right in the feels /warner

Elle prend bien tout son temps sous la douche. L’eau brûlante lui fait un bien fou, mais ce n’est pas la seule raison qui la pousse à rester plus longtemps que nécessaire. Elle n’a pas envie de retourner dans la chambre et se retrouver seule avec Warner. Elle ne sait même pas comment elle va réussir à dormir malgré sa fatigue qui se fait de plus en plus ressentir. Savoir qu’il sera là, tout près d’elle, elle va être beaucoup trop tendue pour se laisser aller. Peut-être que finalement, c’est elle qui va aller dormir dans la voiture. Ou sur le canapé. Ou par terre. N’importe où sauf ici en fait. Ou alors elle pourra toujours dormir demain dans la voiture, sur la route. Ouais, elle va laisser le lit à Warner et elle trouvera bien à s’occuper. Maintenant qu’elle a trouvé une solution à son problème, elle se sent un peu plus légère, et elle arrête l’eau. Elle va pouvoir sortir et retourner dans la chambre, brièvement. Elle se sèche rapidement, se brosse les dents, mais ne prend pas la peine de mettre son pyjama. Comme elle ne va pas dormir, elle remet ses vêtements tout de suite. Puis elle prend une grande inspiration et sort de la salle de bain pour se retrouver immédiatement dans sa chambre, où Warner se trouve toujours. Elle n’avait pas pensé au fait qu’il puisse s’enfuir, mais maintenant qu’il la rassure sur le fait qu’il soit toujours là, elle se dit que cette idée a fait plus que lui traverser l’esprit. Elle hausse alors les épaules, plus pour elle-même qu’autre chose. « Je vais pas réussir à dormir non plus, alors t’as qu’à garder le lit et je vais aller faire un tour. Ou je sais pas trop, mais vas-y, repose toi. » Il en a plus besoin qu’elle. Elle, ce dont elle a besoin, c’est d’un verre. Elle se souvient vaguement où sa tante cache ses bouteilles, elle va aller se servir sans tarder. « Si t’as besoin de quoi que ce soit, je serai en bas, je viens de me souvenir où Rosie cache sa réserve. Sinon, bonne nuit Warner, essaye de dormir un peu. » Sur ce, elle sort de la chambre et redescend au salon.

Eliza l’avait laissé seul le temps de prendre sa douche et Warner envisagea très sérieusement de s’en aller à ce moment-là. Pas pour l’abandonner là, peu importe à quel point il pouvait être en colère, il ne serait jamais du genre à abandonner quelqu’un comme ça. Même si le quelqu’un était Eliza et qu’elle se trouvait actuellement dans une ville qu’elle connaissait bien et chez sa tante qui plus est. Non, il voulait juste partir pour pouvoir avoir sa nuit tranquille et peut-être essayer de dormir ailleurs que dans la chambre d’Eliza. Il serait revenu la chercher le lendemain matin et une fois à New-York ils pourraient reprendre chacun leur vie. Néanmoins, le jeune homme n’avait pas bougé. Peut-être parce qu’il était fatigué et qu’il lui fallait beaucoup de courage pour se mettre à errer dans la ville ou peut-être parce qu’il ne voulait pas qu’elle le prenne mal. Quand elle revint, la première chose que Warner lui signala c’était qu’il était encore là. Il ne savait même pas pourquoi il avait dit ça parce qu’elle pouvait bien voir par elle-même qu’il était là et qu’il n’avait même pas bouger depuis toute à l’heure. Il reprit la parole pour lui dire qu’il n’allait pas réussir à dormir de toute manière donc il pouvait lui laisser sa chambre et juste aller traîner en bas il imaginait mais apparemment, Eliza avait eu la même idée pendant sa douche. Elle le laissa donc à nouveau seul parce qu’elle voulait qu’il se repose et qu’elle avait apparemment décidé de se servir dans la réserve de sa tante. Resté seul, il s’assit sur le lit mais il n’avait toujours aucune envie de dormir. Enfin non, ce n’était pas ça. Il était fatigué mais il se connaissait assez pour savoir qu’il n’arriverait pas à dormir et ne voyait pas l’intérêt de passer la nuit à se retourner en vain. Il ne tarda donc pas à se redresser et à décider de la rejoindre en bas. Ce n’est pas spécialement qu’il avait envie de passer plus de temps en sa compagnie mais il se souvenait bien qu’elle avait mentionné la réserve de sa tante. Il retrouva donc Eliza qui était bien en bas. “Hmmm, t’as trouvé la réserve de ta tante du coup ?” lui demanda-t-il alors. “Je ne vais vraiment pas réussir à dormir.” Il n’avait pas essayé mais ce n’était pas grave. “Je prendrais du café, ça fera l’affaire pour la route.” Ca le tiendrait suffisemment réveiller le lendemain.

