a stitch away from making it and a scar away from falling apart / wyatt

Ça ne peut pas être en train d’arriver. Son pire cauchemar, juste devant ses yeux. Sa plus grande peur, et elle ne peut rien faire. Elle a bien essayé de fuir, mais ça n’avait pas fonctionné. Zach n’avait pas compris à quel point c’était important qu’ils partent rapidement. Mais après tout, comment aurait-il pu comprendre ? Il est trop jeune pour qu’elle lui ait déjà parlé de ça, et elle ne sait même pas si elle lui en parlera un jour. Aux yeux de Freya, mieux vaut avoir un seul parent qui vous aime plus que tout, fait de son mieux pour vous, plutôt que deux qui ne savent pas quoi faire. Il n’y a rien de pire que cette sensation d’abandon, de trahison de la part de ceux qui sont sensés vous aimer le plus au monde. Elle ne veut pas que Zach puisse un jour ressentir ça. Elle a essayé de mentir, mais elle réalise vite que ça ne fonctionnera pas. Face à elle, le pire est en train de se produire, et elle ne peut rien y faire. Wyatt va savoir qu’elle a menti. Qu’elle n’a jamais avorté comme elle lui avait dit. Qu’elle n’en a même jamais eu l’intention. Et qu’elle a gardé cet enfant sans rien lui en dire. Et si elle lui avait caché tout ça, c’était bien pour une raison. Il ne voulait pas d’enfant, elle ne lui en avait pas donné. Il ne voulait pas de cette responsabilité, alors elle l’avait assumée seule. Zach l’a appelée ‘maman’. Et Wyatt continue de poser des questions, même s’il sait déjà. Il sait pourquoi elle voulait fuir, pourquoi elle lui ment. « Parce que maintenant, ça t’intéresse de savoir ? » A quoi bon se trouver une nouvelle excuse, un nouveau mensonge ? Il sait. Mais ça ne veut pas dire qu’elle va lui faciliter la tâche. S’ils en sont là, c’est de sa faute à lui. C’était lui qui n’avait pas voulu de ce bébé qu’elle avait dans le ventre. « Ça serait nouveau tiens. »

Wyatt ne sait pas ce qui l’agace le plus : qu’elle continue d’essayer de lui mentir ou qu’elle le prenne pour un idiot. Sans doute un mélange des deux. Il y a certains points sur lequel il ne brille pas spécialement, parfois un peu naïf ou aveugle, mais le flic est loin d’être stupide. Ce n’est pas seulement le fait que le garçon l’ait appelé maman que le lui a fait comprendre, c’est que Freya tente de fuir avant qu’il ne le remarque et cette ressemblance entre la mère et le fils. Avec lui aussi s’il regarde de près le garçonnet reparti jouer. Il sent la colère monter mais se contient. Il n’a pas envie de faire une scène devant tous ces inconnus mais il se sent bouillir de l’intérieur. Plus encore lorsqu’elle insinue que son intérêt est surprenant. Quand va-t-elle comprendre qu’il a eu le temps de grandir, de murir ces dernières années ? « Oui, Freya. » Débute-t-il sans cacher son agacement. Froid dans le ton qu’il emploi pour s’adresser à elle, il sait que son regard s’assombrit. Wyatt sent tellement la colère grandir en lui qu’il imagine parfaitement l’expression mauvaise dessinée sur son visage. « Oui ça m’intéresse de savoir si tu m’as menti y a six ans en me disant avoir avorté. Oui ça m’intéresse de savoir que si tu me repoussais tout ce temps c’était pour me cacher son existence. » Lance-t-il en désignant le garçon du doigt mais sans jamais cesser de la regarder. Il se sentait mal de l’avoir traité comme une moins que rien à l’époque, faisait tout pour se rattraper, peut-être même se faire pardonner, maintenant il ne sait plus vraiment ce qu’il ressent. Parce que finalement elle n’est pas aussi blanche que ça dans cette histoire. Peut-être même un peu hypocrite finalement. « Tu pensais que ça allait durer combien de temps exactement ? » Pas certain de vouloir connaître la réponse, Wyatt le lui demande quand même. Parce qu’une part de lui voudrait savoir combien de temps elle aurait été capable de lui mentir, de faire en sorte qu’il ne sache jamais qu’il a un fils. « J’étais pas prêt à accepter à l’époque, ça te donne pas le droit de me cacher que j’ai un fils. » Insiste-t-il, haussant un peu plus le ton. Il sait que ça n’est toujours pas une excuse, mais en voyant le brun tout faire pour se racheter – malgré leurs disputes à chaque fois qu’ils se croisent – elle aurait peut-être pu envisager que son avis n’est plus le même. C’est son fils après tout, il a le droit de savoir.

