Everything is better with donuts (Eris)

Les jours se suivent et se ressemblent. Malgré que l’unité soit à présent orpheline de son chef, elle n’en reste pas moins demandée. En ce moment même, ils bossaient sur un potentiel camp de redressement extrême. Apparemment, celui démantelé avec succès il y a quelques semaines ferait partie d’une « chaine » de quoi donner la chair de poule à la brunette. Elle a beau exercer au FBI depuis plusieurs années, elle ne s’habituera certainement jamais à ce qu’ils peuvent apprendre et/ou voir au quotidien. Si certains pourraient considérer ça comme une faiblesse, ce n’est pas son cas. Au contraire, elle ne veut pas s’habituer. Ça signifierait rendre toutes leurs affaires normales or il n’y a strictement rien de normal dans ce qu’ils combattent jour après jour. Ce n’est pas normal d’enfermer des gamins contre leur volonté et de les punir à coup de maltraitances physiques ainsi que mentales. Hélas, depuis la veille, ils pédalent dans la semoule. Rien n’avance et ça a le don de frustrer Eris qui n’a quasiment pas fermé l’œil de la nuit. Parfois, ses proches lui disent qu’elle est trop impliquée, qu’elle y met trop du sien mais comment pourrait-elle faire autrement ? Ce matin, sur le chemin la conduisant au poste, elle s’est arrêtée pour acheter des donuts. La bouffe, un excellent remède contre la frustration. Elle pense d’abord être la première arrivée avant d’apercevoir Aaron à travers sa porte laissée entre ouverte. J’espère que ces donuts sont pour moi et que tu ne viens pas parler de travail. Il ne perd pas le nord celui-là. Ces donuts sont pour toi… et moi. Je sais pas où sont les autres. Elle hausse les épaules. Si la boite est vide à leur arrivée, ça sera de leur faute. Les absents ont toujours tort. Elle pose la boite entre elle et le geek, sa tasse de café à côté. La deuxième, déjà. Ça me rend folle de stagner comme ça. On se repasse la vidéo de surveillance ? A l’heure actuelle, c’est la seule chose qui pourrait leur permettre d’avancer. Eris espère qu’hier, un détail leur aurait échappé, détail qu’ils remarqueraient aujourd’hui.

Lorsqu’ils sont sur une affaire aussi compliquée, ce n’est pas rare de voir Eris se pointer avec son petit-déjeuner au travail. Elle y voit un gain de temps. Au lieu de perdre de précieuses minutes à avaler son repas chez elle, elle le fait à son boulot, focalisée sur l’affaire en cours. C’est une nouvelle fois le cas aujourd’hui alors qu’elle partage ses donuts récemment achetés avec Aaron, son seul collègue présent dans les bureaux. Je crois que les autres sont pas encore arrivés. S’ils se plaignent parce qu’il y a plus de donuts on pourra toujours leur dire qu’ils avaient qu’à arriver plus tôt. Eris hoche la tête, approuvant les paroles du geek même si elle ne doute pas du fait qu’ils ne devraient pas tarder. Si certains ont beau ne pas être matinaux, dans ce métier-là, on ne choisit pas ses horaires. Dès qu’une affaire est en cours, les heures de travail se multiplient et on fait avec, c’est tout. D’ailleurs, instinctivement, ses yeux se posent sur sa montre. Celle-ci lui annonce qu’il est à peine sept heures de matin. En effet, ces deux-là ont vraiment sauté du lit aujourd’hui. Bref. Elle propose de regarder à nouveau la vidéo de surveillance envoyée par le seul commerce situé à proximité du camp de redressement, seul véritable élément qu’ils ont à leur position. J’espère qu’on trouvera du nouveau parce que je sais vraiment plus quoi faire là. Il prêche une convertie. Sur le coup, la brunette est aussi désespérée que lui. Ses yeux ne quittent plus l’écran de l’ordinateur, utilisant les flèches du clavier ou la souris de temps à autre lorsqu’elle croit apercevoir quelque chose d’utile. Elle a tellement visionné la vidéo en question qu’elle a à présent l’impression de la connaître par cœur comme si son cerveau avait enregistré la totalité de la séquence, sauvegardé chacune des images. C’est horrible de regarder quelque chose sans savoir ce qu’on cherche, qu’elle ne peut s’empêcher de pester alors qu’une demi-heure s’est déjà écoulée. Malheureusement, c’est le cas à présent. Dans beaucoup de cas tel qu’un enlèvement ou un meurtre, ils savent ce qu’ils cherchent : un suspect mais dans le cas présent, alors qu’ils souhaitent démanteler un camp de redressement extrême, c’est une autre affaire.

