it's good to know that somebody cares. (eris)

Suite à la fin de l'appel avec Eris, cette dernière m’envoie un sms avec en contenu sa nouvelle adresse. Elle m’a appris cette nouvelle juste avant de raccrocher, me laissant sans voix. Elle a donc déménagé. Bon, en soit, ce n’est pas vraiment inattendu vu ce qu’il s’est passé, mais j’ai cru pendant un instant que c’est lui qui aurait quitté leur logement. Peut-être qu’elle est comme moi et que l’idée de vivre dans le lieu qu’elle a partagé avec son ex ne l’emballe pas. Il y a de fortes possibilités pour que ça soit, en effet. Prenant mes clés, je passe par la chambre de Reby pour lui dire que j’ai à faire, puis sors de l’appartement, refermant derrière moi. Hélant un taxi, je communique l’adresse au chauffeur une fois à l’intérieur du véhicule, et il prend la route. Les minutes défilent et je regarde les buildings défilés avant que ces derniers laissent la place aux maisons et aux lieux un peu plus familiaux du quartier ouest, jusqu’à ce que la voiture ralentisse et se stoppe. À en croire le gps du chauffeur, nous sommes devant la nouvelle demeure de la jeune femme. Je règle la note au mec, puis descend du véhicule et me dirige vers la porte de la maison, non sans observer la bâtisse en marchant. Elle est plutôt grande, elle n’y vit pas seule si ? Serait-elle riche elle aussi ? Des questions que je laisse au coin de ma tête lorsque j’appuie sur la sonnette près de la porte. Dans quelques minutes, je serais fixé de toute façon.

@Eris Casarei

Allongée sur son lit sur le ventre, Eris tente de décrypter les différentes feuilles constituant le mode d’emploi du dressing qu’elle doit monter. Elle ne peut pas continuer à laisser ses fringues « rangées » dans deux grosses valises. Soyons honnête, ce n’est pas une solution durable sur le long terme. Hier matin encore, elle a cherché une bonne dizaine de minutes le chemisier qu’elle avait décidé de porter. Oh, elle aurait tout aussi bien pu abandonner et enfiler autre chose. Ce n’est pas les options qui lui manquent mais elle est butée, Eris. Quand elle a une idée en tête, elle ne l’a pas ailleurs. Se frottant le front, elle finit par soupirer. Si un instant, elle a presque regretté avoir accepté le coup de main de Paco, à présent elle est plus que ravie – et soulagée – de savoir qu’il est en route. Ce dressing semble tout simplement impossible à monter sans aide. Heureusement qu’elle s’y connait en montage de meuble, Paco n’aura pas à faire la plus grande partie du boulot tout seul. Il manquerait plus que ça quand même, qu’elle le fasse venir pour le regarder faire.
Eris, quelqu’un est à la porte ! Ils sont vifs ces colocataires. Bien qu’elle occupe l’une des chambres du rez-de-chaussée, l’un d’entre eux est parvenu à atteindre la porte d’entrée avant elle. Il s’agit de Tommy qu’elle voit disparaitre tandis que Paco attend dans l’entrée. Lorsque leurs regards se croisent, elle lui sourit légèrement. Elle ne sait pas comment le saluer alors elle se contente de le faire verbalement. Salut Paco. Merci d’être venu. Bien élevée, la trentenaire ne peut s’empêcher de remercier le brun avant même qu’il ne se soit mis au travail. Elle n’oublie pas non plus que sa mère lui a appris à être une bonne hôte. Tu veux boire quelque chose avant qu’on s’y mette ? L’avantage de vivre à plusieurs, c’est qu’on ne manque jamais de rien. C’est l’un des premiers points positifs qu’elle a remarqué, elle qui avait l’habitude de retrouver un frigo vide en rentrant du travail, Newt et elle n’ayant pas des emplois du temps très stables.

