your love was handmade for somebody like me / isis

Owen se sent à la fois parfaitement à l’aise avec Isis, et à la fois, encore sur la retenue. Il sait qu’il peut lui faire confiance, qu’elle le comprendra. C’était sans doute ce qui lui avait fait le plus de bien dans leurs échanges par courrier. Quand il lisait ses lettres, il n’était pas seul. Il avait l’impression de pouvoir tout lui dire sur lui, sans qu’elle ne prenne peur. Mais ce sentiment lui semble lointain, et aussi différent de ce qu’ils avaient à l’époque, à travers des mots couchés sur le papier. Là, les mots sortent directement de sa bouche, et ses émotions peuvent se lire sur son visage. C’est tout à fait différent. Il est plus anxieux, même s’il espère qu’elle ne le remarquera pas. Cependant, quand elle l’interroge sur sa fille, il fait le choix d’être honnête. Il a beau essayer que tout soit parfait, il sait que ça ne le sera jamais. Et en parler à quelqu’un lui fait du bien. Ce n’est pas à Victoria qu’il peut se confier là-dessus. Ou même à n’importe qui d’autre, parce qu’il a l’impression que ses craintes ne sont pas légitimes. Même lui, il trouve parfois qu’il s’inquiète trop et devrait juste profiter des moments passés avec Paige. « J’espère que tu as raison, vraiment. » C’est ce qu’il souhaite le plus, que tout se passe bien. « C’est assez compliqué, j’ai toujours peur de ne pas agir comme elle l’avait imaginé et de ne pas être à la hauteur. J’ai l’impression de seulement apprendre à devenir père alors qu’elle, elle a une image de moi depuis très longtemps. C’est compliqué, mais ça en vaut la peine. » Sur ça, il n’a aucun doute. Il va tout faire pour trouver sa place dans la vie de la petite fille et pour y rester. Et entre Paige, son travail et sa formation, il n’a pas vraiment eu le temps de faire des rencontres. Ou bien il ne l’a pas pris. Pourtant, il le prend aujourd’hui, après avoir retrouvé la trace d’Isis. Et quand il parle de trouver la bonne personne, il espère que c’est elle. Il sait que ça pourrait l’être. Mais il ne veut pas aller trop vite pour autant. Visiblement, elle a souffert par le passé, même si elle est célibataire maintenant. Et Owen, non plus, n’est pas certain de vouloir aller trop vite. Mieux vaut prendre les choses comme elles viennent. « C’est ce que j’ai dit oui. » Il sourit, se demandant si elle pense à la même chose que lui. Il fronce tout de même les sourcils quand elle lui dit qu’il devrait pouvoir trouver quelqu’un facilement. Elle lui fait quelques compliments, même s’il ne comprend pas tellement le dernier, qu’elle articule à peine. Pourquoi ne serait-elle pas cette personne ? « Qu’est-ce que tu as dit ? » Il voudrait bien comprendre, surtout si c’était un autre compliment. « J’évite de parler de mon passage par la prison en général, tout le monde ne réagit pas toujours bien, même si j’ai été innocenté. Au moins, tu le sais déjà… toi. » Et elle n’en a pas peur pour autant. Ce qui est vraiment un bon point selon Owen. Elle ne le regarde pas différemment, ou en tout cas, il n’en a pas l’impression. Il évoque ensuite les restaurants de New York, tout en espérant qu’ils pourront en essayer d’autres, ensemble. Sauf qu’Isis parle plutôt de bars et de boulangerie, et semble à nouveau très gênée. Ce qui fait sourire Owen, alors qu’il prend son verre dans la main et en boit une première gorgée. « Je ne sais même plus si tu l’as déjà dit ou non… En fait, je le pense tellement aussi que je ne sais plus… enfin tu comprends. » Il l’espère du moins, parce qu’il ne sait pas vraiment comment le lui expliquer sinon. « Et tu pourras me conseiller quelques bars alors. Je suis sûr qu’il y en a des très bien à New York. Et je n’ai rien contre l’alcool… Même si on n’en a pas besoin pour passer un bon moment. Et tu n’en as pas besoin pour être intéressante. » Il ne sait plus vraiment ce qu’il dit. Et de façon assez contradictoire, il porte à nouveau son verre d’alcool à ses lèvres.