C’est décidé, elle va passer la nuit en bas. A boire. Pas toute la nuit non plus, et elle ne va pas faire que ça, mais c’est son premier objectif quand elle arrive au salon, vérifier si la réserve d’alcool de sa tante se trouve toujours au même endroit. Elle a bien besoin d’un ou deux verres en plus, si elle avait su, franchement, elle aurait laissé Warner lui payer l’hôtel. Ca aurait évité qu’ils s’éloignent un peu plus alors qu’ils ont fait de grands pas l’un vers l’autre aujourd’hui. Ça la tue de s’en rendre compte, que leur relation ne sera plus jamais la même. Qu’ils n’arrivent pas à rester en bons termes plus de quelques heures d’affilée. Peut-être que c’est le signe qu’il faut qu’ils arrêtent d’essayer. Poppy, c’est comme ça qu’elle le prend en tout cas. Une fois qu’ils seront de retour à New York, elle le laissera vivre sa vie. Il n’y a rien à ajouter de toute façon, elle lui a dit tout ce qu’elle devait lui dire, elle n’a plus rien à lui cacher. Il a vu Alexis et il va pouvoir tourner la page. Vraiment, il n’y a plus aucune raison pour qu’ils continuent à se voir. Ca l’attriste un peu, parce que Warner a été et sera toujours quelqu’un d’important pour elle. Mais ça ne sert à rien de s’acharner. Jackpot, elle trouve les bouteilles exactement là où elle les a vues la dernière fois. Elle prend la bouteille de vodka, bien pleine, et se relève pour aller chercher un verre. C’est là qu’elle tombe sur Warner, qui l’a rejoint en bas. Surprise, elle se stoppe net. Elle réalise ensuite qu’il lui a parlé, et pour toute réponse, elle lui montre la bouteille qu’elle tient à la main. « Pourtant je t’ai dit que je serais loin, c’était bien ça le problème non ? » Sa présence dans sa vie le dérange, elle a bien fini par le comprendre, il a été très clair. Donc là, elle ne voit pas quel est le problème. Mais bon, peu importe, elle ne veut pas se prendre la tête davantage ce soir, alors elle reprend le chemin du salon, prenant au passage deux verres dans la cuisine. Elle s’installe sur le canapé, ce traître, pose les deux verres sur la table et verse la vodka dedans. Elle n’attend pas Warner pour boire le sien, cul sec. Puis, sans avoir prononcé un seul mot, elle s’en sert un nouveau. « Qu’est ce qui cloche au juste avec nous ? Pourquoi on arrive pas à s’entendre plus de cinq minutes ? » Elle n’a pas voulu dire ça, c’est sorti tout seul. Mais visiblement, ça avait besoin de sortir. Elle n’attend même pas une réponse de sa part, juste… Ouais, elle avait besoin de le dire. C’était tellement facile et naturel entre eux avant. Maintenant c’est comme s’ils ne savaient plus comment être eux-même l’un avec l’autre. « Ca me fatigue vraiment, je sais pas si ça vaut le coup que je continue d’essayer. » Elle hausse les épaules puis boit une nouvelle gorgée de son verre. « Promis, une fois qu’on sera à New York, je te laisse tranquille. » Ca vaudra mieux pour tous les deux.

