dans le mur ▬ sofia

Facile. C’est ce que je pensais de ma vie depuis toujours. J’ai toujours eu de la chance, tout m’a toujours souri, je n’ai jamais eu de problème à faire ce que je veux. Et pourtant aujourd’hui tout change petit à petit. Quand je veux devenir meilleur, quelque chose vient faire en sorte de me faire tomber plus bas que terre. Je ne sais pas pourquoi, mais j’imagine que c’est quelque chose que je mérite. Il faut bien qu’à un moment, dans ma vie, je touche le fond. Ce qui arrive en ce moment.

Solitude. Je ne comprends pas qu’est-ce qui m’arrive. Du jour au lendemain, comme ça, sans raison, sans nouvelle. Comme une feuille qui s’envole avec une bourrasque, que je ne peux pas rattraper, que je ne peux pas arrêter. Je regarde, impuissant, en me laissant penser que je passe vraiment à côté de quelque chose. Mais ce n’est pas grave. J’ai encore toute la vie devant moi. Je vais trouver la bonne, j’en suis certain. Du moins, j’arrive au moins à prendre conscience que ce n’était pas elle.

Et pourtant… Je suis quand même humain, je suis toujours capable de ressentir des choses, ce qui en ce moment, me submerge, me rend triste, me rend fou, me fait remonter mon côté sombre. Tout ce que je n’aime pas. Mais c’est comme ça, je ne peux pas me battre contre moi-même, du moins, pas pour le moment.

Je me laisse donc aller, sans me soucier du reste. Plus l’heure tourne et plus les verres s'enchaînent. Ma vision commence légèrement à se troubler, le monde autour de moi tourne un peu trop vite, alors qu’il n’y a rien, hormis de la lumière, un bar et moi. Un fond de musique, que j’ai déjà trop entendu. Et je termine ce verre, ouvrant une nouvelle bouteille, juste pour continuer. Depuis trois jours, c’est tout ce que je suis capable de faire. Une bonne décision ? Absolument pas, mais bon, au moins ça fait passer le temps, puis ça m’arrive presque de penser à autre chose avec ça.

Je me lève, arrivant difficilement à marcher. Je sors dans la rue derrière la boite, que j’ai fermé ce soir, car j’avais envie d’avoir l’endroit juste pour moi. Mais je me débrouille quand même pour quitter les lieux. C’est quelque chose de classique, quand on boit, on ne fait pas souvent des choix qui sont bon. Comme ce soir, en fin de compte. Je monte dans ma voiture, tourne les clés pour démarrer et je prends la route. Une véritable erreur. Mais ce n’est pas grave, de toute façon, qu’est-ce qui pourrait m’arriver ? J’ai déjà un karma tellement éclaté en ce moment que bon, ça ne me fait même pas peur… En fond, à la radio, une de mes chansons que j’adore plus que tout. The Rolling Stones - Satisfaction. Et c’est à ce moment que je ne prête pas du tout attention à ce qui m’entoure. Le feu est rouge, mais je passe quand même, car je ne l’ai pas vu. Et c’est à ce moment que je vois, arriver sur ma droite, une lumière, qui vient m’éblouir. Un grand choc, un bruit très fort. Je ne suis plus présent, je n’entends plus rien, je ne vois plus rien. Tout est sombre, je viens simplement de perdre conscience.

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J’ouvre les yeux, difficilement. Je ne sais pas du tout ou je suis, mais j’entends le bruit d’une sirène, qui retentit au-dessus de moi. Je me déplace, très rapidement. Mais par-dessous tout, je souffre, j’ai mal. Mes cotes et mon bras me font souffrir. Je me sens vraiment mal. Au-dessus de moi, une personne me regarde, me met une lumière dans les yeux, me parle, mais je ne comprends vraiment rien. Puis je lance un regard pour observer l’environnement qui m’entoure. Du matériel médical, en grande partie. Je dois sûrement me retrouver dans une ambulance. “Laissez-moi…” C’est tout ce que j’arrive à faire sortir de ma bouche. Une idée de merde, c’est certain, mais bon, c’est comme ça, je n’ai pas l’impression d’avoir besoin que l’on m’aide, alors que c’est le contraire.

L’ambulance vient de s’arrêter, on me fait sortir rapidement, toujours allongé, j’imagine que je vais partir en direction des urgences. Est-ce que je suis vraiment si mal en point que ça ? Je n’arrive pas à m’en rendre compte. Pourtant, je sais que je suis en train de souffrir. Mais c’est aussi l’alcool qui doit me rendre comme ça. J’imagine que c’est l’idée de ma vie finalement. Facile.

Il doit être environ trois heures du matin quand Sofía réussit à prendre une pause pour se restaurer un minimum. Elle n'est là que depuis dix-neuf heures et elle n'a pas eu une seconde de répit jusqu'ici : les urgences sont saturées, les salles d'attentes bondées et la plupart de ses collègues croulent sous le travail tout comme elle. Elle n'aura finalement pu prendre que quelques minutes avant d'être interrompu par l'une des infirmières des urgences. « Sofía je suis désolée de te déranger, mais on a besoin de renfort aux urgences. » « Aucun problème, je te suis! » La chirurgienne prend son plateau repas et en balance le contenu dans la poubelle qui se trouve sur son passage. Elles se mettent à courir dans le couloir qui rejoint les urgences, où les ambulances ne cessent d'arriver et de repartir. Un des brancards entre à son tour dans l'entrée guider par deux ambulanciers. « Homme d'une trentaine d'années qui présente de multiples lésions traumatiques. Violent accident de la route... » Il continu de faire son rapport à Sofía alors qu'elle s'approche de la victime stéthoscope en main. « Putain... » Qu'elle lâche alors que ses yeux s'emplissent subitement de larmes qu'elle essuie d'un revers de la main en faisant son possible pour se resaisir « Lukas ?! Lukas?! Tu m'entends?! Ne t'endors pas! Reste avec moi. » Il est conscient mais paraît être dans les vapes, elle attrape sa lampe torche et l'agite devant ses yeux pour contrôler ses pupilles. Elle procède à quelques examens basiques avant de ne dire à sa collègues qui se tient de l'autre côté du brancard. « On va faire un scan. Pour être sûr que ça ne soit pas plus grave. » Si Lukas ne présentait que quelques blessures superficielles, le scan lui, déterminerait si il ne faisait pas une hémorragie.

Les minutes lui paraissent longues, beaucoup trop longues alors qu'elle se tient derrière la vitre du scanner en attendant que l'imagerie soit assez visible. L'alarme de fin se déclenche. Elles se penchent toutes les deux sur l'écran de l'ordinateur et étudies les résultats obtenus. « Il n'y a rien de grave Sofía... A part une légère commotion cérébrale. Rien de méchant. » Qu'elle lui annonce d'une voix douce puisque Céleste avait bien compris qu'elle connaissait ce patient. Elle pose une main réconfortante sur son épaule et l'Espagnole lâche dans un souffle. « Je suis soulagée... » « Tu t'occupes du reste? Je retourne aux urgences. » Elle accepte d'un simple hôchement de tête et s'en va rejoindre Lukas. Peu à peu il reprend ses esprits, à son chevet Sofía l'étudie de son regard anxieux, la voix légèrement casser elle lui souffle doucement. « Est-ce que ça va? Tu es à l'hôpital... Tout va bien. » Bon, il fallait tout de même qu'elle l'amène en salle de soin pour soigner ses petites blessures.