(alison), a miracle is not something to ignore.

Asteria Drake était la meilleure amie d'Alison. Sa seule et unique meilleure amie fille, une des personnes qui comptaient le plus dans son cœur, avec son père et sa demi-sœur. En fait, pour Ali, Terry faisait partie de sa famille. Elle avait été là lorsque sa mère s'était suicidée après avoir passé deux ans en institut ; elle l'avait épaulée pendant la dépression de son père et elle avait également été là lorsqu'elle avait dû prendre la dure décision de quitter le seul homme qu'elle avait aimé de toute sa vie ... Et inversement, Ali avait été présente pour sa meilleure amie, même à des milliers de kilomètres l'une de l'autre lorsque la jeune Drake vivait en Australie. Ces années de séparation avaient d'ailleurs été dures pour Millstone, mais elle était aujourd'hui ravie de se retrouver dans la même ville que sa meilleure amie, maintenant qu'elle était retournée à New York. Tellement ravie qu'elle ne pouvait pas passer deux jours sans prendre de ses nouvelles par téléphone, pour lui rendre visite ou pour lui donner rendez-vous quelque part dans la ville. Une vraie chieuse, certes, mais elle rattrapait le temps perdu, et Asteria ne semblait pas s'en plaindre. Au contraire. Ainsi, c'est pour cette raison qu'Alison ne fut pas surprise de voir son amie débarquer à l'improviste à son appartement, un poil en bordel. Terry s'ennuyait probablement et en avait profité pour passer voir son amie, histoire de s'occuper, ou bien de s'ennuyer à deux. Oui, ça devait être la raison. « Ça va et toi, Terry ? » l'accueilla-t-elle avec le sourire, ravie qu'elle vienne la déranger en plein pendant son ennui mortel, qui se résumait à regarder un téléfilm pourri à la télévision. « Heureusement que t'as amené quelque chose pour me nourrir, parce que je suis pas sûre que je t'aurais laissé entrer sinon ... Venir chez moi sans t'annoncer à l'avance, en voilà des bonnes manières ! » la taquinait-elle en lui faisant signe de la tête pour qu'elle rentre. Une fois à l'intérieur, Alison prit la boite des mains de son amie et piqua un gâteau à l'intérieur, toujours avec le même sourire. « Tu me gâtes aujourd'hui ! » Elle faisait référence aux gâteaux qu'elle avait fait tout spécialement pour elle. Très bons gâteaux même ; Alison était déjà tentée pour en prendre un deuxième. « En quel honneur ? » Elle posait cette question un peu sans attendre de réponse. Asteria et Alison n'avait pas forcément de raisons à avoir pour vouloir se voir ni même se faire plaisir. Ceci dit, Alison était une gourmande ... et il n'y avait pas meilleur moyen pour lui faire plaisir. Terry avait tapé dans le mille.

Dans une vie, on peut avoir une centaine d'amis, la plupart seront des amis de passages qui embellissent notre vie un instant et qui disparaissent aussitôt. Puis, il y a ceux qui nous marquent à vie, ceux qui, quoiqu'il se passe, seront toujours là, à nos côtés. C'était ce qu'était Asteria pour Alison, une amie à vie, sa meilleure amie, une partie d'elle qu'elle avait gardé malgré les kilomètres qui les avaient séparé et malgré qu'elles n'aient pu communiquer qu'à travers des lettres durant plusieurs années, sans même pouvoir s'appeler une seule fois avant que mademoiselle Drake quitte son établissement de torture, comme l'appelait Ali. Après avoir traversé autant d'années aussi loin l'une de l'autre, on pouvait admettre que la relation d'amitié de Terry et d'Ali était forte et résisterait à toutes les épreuves. Elles étaient ainsi destinées à rester des amies jusqu'à la fin de leur vie, deux vieilles qui se rendent encore hebdomadairement visite et qui se racontent encore les potins du coin. Du moins, c'est tout le mal que se souhaitait Alison, bien qu'elle était encore loin d'avoir l'envie de vieillir et de vivre avec ses dix chats, animaux de substitution efficaces d'un homme qu'elle ne trouvera probablement pas d'ici là, résultant de son problème notable d'engagement sentimental avec un autre homme que Jordan. Jordan, qu'elle avait pourtant quitté il y a trois ans de cela. Oui, une femme, c'est parfois très con, je vous l'accorde. Mais si elle l'avait fait, c'était pour se protéger. Et aujourd'hui elle se protégeait tellement qu'elle n'arrivait même plus à aller plus loin dans une relation avec un homme qu'un (ou plusieurs) passage(s) sous la couette. Bref. En voyant Terry au pas de sa porte, Alison l'avait accueilli dans son