Warner savait bien qu’il avait voulu être seul un peu plus tôt, pour essayer de dormir et être tranquille et Eliza venait de lui offrir ça. Elle lui laissait sa chambre et son lit pour qu’il puisse se refuser. Sauf qu’entre temps, pendant qu’elle était à la douche, il avait eu le temps d’y penser et avait réalisé qu’il n’y avait aucune chance pour qu’il puisse réussir à dormir. Pas ce soir, pas après tout ce qui s’était passé pendant cette journée. Il resta un peu seul dans la chambre après qu’Eliza fut descendu mais pas très longtemps, il décida vite de la rejoindre. Pas parce qu’il avait spécialement envie de passer plus de temps avec elle mais il voulait savoir si elle avait trouvé la réserve de sa tante. Quand elle lui demanda, une fois arrivé en bas, elle lui montra une bouteille. C’était une bonne nouvelle. Il lui expliqua qu’il n’arriverait pas à dormir dans tous les cas et elle ne sembla pas comprendre pourquoi vu qu’elle était loin. Il haussa les épaules. “Non ce n’était pas ça le problème.” répondit-il alors. Comme il n’allait tromper personne avec ce mensonge, il se reprit aussitôt. “Enfin en tout cas, ce n’est pas seulement ça le problème.” Il suivit Eliza jusque dans le salon et une fois qu’elle eut servi deux verres, bu son verre de vodka. Il la regarda se servir à nouveau puis réfléchit à la question qu’elle venait de poser. Pourquoi n’arrivaient-ils pas à s’attendre plus de cinq minutes ? Même quand les choses semblaient progresser, ils se retrouvaient dans cette situation après. “On s’est entendu un peu plus de cinq minutes là.” fit-il remarquer, juste pour la forme. Il soupira ensuite et se resservit à son tour avant de reprendre la parole. “Et je ne sais pas… Parce que je suis un imbécile qui prend la mouche trop facilement ?” C’était probablement une des raisons oui. Pas la seule, elle avait certainement autant de tort en lui. “Trop de choses se sont passées.” ajouta-t-il finalement. Pourtant, il aurait aimé que les choses soient plus simples entre eux. Eliza lui avait manqué depuis le jour où elle était partie mais il n’était même pas sûre que la fille qui était avec lui actuellement soit la même que la personne qu’il avait côtoyé avant. Il l’écouta ensuite lui dire qu’une fois à New-York, elle lui ficherait la paix, qu’elle était fatiguée d’essayer. “Si tu penses que c’est mieux.” dit-il en haussant les épaules. Il n’était pas sûr que ça le soir. Parce qu’il avait beau se persuader qu’il ne voulait plus la voir et qu’il ne voulait plus avoir d’elle dans sa vie, il n’empêche qu’il était redescendu ce soir, alors qu’il aurait pu être tranquille. “Mais je ne sais pas si on peut dire qu’on a vraiment essayé beaucoup.” Lui en tout cas, n’avait pas essayé beaucoup à part aujourd’hui. “Est-ce que tu m’en veux de t’avoir retrouvé ?” demanda-t-il au bout d’un moment de réflexion. Sa vie était certainement plus simple avant qu’il ne débarque à nouveau.

Elle a du mal à suivre Warner ce soir. Il voulait rester, elle a accepté de prendre une journée de plus au boulot pour qu’ils puissent rester ce soir, et au final il regrette qu’ils ne soient pas partis ce soir. Il voulait dormir seul, elle est descendue pour lui laisser le lit et lui donner une chance de se reposer, mais il l’a finalement rejointe en bas. Pas étonnant qu’elle soit paumée à ce point s’il ne sait pas ce qu’il veut. Ca lui donne beaucoup trop mal à la tête, et c’est pour ça qu’elle a bu son verre d’un seul coup. Elle en vient même à être perdue sur ce qu’elle veut. Elle veut l’avoir dans sa vie, mais elle n’arrive pas à être en sa présence. Ils n’arrivent pas à coexister, ils n’y arrivent plus. Il y a toujours un truc qui coince, et malgré elle, elle pense ça tout haut. Elle lui demande pourquoi ils n’arrivent plus à s’entendre alors que tout avait toujours été facile entre eux. Elle connaît très bien la réponse, il lui en veut toujours et elle a mérité qu’il lui en veuille. Mais elle a l’impression qu’il ne remarque pas ses efforts. Ou alors qu’il prend un malin plaisir à les saper à chaque fois. Il plaisante, elle ne sait pas trop pourquoi. Pour détendre l’atmosphère ? Parce qu’il n’est pas à l’aise non plus ? « Je sais, je sais. » Elle lève les yeux au ciel. Elle sait tout ça, elle sait qu’il lui faut du temps, elle l’a bien compris. « Le problème ça doit être que je suis pas assez patiente. » Elle n’a pas envie d’attendre que ça aille mieux. Qu’il se sente mieux et qu’il soit prêt à lui pardonner. C’est égoïste de sa part, elle n’a pas le droit de lui demander ça, mais elle ne peut pas s’en empêcher. En fait c’est ça, elle a eu beau se persuader pendant toutes ces années qu’elle ne regrettait rien, qu’elle avait pris la bonne décision, elle n’était plus sûre de rien aujourd’hui. Il n’y a plus rien de sûr quand il s’agit de Warner. Il lui manque, leur relation lui manque, mais