L’un comme l’autre semble particulièrement irrité par le fait de stagner. Lorsque l’on exerce un tel métier, c’est absolument ce qu’on évite le plus : stagner parce que le temps tourne et le temps, ils n’en ont pas. Jamais. Quelque soit l’affaire en cours, ils doivent la résoudre au plus vite parce que bien souvent, il y a des vies en jeu. Il y a des attentes. Des attentes de la part de leurs supérieurs exigeant des résultats. Des attentes de la part des proches de victimes aussi et c’est bien celles-ci qui comptent le plus aux yeux d’Eris. De l’équipe, elle est celle qui travaille le plus avec les familles alors forcément, c’est quelque chose qu’elle prend à cœur. Si ça se trouve on fait fausse route depuis le début et il n’y a rien sur cette vidéo surveillance. Plus le temps passe et plus elle commence à partager cette idée. Après tout, ils l’ont déjà visualisé un nombre incalculable de fois cette foutue vidéo alors si quelque chose dessus était censé les aider, ils l’auraient déjà vu, non ? Au moins l’un d’entre eux. Ce n’est pas comme si c’était la même paire de yeux qui examinait les images. A ce rythme là on y sera encore à Noël. Si au moins on savait ce qu’on cherchait. Eris laisse échapper un léger soupir. A son tour, elle s’empare d’un second donut, un au chocolat et mord une première fois dedans. Tout ça sans quitter l’écran des yeux. Elle n’a même pas adressé un seul regard à son collègue depuis qu’ils ont lancé la vidéo. Toute sa concentration est rivée sur l’écran et enfin, elle pense que ça commence à payer. Stop ! qu’elle s’exclame en appuyant elle-même sur la touche du clavier lui permettant de mettre la vidéo en pause. Ensuite, à l’aide des flèches, elle remonte au montant précis qu’elle recherche. L’image se fige, elle zoome et malgré la mauvaise qualité, elle parvient à reconnaître les deux personnes situées à l’avant du véhicule. Mh, étrange. Pourquoi madame Callaghan nous aurait dit ne rien savoir sur le camp si on la retrouve dans la même voiture que Ethan Montgomery ? Ce dernier étant à la tête du fameux camp de redressement, ça semble plutôt louche. Eris lance un sourire satisfait à Aaron, il se pourrait qu’ils aient quelque chose à présent.

Pour être tout à fait honnête, Eris perd espoir. Pourtant, elle n’est pas sans savoir que perdre espoir, c’est le début de la fin. C’est justement lorsqu’ils y croient qu’ils parviennent à résoudre leurs affaires. Alors, elle prend sur elle et continue d’observer les images qui défilent sous ses yeux surtout qu’à ses côtés, elle sent son collègue s’impatienter et ils n’arriveront à rien si ils ne gardent pas leur calme. Cela semble finir par payer puisqu’elle aperçoit un détail qui pourrait fortement les aider, un gros détail. La brunette hausse les épaules à la remarque d’Aaron. C’est sûr qu’ils en ont mis du temps mais elle préfère penser positif et se dire qu’au moins, c’est fait. Ils ne sont pas passés à côté une fois de plus. Vaut mieux tard que jamais, non ? Elle essaye de positiver au maximum même si elle a conscience du temps perdu. Après quelques manipulations d’Aaron, l’image est à présent nette, il n’y a aucun doute. Il s’agit bien d’une des personnes d’intérêt dans leur affaire en compagnie du dirigeant du camp de redressement douteux qu’ils tentent de faire tomber. C’est bien eux, on dirait que Madame Callaghan nous doit une petite explication. Les yeux posés sur ceux de son collègue, la trentenaire hoche doucement de la tête. Et je vais me faire un plaisir d’aller lui demander. Tant pis si il est tôt, c’est bien le dernier de ces soucis. Elle a une enquête à régler et après cette découverte, il semble évident que Katherine Callaghan a des choses à lui raconter. Heureusement que t’es venue voir ça avec moi, je crois que je serais toujours en train de chercher sans toi. Elle lui donne une tape amicale sur l’épaule avant de se lever de son siège. T’inquiète, on est une équipe, non ? Elle lui lance un sourire. Je me mets en route, je t’appelle pour te dire ce que ça a donné. Oh et gardes les donuts. Elle lui adresse un clin d’œil avant de quitter la pièce d’un pas décidé.

~ fin.