« Je sais que tu as raison… » Oui, il a de la chance. Du moins, il en plus que certaines personnes, y compris le père d’Isis sans doute. Au moins, il peut voir Paige, il a l’occasion de faire des erreurs, de se rattraper et de recommencer. Une chance qu’il n’a pas eue pendant longtemps. Mais pour ça, il est le seul à blâmer, et il le sait. De toute façon, en vouloir au monde entier n’arrangerait en rien la situation. Revenir en arrière n’est plus possible. La seule chose qu’il puisse faire, c’est essayer. « Mais j’ai tendance à penser au pire, c’est plus fort que moi. Même si j’essaye aussi d’en profiter au maximum. En général, j’arrête de penser à tout ça quand elle est avec moi. » Dit comme ça, il a l’impression d’être complètement fou. Mais sans doute a-t-il toujours été ainsi. A voir le négatif d’abord, parce que c’est plus facile de s’y préparer plutôt que d’être pris au dépourvu. Il essaye d’y travailler, mais ce n’est pas évident. « Merci en tout cas. » De le comprendre, de le soutenir. Après tout, tout cela ne la concerne pas, et elle pourrait très bien le juger parce qu’il a créé la situation lui-même. Mais elle ne le fait pas, et Owen lui en est reconnaissant. Il préfère cependant dévier le sujet vers Isis, pas désintéressé quand il lui demande si elle est célibataire. Ce qu’elle est. Et même si elle lui dit qu’il n’aurait pas de mal à trouver quelqu’un, Owen ose espérer qu’elle pourrait être ce ‘quelqu’un’. Isis répète ce qu’elle avait marmonné juste avant, et il sent ses joues chauffer sous la barbe en question. Owen est loin de se considérer comme un homme séduisant. Il n’est pas de ceux sur qui on se retourne dans la rue, ne dégage pas une confiance en lui incroyable. Alors entendre un tel compliment, ça lui fait bizarre. Mais un bon bizarre. « Je… et bien merci. Tu es très jolie aussi. Même plus que très jolie… » Il a vraiment l’impression d’avoir les joues en feu. Owen n’a jamais aimé ce genre de moments. Les débuts hésitants, toujours gênants. Lui, il préfère quand les choses sont déjà installées, que tout parait naturel. La routine ne lui a jamais fait peur, au contraire. Il a toujours été casanier. Mais avec Isis, ils n’en sont pas encore là. Il ne sait pas s’ils le seront un jour. Seul l’avenir pourra le lui dire. « C’est vrai que tu es forcément au courant. C’est l’avantage. » Même si ce n’était pas pour ça qu’il avait repris contact avec elle. Il voulait simplement la rencontrer, comme un besoin une fois que l’idée s’était plantée dans sa tête. Le fait qu’il n’ait pas besoin de lui raconter ses erreurs et bêtises est un bonus certain. Il sait déjà qu’elle les accepte. Et qu’elle pourrait potentiellement l’accepter, lui. Il est assez étonné qu’Isis propose des bars plutôt que des restaurants pour lui faire visiter, mais à vrai dire, ça lui convient aussi. Tant qu’il peut passer du temps avec elle, à regarder son sourire quand elle lui parle. A imaginer ce sourire derrière les mots qu’elle lui écrivait. Le serveur qui leur apporte leurs plats le sort de ses pensées, et il sourit en découvrant sa calzone. « Bon appétit à toi aussi. » Fourchette et couteau en main, il s’attaque à la pizza par la droite et en coupe un premier morceau, avant d’être interrompu par une question d’Isis. Question pour le moins inattendue. Il repose ses couverts, et fait mine de réfléchir. Quelle réponse attend-t-elle ? « Je pense… oui. Et je les lisais plusieurs fois avant de savoir exactement ce que j’allais te répondre. Parfois, j’avais la pression. » C’est sans doute un peu ridicule, mais c’est vrai. Il voulait que ses lettres lui fassent de l’effet, pour qu’elle ait encore envie de lui répondre. L’arrêt brutal avait été très difficile pour lui. « Tu penses à des mots… en particulier ? » Ose-t-il malgré tout, sentant à nouveau la chaleur gagner ses joues.