comme il l’a dit, trop de choses se sont passées et plus rien ne sera jamais comme avant. Du coup, elle se dit que quelque part, il faut qu’ils arrêtent d’essayer. Elle est fatiguée, elle a envie de redevenir elle-même, c’était beaucoup plus facile quand il était loin. « Je sais pas ce qui est le mieux, je sais juste que j’en ai marre de devoir marcher sur des oeufs avec toi. Je dois faire attention à tout ce que je fais et ce que je dis, et même si je sais que ça va me tuer de plus te voir, je peux pas vivre comme ça. » C’est beaucoup trop injuste envers elle. Si la personne qu’elle est aujourd’hui ne lui plait pas, elle ne va pas changer juste pour lui. Impossible, pas après ce qu’elle a vécu avec ses parents qui eux aussi ont essayé de la changer, de la brimer. « Enfin je sais que j’ai fait beaucoup d’efforts, enfin j’ai l’impression d’en avoir fait… et visiblement c’est jamais assez pour toi. Et c’est pas de ta faute, je l’ai mérité. C’est juste que j’en peux plus. » La question qu’il lui pose juste après la prend au dépourvu et elle ne sait franchement pas quoi répondre. Elle n’y a jamais pensé à vrai dire. Elle n’arrive même pas à le regarder dans les yeux. Pour gagner un peu de temps, elle boit une nouvelle, longue gorgée de vodka. « Non. Impossible. » répond-elle en se surprenant elle-même. « Il était temps que j’assume ce que j’ai fais. J’aurais juste préféré qu’on se retrouve dans d’autres circonstances mais j’en suis la première surprise, ça m’a enlevé un poids que tu saches enfin la vérité. » Un poids qu’elle n’avait jamais réalisé qu’elle avait sur la conscience. Et bien sûr, il lui avait manqué. « Je sais pas si tu le réalises mais t’étais la personne qui comptait le plus pour moi à l’époque. » C’était sans doute encore le cas aujourd’hui, malgré tout, même si c’était plus compliqué.

L’humeur changeante de Warner l’avait finalement emmené en bas, avec Eliza. Il avait décidé qu’il voulait profiter lui aussi de la réserve de la tante d’Eliza, que c’était mieux que de passer sa nuit ici à se retourner dans le lit. En bas, il vit que la jeune femme avait sorti la vodka et c’était pile ce dont il avait besoin là. Même s’il fallait en passer par la conversation qui allait avec, ça en valait la peine. En effet, juste après qu’ils se soient installés au salon, Eliza lui demanda pourquoi ils n’arrivaient pas à s’entendre bien longtemps. C’est vrai qu’ils avaient fini par se prendre la tête mais il fallait voir les choses de manière positive, il y avait du progrès. Ils avaient mis plus de temps à s’entretuer cette fois que les fois d’avant, ça voulait dire qu’ils avançaient d’une certaine manière. Mais Eliza n’était pas patiente, elle le dit elle-même. Warner eut un petit sourire. “Ah ça, tu ne l’as jamais été.” Donc ça n’avait rien d’étonnant. Mais c’était rassurant de voir qu’au moins certaines choses ne changeaient pas. En tout cas, c’était probablement parce que les choses n’allaient pas assez vite à son goût qu’elle voulait arrêter d’essayer et qu’elle voulait le laisser tranquille une fois rentrée. Si c’était son choix, il l’accepterait. Il n’était pas sûr d’avoir envie de la chasser de sa vie personnellement, ses sentiments à ce sujet n’arrêtait pas de changer. Il était néanmoins prêt à essayer plus et à faire plus d’efforts. “Je n’ai pas dit que tu n’avais pas fait d’efforts.” lui fit-il savoir calmement. “J’ai bien vu que tu en avais fait.” Mais il lui fallait du temps, il n’allait pas le répéter parce qu’il l’avait déjà dit. Mais si elle n’était pas prête à lui accorder plus de temps ce n’était pas grave. “Je suis désolé. Pour ce soir, en tout cas. Je fais des efforts aussi tu sais mais la journée a été éprouvante alors ce n’était pas le moment de me dire quelque chose comme ça.” Il avait vu rouge un peu trop vite pour cette histoire, il en avait conscience maintenant. Après, l’autre raison pour laquelle il comprenait qu’elle puisse vouloir arrêter d’essayer c’est qu’elle n’avait jamais demandé à ce qu’il revienne dans sa vie. Il était revenu et il avait peut-être gâché toute sa tranquillité. Peut-être qu’elle lui en voulait pour ça d’ailleurs. Elle aurait le droit. Warner lui posa la question et Eliza répondit que c’était impossible mais qu’elle aurait voulu qu’ils se retrouvent dans d’autres circonstances. “Quoi comme circonstances ?” demanda le jeune homme curieux. Il n’arrivait pas à imaginer des circonstances de retrouvailles qui puissent être biens pour eux. “Je ne réalise pas vraiment non. En tout cas, tu l’étais aussi.” Leur relation n’avait pas été très longue mais Warner n’avait pas eu besoin de beaucoup de temps pour savoir à quel point Eliza était importante pour toi. “Tu m’as vraiment manqué quand t’es partie tu sais.” Et elle lui manquait toujours maintenant, d’une certaine manière, même si elle était assise juste à côté de lui.

