(poppy & warner) + i'm a little drunk

Elle va devoir se résoudre à partager le lit de Warner. Pour la première fois après un peu plus de sept ans, ça lui fait bizarre. Forcément. Surtout que le contexte est très différent, et qu’il ne va rien se passer cette fois, mais quand même. Ca lui rappelle tout un tas de choses, et c’est pas spécialement le moment pour ça non plus. Elle est faible, c’est comme ça, elle a beau lui avoir dit que tout était clair pour elle, elle a du mal à s’en persuader ce soir. Au moins, avec un peu de chance, il n’aura pas beaucoup de mal à trouver le sommeil vu son état, et il restera tranquille. C’est tout ce qu’il lui faut pour la rassurer, parce qu’il faut quand même qu’elle dorme, et il est hors de question qu’elle dorme sur le canapé.« Non ça ira, j’ai plus ou moins confiance en toi. » C’est pas lui le problème en fait, c’est plutôt elle, mais inutile de le lui faire savoir. Même s’il n’est pas en état de réaliser ce que cela implique, elle ne veut prendre aucun risque. Heureusement, en voulant manger, il lui offre une distraction bienvenue. Ca retarde encore l’heure du coucher, et même si ça ne va pas leur occuper l’esprit longtemps, elle prend. Surtout que ça l’amène à l’interroger sur ce qu’il a fait ce soir, et c’est pas mal non plus comme idée pour s’occuper l’esprit et retarder le moment fatidique. Puis accessoirement, ça peut peut-être les aider avec cette histoire de clés. Sauf que pas vraiment en fait… Poppy reste pensive. « Bon ça nous donne deux endroits où aller voir demain, mais ça reste large. » dit-elle après un instant. Elle n’ira surement pas avec lui non plus, comme elle doit travailler, même s’il est suffisamment reposé, peut-être qu’il n’aura pas peur d’affronter une telle tâche. « Et décidément, ton charme légendaire opère toujours autant. » Même sur des hommes. Sur elle aussi, même si elle s’efforce de ne pas y penser. Elle est même curieuse de savoir s’il y a quelqu’un avec qui le courant passe bien pour lui, pour savoir s’il commence à aller de l’avant même si elle n’est pas sûre de vouloir le savoir. « Moi qui croyait que tu étais prêt pour passer à autre chose ? » demande-t-elle quand même tout en faisant mine de plaisanter.

Ce n’est pas lui le problème. Pas en lui qu’elle n’a pas confiance, même si elle a soudainement du mal à comprendre pourquoi il tient tant à dormir avec elle, autre que pour une question de confort. Un mois en arrière, il avait préféré dormir seul plutôt qu’avec elle, et là tout est différent ? Parce que ça ne compte plus peut-être ? Que ça ne veut plus rien dire ? Ou parce qu’il est bien trop fatigué pour s’en soucier ? Honnêtement, ce n’est pas en lui qu’elle n’a pas confiance, mais bien en elle. Elle n’a pas envie qu’il le prenne mal. « C’est plutôt en moi que j’ai pas confiance, pour tout t’avouer. » Elle ne sait pas pourquoi elle a décidé de lui dire ça, ça n’apportera rien de bon. Mais avec un peu de chance, il ne se souviendra de rien de tout ça demain. Ils ont un programme chargé demain, en plus du fait qu’elle doive aller travailler. C’était plus une façon de parler qu’autre chose, mais s’il y tient, elle pourra peut-être aller chercher ses clés avec lui, même si elle n’est pas convaincue qu’ils aient beaucoup de chances de les retrouver. « Si tu y tiens, je peux venir avec toi une fois que j’ai fini le boulot. » Avant, ce ne sera pas possible, elle va dormir aussi tard que possible, déjà qu’elle ne sait pas si elle va réussir à trouver le sommeil. Elle sourit quand il lui parle de son accent anglais irrésistible, et de son sourire ravageur. Tout ça oui, entre autres choses, ça a beaucoup d’effet sur les femmes. Elle la première, même si pour le coup, son accent est le même que le sien. « Et tu n’en joues absolument pas, bien sûr. » Il aurait tort de ne pas en profiter. Il est encore jeune, et il est enfin libre dans son esprit. Libre d’elle et de tout le mal qu’elle lui a fait. Il faut qu’il passe à autre chose, et elle ne peut pas lui en vouloir, c’est bien elle qui a provoqué tout ça. « Tu prends bien le numéro de qui tu veux, je ne suis pas là pour te juger. » Elle ne se gêne pas pour faire la même chose, même si de ce côté-là; c’est plutôt le désert en ce moment. Elle y arrive pas franchement, peut-être parce qu’elle n’arrête pas de se mentir à elle-même justement. « T’as toujours pas envie de dormir ? » Elle commence à fatiguer légèrement, contre toute attente. Ses yeux qui commencent à piquer et le fait qu’elle n’arrête pas de bailler depuis quelques minutes sont de bons indicateurs.