Je poireaute un court instant devant la porte d’entrée, quand cette dernière s’ouvre enfin, laissant apparaître un mec que je ne connais pas. Je fronce légèrement les sourcils. Me serais-je trompé d’adresse ? « Mh... Je viens voir Eris, je suis au bon endroit ? » Autant le questionner pour en être sûr. Il hoche la tête, se retournant pour gueuler à la demoiselle que quelqu’un l’attends. Ok, je suis bel et bien au bon endroit. Une chose qui se confirme nettement lorsque je vois la jeune femme venir dans ma direction, lui souriant en retour. « Salut Eris, il n’y a pas de quoi. » Vraiment, ce n’est pas grand chose. Si je peux l’aider à moins galérer avec son dressing, pourquoi pas, ça me fait plaisir. Elle me fait entrer tout en me proposant un truc à boire. Je ne réfléchis pas bien longtemps à la question. « Un verre de soda, ou tout simplement de l’eau, ça m’irait. » Que je lui réponds avec un léger sourire sur les lèvres. À un autre moment, pendant une autre journée, je lui aurais sûrement demandé une bière ou tout autre alcool. Pas aujourd’hui parce que j’ai un vol très tôt demain matin et que j’ai pour principe de ne pas boire dans les 24h avant un vol. Question de sûreté vis-à-vis des analyses sanguines aussi, si jamais il devrait y en avoir. Suivant la jeune femme jusque dans la cuisine, j’en profite pour observer un peu les lieux, constatant que la demeure est réellement grande. Puis, repensant au mec qui m’a ouvert la porte, je lui demande : « Tu vis en colocation du coup ? » Ça semble assez logique, bien que ça pourrait ne pas être le cas. Je ne la connais pas vraiment Eris après tout, le mec qui m’a ouvert pourrait très bien être son nouveau copain, je n’en sais trop rien. Au fond, j'en doute, mais c'est une possibilité quand même.

Paco n’a pas mis très longtemps à arriver. Lorsqu’on connait la circulation à Los Angeles surtout à cette heure-ci – fin d’après-midi/début de soirée – c’est plutôt surprenant. Cependant, Eris ne s’en plaint pas. La brunette a envie de vite en finir avec la construction de ce dressing qui va certainement jouer avec sa patience. Alors, plus vite ils s’y mettront, plus vite ça sera fait. Cependant, la trentenaire n’en oublie pas ses bonnes manières pour autant, demandant au brun si il désire quelque chose à boire. Si il n’est pas trop difficile, il devrait trouver son bonheur dans le frigo plein à craquer de la colocation. Un verre de soda, ou tout simplement de l’eau, ça m’irait. Et autant dire qu’il n’est pas du tout difficile ou alors, il aime les choses simples. Je vais bien te trouver du soda. Suis-moi. D’un signe de tête, elle lui indique la direction à suivre pour se rendre à la cuisine. Puis, elle se met en marche. La cuisine atteinte, elle sort deux grands verres qu’elle remplit de coca. Elle ne manque pas de remettre une autre bouteille au frais ayant bien compris qu’il se vide à la vitesse de l’éclair si personne ne le remplit avec les produits en réserve. Tu vis en colocation du coup ? La brunette ne peut retenir une légère grimace alors qu’elle tend son verre à Paco qui s’en empare. Oui, cette maison serait bien trop grande pour moi toute seule ! Elle comprend pourquoi Tommy n’a pas souhaité la garder uniquement pour lui et son frère. C’est pas l’idéal mais j’avais besoin de déménager… vite. Elle s’apprête à lui expliquer qu’elle ne se voyait plus vivre dans la maison partagée pendant des années avec Newt mais elle s’arrête, se disant qu’il le comprendrait sûrement de lui-même. C’est tellement évident. Tu te souviens de Meghan ? Elle habite ici aussi. C’est  même elle qui m’a dit qu’une chambre était encore libre alors disons que c’est ce qui m’a poussé à accepter l’idée de la coloc. La présence de Meghan a clairement fait pencher la balance. La belle blonde rend cette colocation bien plus intéressante pour Eris. Avoir sa meilleure amie à l’étage de dessus, c’est franchement sympathique.

