n’était pas vraiment volée. » Elle affiche un sourire qui se veut aussi innocent que possible, et surtout désolé. Elle s’en veut un peu de l’avoir laissé croire qu’il avait commis quelque chose de mal, mais sur le coup elle était vraiment trop cuite pour lui avouer et elle trouvait ça tellement amusant et excitant qu’elle n’avait pas pu s’y résoudre. Mais mieux vaut tard que jamais non ?

Le ton qu’elle emploie et le regard qu’elle me lance me font clairement comprendre à quoi elle fait référence. Sur le coup, je sens le rouge me monter aux joues. Je ne me connaissais pas aussi doué dans un lit. Certes, j’arrive à donner des orgasmes, mais c’est le cas de tous les hommes, non ? Décidé à ne pas me laisser perturbé plus que ça, je parviens à retrouver un teint qui se rapproche plus de la normale. « A ce qu’il parait, oui. J’ai beaucoup de talents. » C’est ce que les gens me disent, en tout cas. Visiblement, elle le pense aussi, bien que pour le talent qu’elle évoque, j’ai de légers doutes. Je ne me vois vraiment pas aussi performant, c’est l’alcool qui a embrouillé ses souvenirs de cette nuit, c’est obligatoirement ça. Elle rit de nouveau et ça me fait sourire. Elle a un rire réellement charmant et je me frappe mentalement pour l’avoir seulement pensé. Mon sourire s’élargit face à ce qu’elle dit, même si le côté concernant l’alcool pourrait la faire passer pour une alcoolique. Pourtant, je doute qu’elle le soit, elle n’en a pas l’air en tout cas. Je pourrais me tromper aussi. « Je te l’accorde et je n’en pense pas moins. » J’aime mes cours, ils sont intéressants et captivants, sauf qu’ils le seraient moins sans les professeurs dévoués et passionnants que j’ai. C’est un fait que je ne pourrais jamais nier. « Enfin, en ce qui concerne les conversations. » J’ajoute avec un petit rire. Ouais, l’alcool et moi, ça fait deux. Encore plus depuis la dernière soirée qu’on a passé ensemble Noor et moi, celle où j’ai bien trop bu. Depuis, j’évite encore plus les boissons alcoolisées, comme si en boire pourrait me foutre sous les draps avec une autre femme. Alors qu’au fond, je sais que ça n’arrivera pas et que si ça s’est produit avec Noor, c’était surtout car elle m’attire. Un attrait que je me force à oublier, en vain. Tentant par la suite de me rattraper d’un malentendu, je me contente d’hocher la tête à ses propos, comprenant totalement ses pensées. Moi aussi, je ne me lâcherais plus autant, c’était une pure folie quand je repense à ce qu’il a failli en résulter. Ce malentendu mis de côté, elle accepte ma proposition de passer du temps ensemble avec joie, me conduisant jusqu’à sa chambre. Une fois dans la pièce, elle me rend mon t-shirt et la petite bêtise qu’elle sort me provoque un léger gloussement. « Ah, il te l’a fait savoir ? » Que je lui demande, un sourire moqueur déformant mes lèvres, la questionnant ensuite sur ce qu’elle fait dans la vie. Me faisant signe de m’installer sur son lit, je m’exécute pendant qu’elle part s’asseoir sur sa chaise. L’espace d’un moment, je suis déçu qu’elle ne soit pas venue prendre place à mes côtés, mais je me ressaisis rapidement. C’est peut-être mieux qu’elle reste éloignée. Je l’écoute donc me parler de son boulot, fronçant les sourcils sous l’incompréhension. En quoi c’est bizarre un job dans une laverie ? Nul temps de la questionner qu’elle enchaîne, me faisant arquer un sourcil sous le coup de son annonce. « Je vois... Tu n’es donc pas une criminelle en herbe, c’est plutôt rassurant. » C’est la première chose qui me vient, petit sourire au coin des lèvres, avant d’avoir une toute autre réflexion en tête. « Pourquoi tu ne l’as pas dit dès le début ? Lorsqu’on a commencé à parler, dans le bar ? » Il est vrai qu’elle aurait pu m’en parler. Dans le même temps, je réalise qu’elle n’a pas conscience de mon âge, puisqu’elle a autorisé qu’on me serve de l’alcool alors qu’il m’est interdit d’en boire encore légalement... La fausse carte d’identité me revient en mémoire et je me mords l’intérieur de la joue. Il faut que je la joue cool, elle n’en saura rien et comme c’était la dernière fois que j’allai boire là-bas, tout ira bien. « Si t’es propriétaire du Barcade, pourquoi ce boulot à la laverie ? » Je me doute bien qu’elle n’en a pas besoin pour pouvoir vivre, l’argent ne doit pas être un réel souci avec le bar qui semble être toujours plein de monde. Tout ça m’intrigue, elle m’intrigue. Et je sais que je ne devrais pas m’intéresser autant à elle, parce que plus j’en apprends et plus elle devient encore plus plaisante. Attirante même. Ça me perturbe quelque peu. Physiquement, elle me plaît, c’est une certitude, et je crains qu’à force, ça devienne aussi le cas mentalement. Mais ma soif de connaissance est trop grande pour que je puisse me stopper dans ma découverte de sa personne, quitte à y laisser des plumes.