Elle se sent terriblement mal. Beaucoup trop. C’était la pire chose qui pouvait arriver. Wyatt sait. Depuis leur rupture, elle avait fait en sorte que ça reste secret. S’il ne voulait pas de cet enfant, alors pourquoi l’informer de son existence ? Il avait été clair là-dessus, elle ne voit pas pourquoi elle aurait changé d’avis. Alors oui, elle s’étonne qu’il en ait quelque chose à faire, parce qu’il avait bien dit il y a quelques semaines encore qu’il n’était pas prêt pour un enfant. Il reste calme, parle doucement mais son ton est froid et ses mots durs. Ce n’est pas surprenant qu’il lui en veuille, mais Freya s’en fiche. Si elle s’en veut, c’est simplement de l’avoir laissé le découvrir. Elle estime qu’elle était dans son droit en lui cachant tout ça. Qu’est-ce que ça aurait changé de toute façon ? Se serait-il forcé à rester s’il avait su qu’il était déjà trop tard pour qu’elle avorte et qu’elle n’aurait jamais pu abandonner cet enfant ? Non, Freya pense qu’il serait parti quand même. C’est facile de lui dire d’avorter et de se tirer ensuite. Trop facile. « Je ne voulais pas te voir non plus, si ça peut te rassurer. » Oui, c’était en partie pour éviter qu’il apprenne pour Zach, mais même sans son fils, elle ne voulait pas lui pardonner ou passer du temps avec lui. Après tout, elle lui en veut toujours. Elle ne comptait jamais lui pardonner, et encore moins lui parler de leur fils. Alors elle ne répond pas quand il lui demande combien de temps elle comptait garder le secret. Si elle ne lui avait jamais rien dit, c’était pour une bonne raison. « Non Wyatt… » Elle s’interrompt, réalisant qu’elle parle un peu trop fort. Elle ne veut pas que Zach entende tout ça. Ou même les autres parents autour d’eux. « Non, tu n’as pas de fils. Zach est mon fils, pas le tien. Tu n’en as pas voulu je te rappelle. Ce que j’ai fait ensuite ne dépend pas de toi. » Non, après leur rupture, elle avait pensé à elle, et à ce petit être qui grandissait en elle, prenant déjà beaucoup de place. « On se porte très bien sans toi, on l’a toujours fait. Et ça ne changera pas. » De quel droit la juge-t-il, alors que c’était sa décision ? Lui dire d’avorter ne l’y obligeait pas. A partir du moment où il était parti, il avait perdu le droit à la vérité. Et si c’était à refaire, Freya referait exactement la même chose. A l’exception près qu’elle se serait faite encore plus discrète.