Je la suis donc jusque dans la cuisine, endroit où elle prend deux grands verres pour les remplir de coca. Je saisis le verre qu’elle me tend, ne pouvant m’empêcher de la questionner. Je souris légèrement lorsqu’elle évoque que la maison est trop grande pour elle seule, elle n’a pas tort. Elle m’explique ensuite pourquoi elle a déménagé, chose que je comprends sûrement mieux que personne et qui me fait grimacer, puis me parle d’une certaine Meghan. J’arque un sourcil, fouillant dans mes méninges à la recherche d’une personne avec ce prénom, me souvenant alors de la soirée avec Luis. La fille qui était arrivée avec Eris et qui avait parlé une bonne partie de la soirée avec mon ami. « Je m’en souviens, oui. Ça doit être sympathique de vivre avec une amie. » Je pense bien que c’est le cas, même si moi, je ne me vois plus vivre en colocation. Encore moins depuis ce moment où j’ai voulu me lancer dans un tel logement et que je me suis retrouvé nez à nez avec mon ex petite-amie. Un mauvais souvenir que je tente de chasser de mon esprit, ce n’est clairement pas l’endroit pour y songer. À la place, je préfère me replonger vers des choses plus amusantes, comme ce que je vis actuellement et avec qui. « Personnellement, je vis en colocation avec ma sœur et, parfois, j’ai l’impression de revivre mon adolescence à la maison avec elle qui me colle. » Je lâche un léger rire. Oh non, ne croyez pas que c’est totalement un enfer. J’adore Reby, c’est la prunelle de mes yeux cette femme, et vivre avec elle est une vraie source de bonheur. C’est juste que parfois, j’aimerais bien être seul. Après avoir vécu des années dans une maison avec une femme, en tant que couple, devoir cohabiter avec ma sœur, ça me fait une putain de sensation d’échec. Comme si j’avais raté ma vie et que j’étais retourné au point de départ. J’en arrive à croire que tout seul, je n’aurai peut-être pas la même sensation. C’est peut-être vrai, qui sait. Je bois une gorgée de mon verre, puis regarde de nouveau les lieux avec un peu plus d’attention. « Ça semble être une belle demeure en tout cas. Je te souhaite de t’y plaire. » Je lui souhaite vraiment de ne pas avoir le même goût amer que me renvoie ma situation actuelle. Peut-être qu’elle arrivera à passer outre, tout comme semble l’avoir fait mon ex visiblement... Et bordel, il faut que j’arrête de cogiter sur ce sujet-là, ce n’est pas le lieu adéquat et je ne suis pas ici pour ça.

Rapidement, Eris en vient à lui expliquer pourquoi avoir choisi la colocation et surtout cette colocation-là en particulier. Rien ne l’y oblige, évidemment mais ça vient si naturellement dans la conversation qu’elle ne se retient pas de fournir ces informations à son interlocuteur. Je m’en souviens, oui. Ça doit être sympathique de vivre avec une amie. Eris sourit un instant. Certes cela ne fait que peu de temps qu’elle a posé ses valises ici mais il ne lui en faut pas plus pour approuver les propos du brun. Vivre sous le même toit que Meghan l’aide à aller mieux. Sa simple présence rend les choses moins difficiles. Luis n’étant plus là, la belle blonde est clairement devenue son soutien le plus fort. C’est même la seule chose sympathique qui me soit arrivée ces derniers temps. Eris ne peut s'empêcher d'ajouter une pointe de sarcasme à sa remarque. Elle se permet même une petite boutade. Sans offense, hein. Parce qu’après tout, sa vie a déraillé le jour où elle l’a rencontré. Personnellement, je vis en colocation avec ma sœur et, parfois, j’ai l’impression de revivre mon adolescence à la maison avec elle qui me colle. Son rire vient se mêler au sien un instant. C’est bref mais ça fait du bien. C’est devenu si rare. C’est bien d’avoir quelqu’un. Je me demandais justement si tu connaissais du monde en ville. La vérité, c’est qu’Eris s’est posé tout un tas de questions à propos de lui, l’étranger qui est rentré un jour dans sa vie sans prévenir, porteur de mauvaises nouvelles. Il l’intrigue et au fond, il y a de quoi. Ça semble être une belle demeure en tout cas. Je te souhaite de t’y plaire. Machinalement, son regard balaye la pièce dans laquelle ils se trouvent. Elle finit par hausser les épaules. Ouais, c’est pas si mal. Amusée de sa propre nonchalance jouée et exagérée, elle finit par sourire. Tu me suis ? qu’elle lui demande une nouvelle fois avant de prendre la direction de sa chambre. Bon, je te préviens, ça risque d’être long et pénible. J’ai peut-être vu trop grand. Elle s’arrête un instant pour lui adresser une légère grimace. Une fois sa chambre atteinte, elle ramasse le mode d’emploi pour le tendre à Paco. A la fin, ça doit ressembler à ça. Elle pose un doigt sur la première page où se trouver un dessin du dressing monté. Tout est là, qu'elle ajoute en lui montrant les cartons entassés dans un coin de la pièce, bien séparés de ceux contenant ses affaires personnelles qu'elle n'a toujours pas jugé nécessaire de déballer. Et là, je paris que tu regrettes d'avoir proposé ton aide. Eris ne peut dissimuler un sourire quelque peu taquin, son regard amusé l'aurait de toute façon trahi.