C’est ça son plus gros problème avec Warner, son impatience. Elle a beau savoir qu’il lui faut du temps, que le mal qu’elle lui a fait ne peut pas se réparer en un claquement de doigts, elle veut que tout s’arrange vite. Parce que peu importe ce qu’elle dit, elle a besoin de lui. Elle a essayé sans lui pendant sept ans. Elle a réussi à vivre, c’était un choix qu’elle avait fait et qu’elle avait assumé en sachant que c’était la seule responsable. Mais maintenant qu’il est de retour dans sa vie, c’est une autre histoire. Il est revenu comme ça, sans prévenir, alors qu’elle avait réussi à se faire à son absence. Elle n’a rien demandé, elle voulait juste vivre sa vie tranquillement. Puis il était revenu et il l’avait forcée à se replonger dans son passé, chose qui avait été très difficile. Qui est toujours difficile aujourd’hui. Toutes ses certitudes sont remises en question, elle est perdue, et elle ne sait absolument pas sur quel pied danser avec Warner. Elle prend des précautions avec lui, elle n’arrive pas à être elle-même alors qu’avant, il était la seule personne avec qui elle pouvait vraiment être naturelle. La seule personne qui l’acceptait pour qui elle était vraiment. Aujourd’hui, elle a l’impression que quoiqu’elle fasse, même si elle est honnête, ça ne lui convient pas. Qu’il ne remarque et n’apprécie aucun de ses efforts. A sa grande surprise, il lui présente des excuses pour la façon dont il agi avec elle ce soir. C’est bien la dernière chose à laquelle elle aurait pu s’attendre, et elle hoche brièvement la tête pour lui montrer qu’elle accepte, et aussi que ça ne fait rien. Elle peut comprendre, il a dû avoir une journée encore plus dure qu’elle. Mais s’il est prêt à faire des efforts, peut-être que tout espoir pour eux n’est pas perdu. Elle est fatiguée d’essayer, mais s’il lui assure qu’il va essayer lui aussi, peut-être que ça vaut la peine de s’accrocher ? C’est bien dans un tel moment qu’elle regrette sa décision, sept ans en arrière. Ces derniers temps, elle se prend même souvent à se demander ce qu’il en serait pour eux aujourd’hui si elle n’était pas partie. Pour le coup, elle a du mal à lui répondre quand il lui demande si elle lui en veut d’avoir débarqué dans sa vie de cette façon. Dans d’autres circonstances, elle aurait préféré, mais il était temps qu’elle assume les conséquences de ce qu’elle a fait. « J’en sais rien, j’ai beau retourner le problème dans tous les sens, vu ce que j’ai fait, je ne vois pas de circonstances idéales. Mais peut-être que si c’était moi qui était venue vers toi, ça aurait été plus facile. » Elle a été stupide de penser une seule seconde qu’elle aurait pu vivre toute sa vie sans le revoir et sans avoir à lui dire la vérité. Être prise sur le fait, devoir s’expliquer et assumer une culpabilité, ça lui avait fait du mal. Ca et le fait de réaliser à quel point elle a fait du mal à Warner, c’est sans doute ça le pire pour elle. Elle ne comprend pas qu’il n’aie pas réalisé qu’il était la personne la plus importante pour elle à l’époque. « Y’a qu’avec toi que je pouvais être moi, Warner. Quand je t’ai dit que ça a été dur de partir sans rien te dire, c’était pas un mensonge. C’était la chose la plus difficile que j’ai eu à faire et j’ai beau avoir essayé de me persuader que je l’avais surmonté, depuis que t’es revenu je me rends compte que ça n’a jamais été vrai. » Ca avait même été plus difficile de perdre Warner que de perdre Alexis. Elle avait fait le choix de faire sortir les deux de sa vie, mais Alexis, elle avait encore pu avoir de ses nouvelles de temps en temps. Warner, elle n’avait aucun moyen de savoir comment il allait. Quand il lui dit qu’elle lui a vraiment manqué, elle garde le silence un instant et essaye de lire dans son regard. Elle voit qu’il a beaucoup souffert, elle le comprend finalement. Il a beau avoir essayé de lui faire comprendre, elle n’avait pas réussi à saisir avant ce soir. Sans réfléchir, elle pose une main sur celle du jeune homme, et la serre légèrement. « C’était pas mon intention. Je pensais réellement, réellement que c’était le mieux pour toi. Je