Incapable de ressentir autre chose que de la colère, Wyatt tente toutefois de se contenir. S’il est parvenu à ne pas attirer l’attention de trop de personnes pour cette arrestation s’étant plutôt bien passée, il devrait être capable de ne pas faire une scène. Du moins, il l’espère. Apprendre comme ça qu’ils ont bel et bien eu un fils, autant dire que ce n’est pas facile à digérer. Oh il peut comprendre qu’elle n’ait pas voulu aller dans son sens, lui-même s’en est beaucoup voulu par la suite. Il a été trop fier pour revenir vers elle la queue entre les jambes, c’est tout. Ce qu’il ne comprend pas ce qu’elle avait prévu de lui mentir probablement éternellement. Freya devait s’attendre à un miracle. Elle devait vraiment espérer qu’il ne l’apprenne jamais et pourtant la vie en a décidé autrement. C’est risible en un sens. Et agaçant aussi, parce qu’il fatigue d’accumuler pertes et trahisons depuis des mois. « J’en ai pas voulu et il est là pourtant, non ? » Il se garde d’ajouter qu’il n’en voulait pas sur le coup de leur dispute et de la panique, conscient que ça ne leur apportera rien à part peut-être du sarcasme de la part de Freya. « Tu peux dire ce que tu veux, mais si, il est mon fils. Et si, j’avais le droit de savoir, bon sang ! » Continue-t-il en haussant un peu plus le ton. Il n’a qu’à lever les yeux pour voir quelques regards se tourner vers eux. Alors il se calme autant qu’il le peut dans une telle situation. Sauf que ce qu’elle dit ensuite suffit à l’énerver plus encore. Passant nerveusement une main dans ses cheveux, il rit sans joie. « Ça ne changera pas ?! » Encore une fois il rit, toujours de façon sarcastique et nerveuse. Le pire est sans doute qu’elle est sérieuse en disant ça, qu’elle pense vraiment que ça va s’arrêter là. Que ça va s’arrêter au fait qu’il sait maintenant avoir un petit garçon. « Tu plaisantes j’espère ? Et si dans une dizaine d’années il te demande qui est son père tu vas continuer de mentir ? T’as le droit d’être en colère pour ce que j’ai fait y a six ans, mais t’as pas le droit de m’empêcher de le connaître. » Bien qu’il parle plus discrètement, impossible pour elle de ne pas sentir toute la colère qui gronde lui. Elle allait faire quoi ? Continuer de vivre dans le mensonge, penser qu’à elle ? Sans compter que sa réaction date d’il y a six ans, n’a-t-il pas le droit d’être devenue une meilleure personne depuis ? « Crois-moi, tu veux pas jouer à ça avec moi. » Presque menaçant, son regard noir reste posé sur elle. Il sait qu’il sera incapable d’aller au bout de sa pensée, incapable d’aller jusqu’à utiliser la justice contre elle, mais ça Freya n’est pas supposée le savoir.

Freya est furieuse, peut-être plus contre elle que contre Wyatt. Mais tout de même beaucoup contre Wyatt. Il n’a pas le droit de lui faire des reproches, alors que c’était lui qui lui avait tourné le dos quand elle était enceinte. C’était lui qui avait fait ce choix de ne pas devenir père, et il n’a pas le droit de revenir là-dessus. De lui reprocher d’avoir menti. Une fois qu’il était parti, la décision lui revenait à elle, et à elle seule. Elle ne lui devait plus rien. « Parce que tu as tellement bien réagi quand je t’ai dit que j’étais enceinte de toi, c’est vrai. » Elle lève les yeux au ciel, trouvant Wyatt tout à fait ridicule. Comme elle aurait voulu qu’il ne sache jamais rien. Il ne mérite pas de connaître Zach, il avait renoncé à tout ça il y a bien longtemps. Freya se fiche bien qu’il dise avoir changé. Il l’a beaucoup trop déçue pour qu’elle change d’avis sur lui. Et au fond, personne ne change jamais. Pas vraiment. Oui, ils étaient jeunes quand elle était tombée enceinte, mais elle ne considère pas ça comme une excuse. Elle, elle avait bouleversé sa vie pour ce petit être qui grandissait en elle. Lui, il avait juste disparu. Alors non, elle ne veut pas de lui dans la vie de son fils. Même si biologiquement, c’est celui de Wyatt aussi. Et elle le lui fait savoir, ce qu’il n’apprécie pas, évidemment. Et sa réaction lui prouve qu’elle a raison. Le ton mauvais de sa voix l’effraie. Elle avait pourtant tout fait pour éviter ça. Peut-être qu’il n’est pas encore trop tard pour faire ses valises, réunir le peu d’argent qu’elle a de côté et s’enfuir. Mais Wyatt avait su la trouver à son travail, qu’est-ce qui lui dit qu’il ne saura pas recommencer ? « C’est une menace ? » Elle connaît déjà la réponse, et la peur se mélange à la colère en elle. Sur les papiers, il n’est rien pour Zach, elle n’a jamais déclaré son père parce qu’il n’en avait pas. Mais sans doute que légalement, il pourrait faire quelque chose. Elle n’a pas envie de le découvrir. « C’est exactement de ça qu’a besoin un enfant. D’un père qui ne voulait pas de lui et qui menace sa mère. » Pendant six ans, elle a craint ce moment, sans vraiment savoir à quoi s’attendre quand il arriverait. S’il arrivait. « Je n’ai pas besoin de toi, continue ta petite vie tranquille dans ton coin et laisse-moi me débrouiller. » Elle s’est parfois demandé ce qu’elle répondrait si Zach avait des questions sur son père, sans avoir la réponse. Pas facile. Mais elle préférait s’en inquiéter plus tard. Sauf que maintenant que Wyatt sait, tout risque d’être bouleversé. Parce qu’elle doute qu’il accepte de juste repartir. Pas vu sa colère. Aussi injustifiée soit-elle aux yeux de Freya.