Une petite moue boudeuse vient déformer mes traits, même si elle ne reste pas longtemps sur mon visage, bien vite remplacer par un sourire au coin des lèvres. « Bon, ça va, je ne le prends pas mal. » Il serait vraiment mal venu de le prendre mal, étant donné qu’elle ne raconte pas de conneries. Tout ce qui lui arrive depuis quelque temps n’est que tracas et souffrance. Je me sens toujours un peu responsable de ça d’ailleurs, alors que je ne devrais pas, ce n’est pas moi qui aie trompé quelqu’un et qui aie blessé Eris d’une façon aussi moche. Il n’empêche que, quelque part, je me dis que j’aurai pu me taire et peut-être que les choses se seraient arrangées pour elle et son ex avec l’arrivée de ce bébé. Une chose qu’on ne saura jamais. Les propos de la demoiselle me font ensuite arquer un sourcil. Elle s’interrogeait sur moi ? Tiens donc, intéressant tout ça. « J’ai quelques amis en ville, et puis ma sœur. » Je ne m’étends pas plus sur le sujet, elle n’a pas besoin de savoir que j’ai plus ou moins grandis ici, non ? Encore moins d’apprendre que mon ex est désormais à Williamsburg aussi, ça ne ferait qu’empirer les choses. Finissant son verre, la jeune femme me questionne, avant de se lever. « Je te suis. » Même si ça parait évident que je ne vais pas rester dans cette pièce. Je finis à mon tour mon verre, puis la suis en direction de sa chambre. Je l’écoute m’expliquer que ça sera long et pénible, fronçant légèrement les sourcils face à sa grimace, sans pour autant dire quelque chose. Autant écouter jusqu’au bout et j’aviserais ensuite. Je saisis le mode d’emploi qu’elle me tend, observant le dessin qu’elle me désigne du doigt, ouvrant ensuite le manuel pour commencer à le lire. Je m’arrête cependant pour jeter un coup d’œil aux cartons qu’elle me montre. Ah, mais… parce qu’elle n’avait rien débuté encore ? Pourquoi je lui ai proposé mon aide au fait ? Mon silence parlant sûrement pour moi, elle me lance une petite taquinerie et je ris légèrement. « Comment t’as fait pour lire dans mes pensées ? » À mon tour, je lui jette un regard amusé, souriant légèrement. Bon, je ne vais pas aller jusqu’à dire que je regrette, mais je ne m’attendais pas à ce que ça soit un aussi gros montage à réaliser. J’avais même eu la pensée -peut-être ridicule- qu’elle avait commencé à assembler les morceaux et qu’il ne restait que le plus gros, le plus difficile, à faire. Eh bien, non, en fait, il y a tout à faire. Du début jusqu’à la fin. Heureusement, j’ai du temps à perdre aujourd’hui. Je finis d’abord de lire le mode d’emploi de façon rapide, mais efficace, puis repose le regard sur la demoiselle. « Bon allez, trêve de plaisanterie. Où sont les outils ? Ce dressing ne se montera pas tout seul, au boulot. » Que je dis en remontant les manches de mon haut, prêt à en découdre avec ce meuble et lui montrer qui fait la loi. Intérieurement, je remercie mon défunt père pour ces week-ends à retaper des vieux meubles ou à peaufiner ses belles bagnoles. Sans ça, je ne serais sûrement pas aussi habile de mes mains dans ces domaines-là.