« A ce qu’il parait, oui. J’ai beaucoup de talents. » Il a eu l’air un peu gêné de ce qu’elle venait de dire et ça l’amuse. Elle se rappelle de ce moment où elle avait eu l’impression qu’il avait la pression, et elle se met à se demander s’il doute de ses capacités dans ce domaine-là. Si c’est le cas, elle ne comprend vraiment pas pourquoi. « T’es plus vantard que la dernière fois au bar, t’as bien appris ta leçon. » Ça aussi elle s’en souvient plutôt bien, cette histoire d’audace, qui avait été le déclenchement de tout finalement. « Ou bien tu préfères te vanter de tes talents que d’avoir réussi à passer du temps avec moi. » Elle fait mine de sembler dubitative et de réfléchir, les yeux levés en l’air et la main posée sur le menton, mais ce n’est que pour le taquiner. C’est loin d’être un exploit dont on peut être fier de lui parler, elle n’est pas extraordinaire, ni une célébrité, alors elle se moque bien qu’il ait eu envie ou non de le faire. Bon, ou il y a peut-être une toute petite part de son égo qui aimerait être flattée et ne s’en moque pas totalement. « Je te l’accorde et je n’en pense pas moins. Enfin, en ce qui concerne les conversations. » Ouais, mieux vaut oublier l’alcool, ce serait vraiment très loin d’être une bonne idée. Ils discutent encore un peu devant la porte de la chambre de Calista avant qu’il la suive dans sa chambre pour qu’ils puissent continuer à parler en étant posés. Et qu’elle puisse lui rendre son t-shirt. « Ah, il te l’a fait savoir ? » Avec vigueur, et un sourire amusé sur les lèvres, elle hoche la tête de haut en bas. « Il arrêtait pas de râler, je crois qu’il était en manque d’amour. J’ai failli le remettre et dormir avec pour le faire taire. » Plus elle parle et plus elle se dit qu’elle ferait mieux de se taire. C’est quoi cette technique de drague foireuse, il va finir par croire qu’elle est encore bourrée avec toutes ces conneries. Heureusement pour elle, la conversation dévie sur son boulot et elle lui avoue la vérité sur la bouteille volée pas volée. « Je vois... Tu n’es donc pas une criminelle en herbe, c’est plutôt rassurant. » Elle sourit en pouffant légèrement, consciente maintenant de l’image qu’elle avait dû lui donner. Vraiment pas glorieux tout ça, mais qu’il se rassure en effet, il n’est pas de mèche avec une délinquante. « Pourquoi tu ne l’as pas dit dès le début ? Lorsqu’on a commencé à parler, dans le bar ? » La question que les gens se posent à chaque fois qu’elle leur parle de ça, et elle peut les comprendre, ce n’est pas une information top secrète que les propriétaires de bar cachent souvent. « Il n’y a pas énormément de gens au courant. Mes amis proches, mes colocs, ça s’arrête là, à peu de choses près. Je crois que j’aime cette idée que l’identité du patron reste... mystérieuse. Je sais pas trop pourquoi, j’imagine que c’est dans ma personnalité de vouloir rester en retrait. » Et puis en plus personne ne vient la faire chier, personne n’essaie de faire ami-ami juste pour se faire payer des verres, les gens agissent avec elle comme si elle était une cliente lambda, comme eux, ça lui convient très bien comme ça. « Si t’es propriétaire du Barcade, pourquoi ce boulot à la laverie ? » Une question qui la fait sourire. Il va vraiment finir par la trouver bizarre avec tous ces trucs étranges. « A cause de mon père. » Pendant un instant elle hésite à en dire plus. Elle n’a pas envie de l’ennuyer avec ses histoires de famille et elle n’est pas sûre d’avoir envie de parler de certaines choses avec quelqu’un qu’elle connait encore si peu. Pourtant elle ne met pas bien longtemps à se décider à reprendre la parole, comme si avec lui, elle trouvait ça simple et d’un naturel déconcertant de raconter sa vie. Sans pour autant entrer trop les détails, ils n’en sont pas là. « En essayant de la faire courte, on s’entend pas lui et moi et c’était surtout un moyen de plus l’avoir sur le dos. Si je trouvais un job, il arrêtait de me faire chier, j’ai pris la première annonce que j’ai vue. Ça lui a quand même pas plus, la fille de quelqu’un comme lui pouvait pas bosser dans une laverie du sud de Williamsburg, c’était la honte. Alors il m’a mis un de ses bars sur les bras. J’ai dit ok pour avoir la paix, même si au final je regrette pas. Mais je me sentais bien à la laverie, même si tout le monde considère ça comme un boulot de merde, j’y ai rencontrées des personnes hyper attachantes et j’avais pas envie de partir. Du coup je suis passée à mi-temps pour pouvoir rester, j’ai rien dit à mon père et je crois qu’il a jamais su que je bosse toujours là-bas. » Quand elle finit sa phrase elle se rend compte du monologue qu’elle vient de faire et se mord légèrement la lèvre. Il n’avait peut-être pas envie qu’elle parle autant non plus. « Et toi, qu’est-ce qui t’a donné envie de faire de l’archéologie ? »