chez soi avec une touche d'humour qui la définissait bien. « Tu me connais tellement par cœur. » répondit-elle à Asteria lorsqu'elle fit mine d'avoir fait les gâteaux dans le but de se faire pardonner d'arriver chez Ali à l'improviste. La jeune Millstone était plus que ravie de ce cadeau, gourmande qu'elle était, elle attaquait déjà le panier apporté par sa meilleure amie. Tellement elle bouffait des conneries, Ali se demandait parfois comment elle ne faisait pas pour ressembler à une baleine échouée, mais il fallait croire qu'elle avait un bon organisme qui lui permettait d'éliminer sans trop faire d'efforts. Une réelle aubaine pour la glouton qu'elle était. « Bien sûr que tu as le droit de me faire plaisir ! Mais si tu veux t'améliorer, je te conseille de faire la même chose tous les jours avec à chaque fois une nouvelle recette. » Exigeante, Alison ? Rien qu'un peu. Elle blaguait bien évidemment, le sourire aux lèvres, alors qu'elle s'installait dans son canapé qui occupait une bonne place dans sa pièce principale. Elle fut interpellée quand Terry avoua finalement avoir quelque chose à lui confier. En général, quand elle avait quelque chose à lui dire, elle lui disait tout simplement. Si elle annonçait qu'elle devait lui parler, c'est qu'elle avait quelque chose à lui annoncer de plus important que de simples potins sur sa voisine. « Qu'est-ce que c'est ? » Son amie lui paraissait nerveuse d'un coup, comme si elle avait peur de lui communiquer l'information qu'elle détenait. « Tu me fais peur. » dit Alison en rigolant quand même un peu nerveusement, commençant à s'imaginer un tas de trucs qui pourraient la tracasser de la sorte.

Alison avait traversé de sacrés épreuves dans sa vie. D'abord, il y avait eu l'internement de sa mère dans un institut, après de longues années de dépression sans que son père ne puisse se remédier à l'y mettre. Puis, s'était suivi le moment le plus noir de sa vie, le suicide de sa mère, deux ans après qu'elle ait été admise dans l'établissement. Une épreuve dure, triste, beaucoup trop réaliste. Une épreuve qu'elle aurait voulu vivre en se serrant les coudes avec son père, malheureusement, ce dernier s'est plongé dans un état de dépression, laissant sa fille se débrouiller seule et gérer seule son chagrin. La blonde avait eu du mal s'y faire les premiers mois, puis, petit à petit, elle avait réussi à devenir une jeune fille indépendante par elle-même, une adolescente débrouillarde qui n'avait besoin de personne, ou presque, pour se gérer. Son père avait finalement fini par sortir de son état dépressif en rencontrant sa nouvelle compagne. Alison pensait que rien ne pouvait l'atteindre à partir de ce moment-là, car elle s'était forgée un caractère assez fort pour pouvoir faire face à toutes sortes de choses. Ce qu'elle n'avait pas prévu, c'était de tomber amoureuse. Un homme, plus vieux qu'elle, certes, mais le seul et l'unique qui avait réussi à lui faire tourner la tête. Alors oui, l'amour c'est beau, mais Alison avait vite déchanté quand elle a commencé à souffrir des déplacements de Jordan. Folle amoureuse de lui pendant des années, oui, mais peut-être un peu trop folle de lui. Le fait de ne pas le voir pendant ses déplacements la rendait triste, beaucoup trop triste, au point qu'elle s'est imaginée à la place de sa mère, tellement dépressive qu'elle avait fini par se donner la mort. La peur de ressembler à sa mère l'avait hantée, et même si elle aimait Jordan de tout son cœur, elle avait fini par le quitter, en espérant que la souffrance de la rupture serait moins grande que la souffrance permanente de ses déplacements. Alors oui, Alison avait traversé de sacrés épreuves dans sa vie, mais Asteria avait toujours été là. Pour la conseiller, pour la consoler, pour lui remonter les bretelles ... Elle avait été là, que ce soit ici à New York ou par lettre lorsqu'elle était en Australie. C'est pourquoi Ali la considérait comme sa meilleure amie, elles avaient tout vécu ensemble. Elles avaient tout partagé, et le feraient encore dans les années à venir, c'était certain. « Si je te paie avec tout l'amour que j'ai pour toi, c'est suffisant ? » Oui parce qu'Ali n'était pas capable de débourser un salaire aussi élevé que la librairie, certes, mais elle en avait, de l'amour à revendre ! Et pour des gâteaux, elle pouvait être très affectueuse. La blonde restait stoïque lorsque Terry lui avait annoncé qu'elle avait