Bon, ça va, je ne le prends pas mal. A vrai dire, Eris n’avait pas envisagé ne serait-ce qu’une seule seconde que Paco puisse être vexé par sa remarque. Heureusement, ce n’est pas le cas. Ils n’ont pas besoin de s’écharper plus que nécessaire. Ils ont suffisamment à gérer chacun de leur côté. J’ai quelques amis en ville, et puis ma sœur. La brune se contente de hocher la tête. Une part d’elle a envie de profiter de cette perche tendue pour tenter d’en découvrir plus sur le brun mais quelque chose lui dit qu’il n’a pas vraiment envie de s’épancher. Alors, elle respecte sa décision et contient sa curiosité. C’est assez frustrant surtout pour elle qui a l’habitude qu’on réponde à ses questions mais elle sait qu’ici, ce n’est pas comme dans une salle d’interrogatoire, elle n’a aucun pouvoir.
Les voilà à présent dans la chambre de la trentenaire, prêts à s’attaquer à son nouveau dressing ou du moins, aussi prêts que possible. Eris tente de lui présenter la situation avec légèreté et humeur mais elle remarque bien vite que Paco ne s’attendait pas à quelque chose d’aussi imposant. Son silence en est la preuve mais elle est rassurée lorsqu’il reprend la parole. Comment t’as fait pour lire dans mes pensées ? Regard amusé, sourire aux lèvres, il n’a pas l’air de regretter sa décision au final et Eris profite de cette bonne ambiance pour répondre sur un ton tout aussi léger. C’est mon métier. Ce n’est pas qu’une bonne répartie : deviner les pensées des autres, les anticiper fait entièrement partie de ses tâches au quotidien. Bon allez, trêve de plaisanterie. Où sont les outils ? Ce dressing ne se montera pas tout seul, au boulot. Ok, Eris ne peut pas s’empêcher de rire légèrement en le voyant prendre un air si sérieux tout d’un coup. Les outils sont là, qu’elle répond en pointant une boite à outils. Et je sais qu’il faut commencer par ce carton. Tout en parlant, elle s’empare du carton désiré et l’ouvre. Donc si on suit le plan, il faut d’abord assembler ces deux planches là. Parler et agir à la fois, elle sait faire Eris et c’est comme ça que Paco se retrouve avec un tournevis dans la main, prêt à visser les deux planches ensemble. Planches qu’Eris maintient pour lui faciliter la tâche.

La chambre est vite rejointe, la demoiselle prête à me montrer la raison de ma venue et je ne suis pas déçu. À vrai dire, je ne m’attendais pas à quelque chose d’aussi volumineux et imposant, mais soit, j’ai vu pire. Puis, ce n’est pas un meuble qui va m’effrayer, je suis bien plus courageux que ça. Du coup, je prends la situation avec amusement, bien décidé à ne pas me plaindre, et c’est une sorte d’aveu que j’ai en retour. Elle évoque son métier, un sujet qui m’intéresse. Après tout, elle le connaît mon métier, alors que l’inverse non. « Quel est ton métier ? » Je suis intrigué à présent. Je veux vraiment en savoir plus sur elle, au moins sur le côté professionnel parce que ça impacte moins non ? Les questions qui rapportent aux sujets personnelles, c’est bien plus complexe à poser, surtout entre elle et moi. On ne peut pas dire qu’on est amis tous les deux, on se connaît par le biais d’un drame et c’est déjà beaucoup comme ça. Eris rit face à ma motivation, avant de me montrer la caisse à outils, puis elle commence les explications de la première étape du montage. Deux planches entre les mains, et un tournevis dans la mienne, nous voilà parti pour un début de construction. « Ça fait longtemps que t’as emménagé ici ? » Certains diraient que ma question est stupide, au vu des cartons non déballés, c’est forcément récent, sauf qu’ils auraient tort. Ça fait des mois que j’ai emménagé avec ma sœur et j’ai toujours des cartons encore fermés. D’une parce que je n’ai pas vraiment le temps de tout ranger, de deux parce que certaines affaires me font trop pensé à mon ex. Je ne tiens pas à voir ces choses-là, je ne le supporterais pas. Il n’y a qu’à voir ma réaction lorsque je l’ai revu en chair et en os, je ne suis tout simplement pas prêt. Un dernier mouvement de main me fait comprendre que la vis est à son maximum, les planches sont enfin fixées ensemble. « La première étape est faite, maintenant, la seconde. » Et je n’attends pas pour lire la suite du mode d’emploi, attrapant les vis qui serviront pour un autre élément du meuble, un que je ne vois pas hors du premier carton. Inévitablement, mes yeux se posent sur Eris. « Je crois qu’on a besoin du contenu d’un autre carton. » C’est même une évidence, sauf que je ne vais pas le déballer moi-même, je risquerais de me tromper de carton et on va peut-être éviter ça.