voulais pas t’emprisonner dans une vie qui ne te convenait pas. » Parce qu’elle le connaissait à l’époque, elle savait qu’il aurait voulu faire la bonne chose, même si au fond, rien ne l’aurait forcé à rester. « Si j’étais restée, qu’il y ait eu Alexis ou non, tu penses qu’on serait toujours ensemble aujourd’hui ? » C’est une question qu’elle s’était beaucoup posée au cours de toutes ses années. Avant tout ça, elle aurait pu se voir rester avec lui plusieurs années. Pourquoi pas toute une vie ? C’était facile avec lui, et ça convenait à leurs familles. Mais aujourd’hui, elle n’en était plus si sûre. Leurs personnalités, la sienne en tout cas, aurait fini par évoluer pour se rapprocher de celle qu’elle est aujourd’hui. Et celle qu’elle est aujourd’hui, elle ne semble pas lui plaire beaucoup.

Warner savait bien qu’il ne rendait pas forcément les choses faciles à Eliza. C’est pour ça qu’il avait fini par s’excuser pour ce soir, parce qu’il avait probablement exagéré alors qu’elle faisait des efforts, il le savait. La jeune femme eut l’air d’accepter ses excuses et lui fit part du fait qu’elle aurait aimé le retrouver dans d’autres circonstances. Warner était curieux de savoir comment elle pensait que la pilule aurait pu mieux passer, parce qu’il ne voyait pas vraiment. Elle non plus apparemment, elle avait l’air de croire que ça aurait pu être plus facile si elle était venue vers lui. “Peut-être oui.” répondit-il alors même s’il n’était pas vraiment convaincue. Il pensait qu’il aurait aussi mal pris la chose peu importe comment elle aurait amené ça. Elle lui fit également savoir à quel point il avait compté pour elle. C’était un sentiment qu’il partageait. Elle continua de parler et Warner se retrouvait dans ce qu’elle disait. Parce que lui aussi ne pouvait vraiment être lui-même que quand il était avec elle, à ce moment-là, il n’avait pas besoin d’essayer de rivaliser avec quelqu’un pour obtenir de l’attention comme avec la plupart des gens de son entourage et il pouvait se permettre de se montrer tel qu’il était vraiment. “La plus difficile vraiment ?” Plus difficile de le laisser lui que de laisser Alexis ? Il imaginait que ça avait dû être très difficile alors. Il n’avait pas voulu la croire jusque là mais maintenant, il mesurait mieux ce qu’elle voulait dire et comprenait que les choses avaient pu être aussi difficiles pour elle que pour lui. Quand Warner avoua finalement qu’elle lui avait manqué, Eliza posa sa main sur la sienne et la serra. Ce contact, ce n’était pas grand-chose mais l’anglais se sentit un peu mieux. La jeune femme s’excusa à nouveau en expliquant qu’elle ne voulait pas lui manquer. “Je sais, je sais. Tu as fait ce que tu pensais le mieux.” Elle lui avait déjà dit et il n’avait pas voulu comprendre. Il n’était pas sûr de comprendre totalement maintenant mais il arrivait un peu mieux à envisager son point de vue en tout cas. Finalement, la jeune femme lui demanda s’ils seraient resté ensemble si elle était restée. Elle aimait bien poser des questions auxquels Warner n’avait pas de réponses ce soir apparemment. “J’aurais aimé en tout cas.” répondit-il après y avoir réfléchi. “Je m’imaginais déjà passer une bonne partie de ma vie avec toi.” Non, c’est faux, il imaginait déjà passé toute sa vie avec elle mais il ne voulait pas se sentir encore plus stupide. “Je t’aurais emmené loin de l’Angleterre, quelque part où tu aurais pu être vraiment heureuse et toi-même. Et on se serait probablement disputé souvent, mais ça n’aurait jamais été vraiment grave.” Oui, il aurait vraiment aimé vivre la vie qu’il venait de décrire, il ne doutait pas qu’il aurait été heureux. Il ne savait pas si elle l’aurait été pour autant, peut-être qu’elle aurait eu besoin de partir par elle-même pour se réinventer, sans lui. “On ne se connaît plus vraiment tous les deux. Et tu penses peut-être le contraire mais je n’aurais rien contre connaître celle que tu es maintenant.” Il savait qu’il ne l’avait pas bien montré mais c’était la vérité. Il fronça les sourcils. “Est-ce que j’ai besoin de t’appeler Poppy ?” lui demanda-t-il alors