Il y a une différence entre penser à quelque chose, avoir envie de le faire, et l’entendre dire à voix haute. En l’occurrence, Warner a encore quelques capacités de compréhension, il faut croire qu’il n’est pas aussi atteint que ça. Il a réussi à venir jusqu’ici après tout. Mais bon, en même temps, elle n’a pas été très subtile. Elle va sans doute regretter de s’être montrée aussi candide avec lui, mais elle se dit qu’avec un peu de chance il ne se souviendra pas de ce qu’elle a dit. Après, elle n’est pas certaine de vraiment penser ce qu’elle a dit. Ou en tout cas, d’être prête à franchir le pas. Parce qu’elle en a envie, ça ne sert à rien de continuer à se mentir. Peu importe si elle n’a pas le droit de ressentir de telles choses, ou si elle a dit qu’elle était passée à autre chose. Il n’a qu’à pas la mettre dans une telle situation aussi. Il vient la voir elle alors qu’il a besoin d’aide, alors qu’il aurait pu appeler tout un tas d’autres personnes. Il tient à dormir avec elle, alors qu’il pourrait très bien se contenter du canapé. Elle sait bien qu’il n’est pas entièrement maître de lui, mais il pourrait faire un effort. Il n’a pas à jouer avec ses nerfs comme ça. « Si je te dis oui, tu vas dormir sur le canapé ? » Parce qu’elle peut lui dire tout ce qu’il veut si ça peut lui permettre de passer une nuit tranquille. Elle a bien peur que ça ne suffise pas, surtout qu’il sait très bien qu’elle ne fera rien, elle le respecte beaucoup trop pour ça. Le fait qu’ils doivent chercher ses clés ne lui occupe qu’à moitié l’esprit, elle sait qu’après avoir décidé de ce qu’ils vont faire, ils vont devoir aller se coucher, et ça ne l’aide pas plus de savoir que Warner use de ses charmes sur d’autres filles. Elle s’en fiche, elle est pas du genre à être jalouse, mais ils restent dans le même thème et ça, c’est loin de l’aider. Heureusement, elle commence à être vraiment fatiguée, et elle se dit qu’elle n’aura peut-être pas autant de mal que ça à dormir finalement. Elle n’est pas dupe, elle voit bien qu’il est en train de jouer la comédie, et elle ne comprends pas vraiment pourquoi. Mais elle ne pose pas de questions et se lève, se dirigeant vers la chambre de Solal pour prendre un t-shirt qui pourrait faire office de pyjama à Warner.« Tu sais, c’est drôle, mais je ne pensais pas t’entendre redire ces mots un jour. » Elle essaye de faire bonne figure en plaisantant mais bon, elle n’en mène pas large. Elle se dirige vers une seconde porte, Warner sur ses talons, et allume la lumière, laissant apparaitre son lit. « C’est pas très grand, mais d’habitude ça me suffit quand je suis seule. » Donc tout le temps en fait, elle ne ramène jamais personne ici. Elle ne sait même pas comment vont réagir ses colocataires demain matin s’ils voient Warner sortir de sa chambre. Elle lui tend d’ailleurs le t-shirt qu’elle a récupéré dans la chambre de Solal. « Tiens, si tu veux enfiler un truc pour dormir. » Il sera plus à l’aise.