En un sens, il comprend la colère de Freya. La dispute qui a mis fin à leur relation, liée à la grossesse imprévue, elle a été violente. Mais impulsifs comme ils peuvent l’être, ça n’était pas si surprenant. Wyatt, il avait paniqué et dans ces moments-là agir comme il se doit, il ne sait pas faire. Il n’y a que dans son travail qu’il est capable de garder la tête froide. Sa vie personnelle c’est loin d’être le cas. Peut-être qu’il aurait fini par accepter l’enfant, par revenir sur ses paroles s’il en avait eu l’occasion ? Maintenant il découvre qu’il aurait pu et il n’arrive pas à savoir de quelle façon réagir. Alors, comme à chaque fois, il se met en colère. C’est pour lui la réaction la plus facile à avoir. Agacé, il soupire de l’entendre lui rappeler encore cette fameuse dispute. Combien de fois devra-t-il répéter la même chose ? Est-ce qu’il va devoir le faire éternellement ? « Qu’est-ce que tu veux Freya ? Que je passe toute ma vie à te répéter que je suis désolé ? Que je le suis vraiment et que je n’aurais pas dû réagir comme je l’ai fait ? Ça apportera quoi ? Je ne peux pas changer la réaction que j’ai eu même si je culpabilise encore maintenant. » Sans parler du fait qu’il commence à fatiguer à force. Il a l’impression d’être un disque rayé, de répéter encore et toujours la même chose. Quand va-t-elle accepter le fait qu’il est désolé ? Va-t-elle le faire d’ailleurs ? « Tu ne me laisses aucune chance et quand je vois pourquoi … J’ai d’autant plus le droit d’en avoir une. » Mais il la connaît par cœur et sait très bien que ça ne sera pas suffisant pour que Freya accepte de lui en donner une seconde. Pourtant, il a essayé. Il aurait pu faire en sorte de lui prouver avoir changé si elle ne passait pas son temps à le mettre hors de lui. Si à une époque il trouvait ça assez sexy – au point que ça finissait toujours de la même façon – là il est simplement agacé. Alors lorsqu’elle lui demande s’il la menace, il reste d’abord silencieux, réfléchissant à ce qu’il va répondre. « Ça pourrait en être une si tu tiens vraiment à me tenir éloigné de lui. » Mais il n’arrivera jamais à lui infliger ça. Peu importe la colère ou même l’envie de connaître son fils, poursuivre Freya, la briser plus qu’il ne l’a fait à l’époque, il s’en sait incapable. « Si tu ne t’efforçais pas à me le cacher j’aurais pas à jouer sur ça. Et crois pas que je vais te laisser repartir comme ça maintenant que je sais. » Insiste-t-il, presque menaçant. Qu’est-ce qu’elle croit ? Qu’il va repartir chez lui bien sagement et prétendre ne pas savoir qu’il a un petit garçon de six ans ? C’est impossible. « C’est autant mon fils que le tien. Et tu le sais très bien ! » Une fois encore il hausse le ton, attire l’attention de trop de gens. Mais trop énervé pour s’en préoccuper, son regard sombre reste posé sur Freya. « C’est ça qui te fais peur, admet-le ! Tu aurais très bien pu me le dire à l’époque, attendre que je me sois calmé et me le dire. Mais tu sais que je serais resté et c’est ça qui te fais peur. » Il l’aurait fait et ça n’aurait pas été de la pitié. Il a tenu à elle. Il l’a sincèrement aimé mais a tout fait de travers. Si elle était venue lui dire qu’elle gardait l’enfant, il aurait fini par se faire à l’idée et par être là pour elle. Peut-être aurait-il essayé de recoller les morceaux aussi. Sauf qu’elle ne lui a rien dit et il est persuadé que c’était par crainte qu’il reste.