C’est peut-être pas plus mal qu’ils aient cette conversation maintenant. Même si c’est difficile, après une telle journée, c’est exactement le bon moment pour ça. Surtout que ça la force à se poser des questions qu’elle a volontairement éludé depuis toutes ces années. Elle sait qu’elle se sentira mieux une fois que tout sera sorti. Par exemple, là, elle vient de se rendre compte que perdre Warner a été la pire chose qui lui est arrivée. Et comme ça avait été son choix, ça a été la décision la plus difficile qu’elle ait eu à prendre. « La plus difficile. » Elle se répète, mais il n’y a rien d’autre à dire. Perdre Alexis n’a pas été aussi difficile, et ça peut paraître horrible dit comme ça, mais c’est la vérité. Encore une fois, c’est pas parce qu’elle a fait un choix que ce choix a été facile et qu’elle a réussi à passer à autre chose rapidement. En l’ayant en face lui, là, elle commence à se rendre compte qu’elle n’a pas totalement réussi à passer à autre chose. C’est pour ça qu’elle ne peut pas lui en vouloir d’avoir débarqué dans sa vie sans la prévenir. Elle en avait besoin pour se remettre un peu en question et se rendre compte de certaines choses, même si c’est difficile. Ca la pousse aussi à se demander ce à quoi aurait ressemblé leur relation si elle n’était pas partie. Elle n’y a jamais vraiment réfléchi avant, même si à l’époque où elle était encore avec lui, elle voyait leur relation continuer encore quelques années. Voire plusieurs. Mais ça, bien sûr, c’était à condition qu’elle ne parte pas à l’autre bout du monde sans prévenir. La question lui brûlant les lèvres, elle ne peut s’empêcher de lui demander ce qu’il pense de tout ça. Elle voit bien que ce n’est pas évident pour lui, mais il réussit quand même à lui répondre. Sa réponse lui fait un peu de mal. Pas parce que ce n’est pas ce qu’elle aurait voulu entendre, mais parce qu’elle aurait voulu connaitre ça. Vivre avec Warner loin de sa famille, ça avait été un de ses rêves. Elle l’avait à moitié réalisé puisqu’elle était partie seule. Mais pour le coup, elle sent l’émotion la gagner. C’est peut-être l’alcool, ou la fatigue, ou tout mélangé, mais elle sent aussi les larmes lui monter aux yeux. Elle est forcée de retirer sa main pour venir se frotter les yeux, tenter de les faire reculer. Elle ne va pas pleurer devant Warner. Pas ce soir. « C’est tout ce que j’avais toujours souhaité. » Elle n’arrive même pas à le dire à voix haute, mais elle se racle la gorge et ajoute, riant légèrement histoire de détendre un peu l’atmosphère : « Et ouais, on se serait beaucoup disputé. » Il n’y a qu’à les voir aujourd’hui. Mais c’est pas grave, comme il le dit. Les disputes, ça permet de garder une relation saine. Quoi qu’il en soit, la vie qu’il vient de décrire aurait été parfaite, mais elle en sait pas combien de temps ça aurait pu durer comme ça. Peut-être qu’elle aurait malgré tout eu besoin de s’éloigner de lui. Elle aurait eu besoin de découvrir qui elle était vraiment, sans qu’on lui dicte quoi que ce soit. Warner n’aurait pas essayé de contrôler sa vie, mais elle sait au fond d’elle que c’est quelque chose dont elle aurait eu besoin. Elle est une personne complètement différente aujourd’hui, et elle ne sait pas, peut être que Warner a changé aussi. Il n’a pas tort quand il dit qu’ils ne se connaissent plus. Ils ne se comprennent plus. Sept ans ont passé, beaucoup de choses ont changé. Du coup, elle aussi ça l’intéresse de ré-apprendre à le connaître. « Reprendre à zéro. Oui, ça m’intéresse. » répond-elle pensive en hochant vivement la tête. « Et… tu peux m’appeler comme tu veux, même si techniquement, Eliza n’existe plus vraiment. » Quelques choses d’elles sont restées, mais elle a choisi d’être Poppy pour marquer une réelle séparation entre sa vie d’avant et sa nouvelle vie. Mais Warner, s’il tient à continuer à l’appeler Eliza… Il peut. Il ne faut juste pas qu’il confonde les deux personnes. Celle qu’elle était et celle qu’elle est aujourd’hui. « Essaye juste de pas te perdre entre les deux. Espérer retrouver Eliza alors que tu n’auras que Poppy. » Elle préfère que ce soit clair.