quelque chose à lui dire. Ali s'imaginait le pire, comme d'habitude, sans doute parce que son amie avait pris son air sérieux qui annonçait clairement les problèmes. Terry commença à déballer son histoire, Alison attentive. Face à une telle histoire, Alison ne savait pas comment réagir. Les yeux ronds de surprise, elle regardait son amie, cherchant quoi lui dire. « T... Qu... T'es enceinte ? » Wow, vraiment perspicace Ali. « Je ne sais pas quoi te dire. » En fait, si, elle savait, mais ça partait dans tous les sens dans sa tête. Elle avait juste besoin de mettre de l'ordre. « Tu es contente ? » commença-t-elle, avant de rajouter hâtivement. « Enfin, je veux dire ... c'est génial, enfin un enfant c'est magique, et puis tu as l'âge d'en avoir, c'est tout à fait normal ... Mais comment tu l'as pris ? Rafe est au courant ? » La blonde parlait vite, mais sa meilleure amie était enceinte, ce n'était pas rien ! « Qu'est-ce qu'il en est de vous, du coup ? » Étaient-ils de nouveau ensemble ? Est-ce que cette grossesse posait un problème ? Alison voulait tout savoir.

Les deux blondes avaient tout vécu ensemble. Mais une grossesse ? Alison avait été loin de s'imaginer qu'Asteria puisse tomber enceinte aussi vite. Enfin, elle avait tout à fait l'âge de faire des enfants, c'est juste que jamais la jeune Millstone n'avait inclut l'option "enfants" dans leur vie. Elles étaient toutes les deux célibataires, certes, étrangement attachées à des hommes avec qui elles ne sortaient plus, mais célibataires. Il n'y avait alors aucune raison qu'une chose de la sorte arrive ... Et pourtant, si. Alison n'avait pas pensé que Rafe et Asteria puisse de nouveau coucher ensemble, même si ça semblait tout de même inévitable quand on y réfléchissait. Elle se rappelait des longues lettres que Terry lui envoyait d'Australie, lettres dans lesquelles elle lui parlait souvent de Rafe. Elle se rappelait de Rafe, resté à New York avec elle, souffrant avec elle de l'absence de leur blonde préférée. Leur attachement mutuel était une évidence malgré leurs multiples différents, et pourtant, Ali n'avait même pas envisagé que cela puisse arriver un jour. « Enceinte. » répéta presque machinalement la blonde alors que son amie acquiesçait qu'elle l'était. Oui, elle était enceinte. Ah. Elles étaient loin les années d’insouciance de leur enfance, loin des problèmes et des affaires d'adultes. Non, là elles étaient en plein dedans. La vraie vie. La vie où on doit faire des choix et grandir, prendre nos responsabilités. Jusqu'à cet instant, Alison n'avait pas eu un flash aussi aveuglant de la vie d'adulte ... Elle, la fêtarde qui sortait dès qu'elle le pouvait pour boire un coup avec ses amis et profiter de la vie. Elle qui était imprévisible. Elle qui prenait souvent du bon temps avec la gent masculine, parce qu'elle en avait l'envie et encore l'occasion. Mais jusqu'à quand ? Quand est-ce que la vie allait lui dire "stop, maintenant tu dois grandir !" ? « Mais, tu le veux maintenant, ce bébé ? » Elle savait bien que oui, au fond, Terry le voulait. Ou du moins, l'envie viendrait au fur et à mesure que son ventre grandisse. Elle en était sûre. « Je sais que c'est pas facile. Surtout pas entre vous. Mais ... peut-être qu'avec le temps, votre relation va s'apaiser. » Elle savait bien qu'ils avaient de nombreux différents, mais elle espérait que la venue de ce bébé, oui parce qu'il allait venir ça ne faisait plus aucun doute, calme un peu le jeu entre les deux ... « Mais quoiqu'il en soit, je serai toujours là pour toi. Ce bébé ... ce sera l'enfant le plus gâté du monde. » Elle posa sa main sur celle de Terry, pour la rassurer. Elle voyait que le sujet la tracassait, et ça n'en finirait pas jusqu'à ce que cet enfant soit mis au monde. Cependant, Alison serait là, à ses côtés, pour traverser cette épreuve, pour l'épauler pendant les moments les plus durs. C'était sa meilleure amie après tout, c'était la moindre des choses à faire. « Tu as fait une échographie déjà ? » Connaissait-elle déjà le sexe de l'enfant ? Le pouvait-elle au bout de trois mois ? Alison n'y connaissait rien en bébé. Peut-être que si elle n'avait pas quitté Jordan, elle aurait été la première des deux à en avoir, qui sait. Mais la vie est faite autrement que l'on ne l'imagine. Elle n'était plus avec Jordan, et, au vu de son mode de vie, elle n'était pas prête de se remettre avec quelqu'un et de fonder une famille.