Lui demande-t-il vraiment ce qu’elle veut ? N’a-t-elle pas été assez claire à chaque fois qu’ils se sont revus ? Il avait fait le choix de sortir de sa vie, même si Freya l’avait peut-être un peu poussé vers la sortie vu sa réaction à l’annonce de sa grossesse. Ce n’était pas à lui de choisir d’y revenir quand cela lui chantait. Surtout avec Zach. Freya a toujours voulu que les choses soient stables pour son fils, plus qu’elles ne l’avaient été pour elle. Alors elle ne veut rien de Wyatt. Elle veut juste qu’il disparaisse à nouveau, comme il avait si bien su le faire il y a six ans. Elle veut qu’il reparte et fasse comme s’il n’avait rien appris aujourd’hui. Mais Freya n’est pas stupide. Elle sait que ça n’arrivera pas. Et ça la terrifie. Il la menace, et elle ne sait pas s’il en serait vraiment capable. Peut-être. Pourtant, il n’en voulait pas de cet enfant. De quel droit vient-il lui demander quelque chose maintenant ? Alors qu’il l’avait lâchement abandonné à l’époque, qu’il avait choisi la facilité plutôt que d’assumer. Elle trouve ses excuses complètement idiotes. De ce qu’il lui a montré jusque-là, Wyatt n’est certainement pas une bonne figure parentale. Et même s’il pouvait l’être, elle ne le voudrait pas. Zach est heureux ainsi. « Et qu’est-ce que tu comptes faire si je pars hein ? Me retenir de force ? Tu n’as aucun droit ici Wyatt. » Et s’il essaye, elle pourrait très bien se mettre à hurler. Elle préférerait l’éviter pour ne pas attirer l’attention de Zach, qui est reparti jouer tranquillement, sans se douter de ce qui se joue ici. Freya le regarde un instant, avant de se tourner à nouveau vers Wyatt, d’autant plus inquiète. Et voilà qu’il lui dit qu’il serait resté, s’il avait su. Elle lève les yeux au ciel et croise les bras sur sa poitrine, sans y croire une seule seconde. La première réaction est souvent la plus sincère. Et il avait dit tout ce qu’il ne fallait pas. A partir de là, pourquoi l’aurait-elle prévenu ? Pourquoi aurait-elle voulu d’un père qui ne voulait pas l’être pour son enfant ? Tout ça avait été bien assez compliqué à gérer pour elle, si elle avait dû attendre après lui, elle ne s’en serait jamais sortie. « Tu serais resté… mais oui, bien sûr. Tu avais été très clair sur tes intentions quand tu m’as dit de me faire avorter. A partir de là, on n’avait plus rien à se dire. Tu ne voulais pas être père, c’est tout. Et à choisir, mieux vaut ne pas avoir de père qu’un père pourri qui ne voulait pas de tout ça. » Peut-être qu’il serait resté, mais à quel prix ? Non, ce n’était pas ce que Freya voulait. Elle aurait voulu qu’il accepte dès le début, ou au moins qu’il ne refuse pas à ce point, et là, peut-être qu’ils auraient pu être heureux. Mais une fois qu’ils avaient rompu, c’était trop tard. « Alors non, Zach n’est pas ton fils. C’est mon fils, point. T’as eu le rôle facile, tu as juste eu besoin de planter une petite graine alors profites-en et laisse-nous tranquille maintenant. »

Même s’ils ne le voulaient pas, ils commencent à faire une scène en plein milieu du parc, en plein milieu de l’aire de jeux. Si les enfants continuent de jouer paisiblement, Wyatt sent déjà les regards des parents et des baby-sitters se poser sur eux avec plus d’insistance. Au début, ce n’était que des regards brefs, maintenant le flic sent bien que le débat qui l’oppose à Freya les rend d’autant plus curieux. Et il pourrait se calmer. Oui, il le pourrait, mais là il n’en a pas envie. Pas après une découverte aussi énorme qui vient bouleverser pas mal de choses chez lui. Et puis il est toujours aussi peu doué pour réagir aux évènements qui viennent tout chambouler. Lui qui aime que sa vie suive un chemin particulier – de préférence celui qu’il s’est fixé – il n’apprécie pas qu’un événement vienne le faire changer de