Il est étonnant ce Paco. Eris n’a pas l’impression que beaucoup d’hommes – ou même de femmes – seraient prêts à proposer leur aide pour un montage de meuble à quelqu’un qui n’est pas un ami ou une amie. Parce qu’ils ne le sont pas. Le truc, c’est qu’ils ne sont pas non plus des étrangers, ayant partagé suffisamment de choses pour dépasser ce cap-là. Alors, au final, Eris ne sait pas trop ce qu’ils sont, des connaissances certainement. A ses yeux, c’est ce qui semble le plus correct. Heureusement, peu de gens lui posent la question à part peut-être Meghan les rares fois où elle a abordé le brun dans la conversation. Difficile de ne pas l’inclure dans les discussions concernant sa récente rupture puisque sans lui, elle ne se serait certainement pas faite. En tout cas, il est là le jeune homme. Il l’aide à monter son meuble et bien consciente que son aide est plutôt précieuse, elle passe outre le fait qu’ils ne sont pas amis et que par conséquent, le fait qu’il soit, à lui filer un coup de main, ça pourrait paraître étrange. Quel est ton métier ? Alors qu’elle s’apprête à lui répondre, elle se ravise. Au lieu de ça, elle lui pose une autre question. Pourquoi j’ai l’impression que t’en sais plus sur moi que j’en sais sur toi ? Ce n’est pas un reproche, encore moins une impression. Il s’agit bien là d’une véritable question, certes posée sur un ton assez léger pour ne pas le mettre mal à l’aise. C’est peut-être parce qu’il a su pour l’infidélité de Jackson avant elle ou parce qu’il a été celui qui lui a annoncé sa grossesse. Bref, avec lui, elle a presque l’impression d’être vulnérable, exposée et elle n’apprécie pas tellement. Ça fait longtemps que t’as emménagé ici ? Cette question ci, Eris accepte d’y répondre. Quelques semaines. La question la fait réfléchir et elle trouve une réponse plus précise qui la surprend moi-même. Je suis arrivée début décembre. Ça m’étonne moi-même que ça fasse aussi longtemps. Presque deux mois, du coup. Le temps passe vite. Et toi, du coup, tu comptes rester en coloc avec ta sœur ou c’est une solution de secours ? Elle ne sait pas quel âge il a mais ils doivent être assez rapprochés. Alors, elle se dit que tout comme elle, la coloc n’était peut-être pas son premier choix.
Les deux premières planches sont rapidement assemblées comme le souligne Paco. La première étape est faite, maintenant, la seconde. Leurs deux regards se dirigent vers le mode d’emploi laissé ouvert non loin d’eux. Je crois qu’on a besoin du contenu d’un autre carton. La brunette se contente de hocher la tête et après avoir identifié le carton, elle l’ouvre et ils passent à l’étape suivante. Cette fois-ci, elle ne se contente pas de tenir les planches, elle place aussi les vis pour que Paco n’ait plus qu’à les enfoncer. Un vrai travail d’équipe et en un rien de temps, ils enchaînent avec la troisième étape.