Warner avait du mal à imaginer que le laisser ait pu être la chose la plus difficile qu’Eliza ait fait dans sa vie. Rien que laisser Alexis avait dû être plu difficile pour elle parce que vu la manière dont elle en parlait, ça avait eu l’air d’être compliqué pour elle. Mais la jeune femme lui confirma que c’était bien la chose la plus difficile et il décida de la croire. Il voulait faire des efforts, il l‘avait bien dit et arrêter de douter de tout ce qu’elle disait était un énorme effort déjà. Ils continuèrent de parler un peu, tout en buvant. Le ton de la conversation était redevenu assez calme, principalement parce que Warner s’était calmé sans doute. Il s’était même excusé pour son comportement, mais tout ça le touchait juste trop. Eliza lui demanda bientôt s’il pensait qu’ils seraient restés ensemble si elle n’était pas partie. Une réponse à cette question était impossible à donner, il n’avait aucun moyen de savoir comment les choses se seraient passé dans ce cas-là mais il décida de lui décrire les choses telles qu’il aurait voulu qu’elles se passent à l’époque. Dans un monde idéal, il aurait fini par emmener Eliza loin de sa famille, quelque part où elle aurait pu être elle-même et ce, pas seulement en sa présence. Et ils auraient été très bien même s’ils se seraient beaucoup disputé. Apparemment, cette description avait l’air de lui plaire puisqu’elle lui fit savoir que c’était ce qu’elle aurait souhaité. Warner eut un petit sourire et regarda Eliza qui se frottait les yeux. “Je ne voulais pas te rendre triste.” s’excusa-t-il alors. Il n’avait pas pensé déclenché une telle réaction en lui répondant. Même s’il pouvait comprendre. C’était triste de penser qu’il aurait pu avoir ça mais qu’au final il avait eu tout autre chose. De toute manière, il ne pensait pas vraiment que le portrait qu’il avait décrit aurait pu arriver. Elle aurait fini par partir, il le sentait parce qu’elle aurait eu besoin de ça à un moment ou à un autre. En tout cas, ce n’est pas parce que les choses s’étaient passées d’une manière différentes que ça ne pouvait pas s’arranger. Ils ne se connaissaient plus vraiment tous les deux, en sept ans, ils avaient évolués chacun de manière différente et chacun de leur côté mais ils pouvaient toujours essayer de refaire connaissance, Warner n’y était pas opposé même s’il ne le montrait pas bien. Il était même prêt à l’appeler Poppy si c’est ce qu’elle souhaitait, puisque c’était comme ça qu’elle se faisait appeler maintenant. “Je t'appellerais Poppy alors si tu veux.” Il prit ensuite un air vaguement amusé. “Tu sais, tu sonnes presque comme quelqu’un souffrant d’un dédoublement de la personnalité.” lui fit-il savoir, même s’il avait très bien compris ce qu’elle voulait dire par là. Il pensait juste que contrairement à ce qu’elle disait, Eliza existait toujours. Elle avait évolué, sans aucun doute, mais certainement pas disparue totalement. “Alors, dis-moi tout, qu’est-ce que Poppy aime faire de sa vie ?” demanda-t-il finalement.