trajectoire. Ça avait été le cas avec la grossesse de Freya. Impulsif et paniqué, il avait mal réagi. Ce n’est pas bien mieux là. « Je te laisserai partir, tu le sais très bien. Mais j’ai des droits, tu dois le savoir. » Lui, il connaît très bien la justice. C’est le milieu dans lequel il exerce et il n’a pas besoin d’être avocat pour connaître la loi. Pour savoir qu’il a des droits sur son enfant et qu’il aura de quoi faire pencher la balance en sa faveur. S’il doit en arriver là bien sûr. Lui espère que non. « Bon dieu mais tu veux bien arrêter de mettre en doute tout ce que je dis ?! » Lâche-t-il, exaspéré de l’entendre contredire tout ce qui peut sortir de sa bouche. « Je serais resté, oui. Parce que j’ai été con, que j’ai paniqué et que j’ai passé toutes ces années à regretter d’avoir réagi comme ça. J’ai regretté de t’avoir fait du mal et d’être la cause de notre rupture. Parce que je t’aimais vraiment et j’étais assez con pour te laisser partir alors que c’était la dernière chose que je voulais. » Comment est-il supposé lui faire entrer ça dans sa tête ? Elle pourrait simplement le croire pour une fois. Elle a été sa première relation sérieuse, celle qu’il aurait aimé pousser plus loin mais pas aussi vite, pas en impliquant aussi rapidement un enfant. Mais il aurait fini par s’y faire et sans doute même par être un bon père. Lui dire d’avorter, il n’aurait jamais dû, mais il ne s’était pas contrôlé. « C’était pas une question de vouloir ou pas, c’était une question de maturité et tu savais déjà à l’époque que j’étais impulsif. Tu ne m’as pas spécialement laissé le temps de digérer l’information. » Wyatt continu de croire qu’ils étaient tous les deux coupables. Pendant longtemps il s’est puni seul, mais maintenant qu’il sait qu’elle lui a caché l’existence du garçon, elle est bien moins parfaite à ses yeux. « Et si maintenant je tiens à connaître Zach, tu crois sincèrement que tu peux m’en empêcher ? » Demande-t-il plus doucement. Il est moins dur, à la fois dans son regard et dans le ton qu’il emploi. Ce n’est pas une menace, il tient vraiment à savoir si elle serait prête à tout pour empêcher au fils et au père de se connaître. Si elle le déteste à ce point-là.

La colère de Wyatt, elle ne parvient pas à la comprendre. Réagir ainsi alors qu’il lui avait dit d’avorter, qu’il ne voulait pas être père, c’est particulièrement hypocrite. Freya n’a jamais regretté sa décision. Elle n’a jamais regardé en arrière. Oui, elle aurait préféré que Wyatt réagisse autrement, et qu’au lieu de lui briser le cœur, il prenne ses responsabilités. Mais ce n’était pas arrivé. Et à choisir, elle avait préféré que son enfant n’ait pas de père plutôt qu’il en ait qui soit forcé. Elle n’avait jamais voulu forcer Wyatt, alors qu’elle, elle était déjà coincée. Elle ne lui avait pas dit qu’elle avait appris sa grossesse trop tard pour que l’avortement soit encore une option. Peut-être lui avait-elle offert une porte de sortie, mais c’était lui qui l’avait acceptée directement. Contrairement à elle, lui semble avoir des regrets. Grand bien lui fasse, ça ne change pas le passé. Et s’il l’aimait vraiment comme il le prétend, c’est peut-être même encore pire. Ça lui fait quelque chose à Freya, de l’entendre dire ça, même si c’est sous le coup de la colère. Même s’il est menaçant à la fois. Mais blesser ainsi quelqu’un qu’on aime, c’est encore pire. Ce n’était peut-être pas ce qu’il voulait et pourtant, il avait réussi à la perfection. Elle lui avait fait confiance, il avait été sa première vraie relation, et il lui avait brisé le cœur. « Pour quelqu’un qui regrette, tu as été étrangement silencieux. » Sans doute que Freya n’aurait pas voulu l’entendre, n’aurait jamais été capable de lui refaire confiance après cette dispute terrible. Mais de toute façon, il