C’est le moment, elle ne peut plus reculer à présent : ils vont aller dormir. Elle qui n’arrivait pas à trouver le sommeil se retrouve soudainement fatiguée. Ce n’est pas plus mal dans un sens, elle va directement réussir à s’endormir et n’aura pas conscience que Warner se trouve à ses côtés. Elle ne va peut-être pas passer une si mauvaise nuit que ça en fin de compte… Peut-être. En attendant, il est bien là, derrière elle, à la suivre jusqu’à ce qu’elle ne lui fasse découvrir sa chambre. Son lit n’est pas large, et forcément ils vont devoir se toucher. Heureusement qu’elle ne bouge pas trop pendant qu’elle dort, elle ne voudrait pas le mettre mal à l’aise, même si elle ne doute pas qu’il dorme bien. Vu son état, elle le voit bien avoir un sommeil lourd et reposant. Peut-être même qu’elle aura du mal à le réveiller demain matin. Elle détourne le regard lorsqu’il se change, sachant pertinemment que ça ne sert à rien. Elle l’a déjà vu sans vêtements, mais mieux vaut ne pas tenter le diable. Déjà qu’elle a réussi à s’en sortir sans trop de réaction de sa part lors de son aveu. « C’est pour que tu sois plus à l’aise. » Mais il fait bien ce qu’il veut, tant qu’il ne lui prend pas l’idée de dormir en caleçon, sans rien d’autre au-dessus. Elle a beau être fatiguée, ça ne fera que lui rappeler la situation dans laquelle ils se trouvent. Etant déjà en pyjama, elle se remet sous la couverture, du côté droit du lit. « Je dors plus ou moins au milieu maintenant. » Il y a bien longtemps qu’elle n’a pas dormi avec quelqu’un. Et se dire qu’il fait référence à une de leurs anciennes habitudes de couple, ça lui fait tout drôle. Elle se sent presque mal à l’aise, allongée là, alors qu’il s’allonge à ses côtés. Elle en a presque le souffle coupé tant elle se sent crispée, paralysée. Puis au bout de quelques secondes, sans prévenir, elle éclate de rire. « T’as pas à idée à quel point je me sens ridicule, là. » Elle a presque envie de se lever et de retourner au salon pour dormir dans le canapé. « Je sais pas si je suis capable de dormir avec toi Warner. Ca implique trop de choses. » Elle soupire, ferme les yeux, se pince l’arête du nez avec deux doigts de sa main droite. « Je sais pas si j’ai été très honnête avec toi la dernière fois, et je pense pas que ce soit le moment idéal pour t’en parler, mais c’est ta faute aussi. C’est toi qui débarque comme ça sans prévenir alors que t’aurais pu aller ailleurs, toi qui me prend au dépourvu alors qu’on essaye d’être amis. Tu le fais pas exprès, mais tu me rends vraiment la tâche difficile. » Elle n’a plus envie de rire pour le coup, et elle ne sait même pas à quoi ça va servir, tout ce qu’elle vient de dire. Elle se sent encore plus ridicule, alors elle tourne le dos à Warner et fixe le mur en face d’elle, éclairé partiellement par les lumières extérieures.

Elle ne sait pas quel est le déclencheur, exactement. Sa fatigue qui lui tombe d’un coup dessus peut-être. Ou le fait qu’il fasse référence à une de leurs habitudes, datant de l’époque où ils étaient encore ensemble et où tout allait bien. Lui rappelant une fois de plus ce qu’elle a perdu, et de sa propre faute en plus. Bien sûr, elle n’a pas la réaction la plus appropriée qui soit, puisqu’elle éclate de rire. Elle imagine à quel point Warner doit être perdu. Elle l’est elle-même, alors s’il lui demande de s’expliquer, elle va avoir beaucoup de mal. Cela dit, elle se retrouve à lui dire tout un tas de choses qu’elle n’aurait jamais dû lui dire. Mais elle n’a pas été honnête avec lui la dernière fois, et elle ne peut pas continuer à lui mentir. Ca n’apporte absolument rien de bon, la preuve en est ce soir. Si elle avait été claire avec lui dès le début, si elle lui avait dit que non, peut-être qu’elle n’était pas passée à autre chose finalement et que cette histoire d’amitié n’était pas une bonne idée, peut-être qu’il ne serait pas venu la voir ce soir. Ca l’aurait bien arrangée pour le coup, et maintenant voilà qu’elle se retrouve dans cette situation. Elle ne regrette pas vraiment de lui avoir dit tout ça, parce qu’il fallait bien qu’il le sache, et elle a juste peur d’entendre ce qu’il va répondre. Ce n’est sans doute pas le bon moment, parce qu’il n’est clairement pas en état, mais ça va peut-être le dé-saouler aussi. En tout cas, elle ne sait pas ce qu’elle préfère entendre. Qu’il lui dise qu’il ressent la même chose et que c’est dur aussi pour lui, ou bien qu’il n’y a aucun espoir et qu’il faut qu’elle se fasse une raison. Sans surprise, quand il prend la parole, il lui dit qu’il est désolé, et il ne peut pas l’être autant qu’elle. Elle se retourne alors pour lui faire face, et elle arrive à distinguer quelques uns des traits de son visage. Elle ne pensait pas assister à une telle conversation ce soir, mais ce n’est peut-être pas plus mal. Avec un peu de chance, il ne s’en souviendra pas demain. « Un comportement normal d’ami. » répète-t-elle en essayant de se rappeler toutes leurs interactions depuis qu’ils essayaient d’être amis. En soit, oui, il a raison, mais c’est tout ce que ces actions impliquent, les sous-entendus, qui posent problème. « Tu penses vraiment ce que tu dis ? » Elle n’a pas envie de le mettre encore plus mal à l’aise mais cette conversation est plus que jamais d’actualité, peu importe s’il n’est pas en état pour. Elle a peur que plus tard, ils l’évitent encore, comme ils le font depuis tout ce temps en fait. « J’ai pas envie que tu partes. » Pas seulement pour toutes ces raisons, mais il est pas spécialement en état de s’en aller.