Alison était encore dans le flou. Elle avait bien entendu, oui, que sa meilleure amie était enceinte, mais cela n'empêchait pas qu'elle avait du mal à imprégner l'information. La surprise était telle qu'elle ne faisait que partir dans tous les sens. Ses paroles étaient rapides, son cerveau lent. Elle comprenait cependant la difficulté de la situation : elle était enceinte d'un enfant dont elle n'avait pas voulu ; enceinte d'un homme avec qui elle avait des problèmes d'entente non négligeables. Terry était perdue, son regard, ses gestes, ses paroles le justifiaient à Alison. Elle était perdue, et semblait se sentir bien seule dans cette situation inédite. Mais Ali ne comptait pas lui laisser cette impression. Elle serait avec elle coûte que coûte. C'est à ça que ça sert une meilleure amie, par vrai ? « Ma pauvre. Ça n'a pas dû être facile de réfléchir à ces choses, seule. » dit la jeune Millstone lorsque son amie lui avoua avoir pensé à l'avortement avant de se rétracter. Elle aurait aimé l'aider dans cette décision, du moins pour la supporter du mieux qu'elle le pouvait. Seulement, elle n'était pas au courant à cette époque, mais elle se doutait bien que si Terry ne lui avait pas dit tout de suite, c'est que l'annonce était difficile pour elle. Probablement parce que cela rendait les choses plus concrètes. « Tata Ali en sera folle. » Elle n'avait jamais vraiment eu des enfants dans son entourage, elle n'avait alors jamais fait l'expérience de s'en occuper. Mais pour le bébé de Terry, elle apprendrait. Et elle savait qu'elle allait adorer. La jeune Drake sortit alors une photo de sa dernière échographie pour la montrer à Alison qui la prit dans ses mains pour mieux l'analyser. Elle identifia facilement le petit corps du bébé qu'elle arrivait à distinguer alors même qu'Asteria n'en était encore qu'au troisième mois de grossesse. « Ah oui, c'est bien le tien ... La ressemblance est frappante. » déclara la jeune femme en rigolant, pour la taquiner un peu. Et aussi pour détente un peu l'atmosphère. Maintenant qu'elle avait sorti son sac, Terry devait être soulagée. Du moins, Ali l'espérait. « Tu le sauras bientôt ? C'est quand ta prochaine échographie ? » Alison n'y connaissait absolument rien, tout ce qu'elle connaissait à propos des grossesses, c'est qu'au bout de neuf mois, si tout se passait bien, un enfant sortait du corps de la femme. Pour le reste, elle était dans le flou complet. Asteria, qui était, elle, obligée de s'informer, lui apprendrait probablement beaucoup de choses à ce sujet. « C'est qu'il a besoin de place le petit. » répondit-elle à sa meilleure amie lorsqu'elle lui confia grossir à vue de nez. Le sourire aux lèvres, Alison continua. « Tu me le montres ? » Son ventre, hein, pas son bébé. Elle ne savait pas si à ce stade là elle pouvait voir grand chose, ou même si elle pouvait sentir quelque chose bouger dans son ventre, mais elle voulait voir l'évolution du bébé sur le corps de sa meilleure amie. Comme si elle se projetait, s'imaginait en avoir un jour ... Enfin, pour cela, il fallait qu'elle arrête ses conneries et qu'elle se pose enfin avec quelqu'un. Mais ça, ce n'était pas encore d'actualité, bien loin de là.