n’avait jamais essayé. Et six ans plus tard, il n’est plus temps de s’excuser, de regretter. Il faut juste passer à autre chose, et Freya voudrait le faire. Seulement, Wyatt ne la laissera pas faire, elle le sait. Malgré toutes les portes de sortie qu’elle lui offre, encore aujourd’hui. Elle ne lui a jamais rien demandé. Ni argent ni présence. Elle a tout assumé, et estime bien se débrouiller. « Parce que tu crois que moi, j’en ai eu du temps pour digérer l’information ? Tu n’étais pas le seul à être sous le choc, et pourtant tu as été le seul à devenir le pire des cons. » Se présenter ainsi comme une victime, ça ne fonctionnera pas avec elle. C’aurait été à elle de voir qu’il ne pensait pas ce qu’il disait ? Qu’il était sous le choc ? Elle aurait dû revenir vers lui après tout ce qu’il lui avait balancé ? Sûrement pas. « Et qu’est-ce que tu comptes faire si je t’en empêche ? » Le ton plus calme, peut-être qu’elle se résigne un peu. Malgré tout, elle n’a pas envie que Zach connaisse son père. Wyatt ne le mérite pas. Mais il a raison, il a des droits, et contre tout bon sens, la justice pourrait les lui reconnaître. Et Freya aurait sans doute plus à y perdre qu’à y gagner.

La vérité c’est qu’il commence à ne plus savoir quoi lui dire. Il s’est déjà épanché plus qu’il ne l’a jamais fait, se donne en spectacle alors qu’il déteste ça. Si ce n’est pas assez pour qu’elle comprenne à quel point tout ceci ne lui plait pas – et le touche – Wyatt ne sait pas quoi faire d’autre. Sans compter que cette situation est inconnue et que même s’il aurait bien besoin de conseils, non seulement personne n’est là pour ça mais en plus il sait qu’il aura trop de fierté pour en parler. Ou trop de honte. Comment va-t-il annoncer ça à ses parents ? A sa famille ? Leur dire qu’il a un fils dont il ne voulait pas au début et que maintenant il n’est pas autorisé à le rencontrer parce que sa mère le déteste ? Comment pourrait-il affronter leur regard ? Il sait qu’il ne fait que payer pour ce qu’il a fait à Freya quelques années en arrière, ça n’aide pas à accepter pour autant. « Ne fais pas comme si tu ne savais pas exactement qui je suis. » Lance-t-il, légèrement agacé. Si lui sait qu’elle a toujours eu un problème de confiance, elle sait qu’il n’aime pas s’étendre sur ses sentiments et que son orgueil fait qu’il se tait alors qu’il devrait parler. Sans compter que suite à leur rupture il s’est donné corps et âme dans son travail. Obnubilé par le besoin de la chasser de son esprit, il a enchaîné les missions, s’est même éloigné des siens. Une excuse parfaite pour ne pas courir le risque de tomber sur elle comme il n’arrête pas de le faire depuis son retour de Chicago. « Non, je sais bien que non. Et je ne dis pas non plus que tu as tort. Je n’ai pas seulement été le pire des cons, j’ai aussi été lâche et je pourrais jamais changer ça. Je peux seulement essayer de me racheter. » Sauf que Freya s’évertue à le repousser sans arrêt. Il comprend. Il comprend plus qu’elle ne le pense mais ce n’est pas pour autant qu’il baisse les bras. Et il sait aussi qu’il se bat un peu trop tard, qu’il aurait dû le faire des années auparavant, mais il le fait malgré tout. Tout comme il tente de se calmer, de paraître moins menaçant autant dans sa voix que dans son regard. « Je sais comment la loi fonctionne, mais Freya, je n’ai pas envie d’en arriver là. Je te demande juste de pouvoir le connaître. Si tu ne tiens pas à ce qu’on lui dise que je suis son père, très bien. On lui servira le mensonge que tu veux, mais laisse-moi au moins l’occasion de le connaître. » Qu’il puisse voir ce qu’il a manqué, à côté de quoi il est passé. Ça lui fera sans doute du mal de réaliser qu’il a tout manquer le concernant, il veut essayer quand même. « S’il te plait. » Ajoute-t-il plus doucement.