C’est trop pour moi. Toute cette vague de sentiments qui m’envahie et me compresse les tripes, resserre mon cœur. C’est difficile à encaisser ce qu’il éveille en moi alors que tout n’existait pas encore il y a quelques semaines. Enfin, si…quelque part en moi. Ils n’attendaient juste à être libérés de leur prison. Maintenant, c’est moi qui me fais submergée sans que j’arrive à contrôler ce torrent. C’est si fort et si soudain que je suis obligée de m’écarter de lui, sous peine de faire une chose que je pourrais regretter. Je le regarde une seconde, voir si ça le dérange que je m’éloigne de lui mais tout ce que je vois c’est de la compassion. « C’est pas grave, Ollie. On va faire ça pas à pas. » Rassurée, je descends de ses jambes et vient me rasseoir sur mon petit muret, peu confortable. Ceci dit, il me saisit la main très rapidement, ce qui me fait sourire. « Je ne te mettrais jamais la pression, tu le sais ? De toute manière, il va falloir être patiente avec moi mais on a qu’à faire ça ensemble…à notre rythme. » J’acquiesce aussitôt en plongeant mon regard dans le sien : « A notre rythme. » Je répète, comme une promesse de cet accord. Ne pas le presser. Ne pas me presser. Je pense que c’est ce que nous avons tous les deux besoins pour pouvoir se trouver. « Monsieur Duke ? » La voix d’une infirmière me fait presque sursauter. J’ai presque envie d’enlever ma main de la sienne, comme prise sur le fait, mais il la garde bien au chaud. Le regard de l’infirmière passe de nous deux, à nos mains liées, avant de revenir à Cameron, un sourire au coin. « C’est l’heure de vos médicaments. On vous cherchait partout. »
« A notre rythme. » Je voudrais caresser à nouveau sa joue, lui montrer par n’importe quel moyen qu’elle n’a pas à s’en vouloir d’avoir ce blocage, je n’en fais rien. Je n’ai pas envie d’abuser, de profiter d’une chose à laquelle je ne pensais même plus avoir le droit. Assise sur son petit muret, juste à côté de moi, je l’observe avec un sourire tendre. Un que je ne pensais pas pouvoir offrir avant un moment, sauf peut-être à notre nièce. « Monsieur Duke ? » Dans un sursaut, les yeux assombris par le mécontentement d’être interrompu, je tourne la tête vers l’infirmière visiblement ravie de m’avoir trouvé. Pas moi. Je sens même la main d’Oliana tenter de s’échapper mais je la garde dans la mienne et interroge du regard cette intruse. « C’est l’heure de vos médicaments. On vous cherchait partout. » J’aurais aimé qu’ils cherchent un peu plus longtemps, pensée qui me fait soupirer. « Visiblement vous m’avez trouvé. » Je lâche, sarcastique. Portant la main d’Oliana à mes lèvres, je l’embrasse et pose mon regard sur elle. « C’est l’heure pour le bougon de revenir. Merci, Ollie. » De quoi exactement, je ne lui dis pas. Je la remercie pour toi : sa patience, sa présence, cet amour auquel elle veut laisser une seconde chance. Tant de choses. La relâchant enfin, je refuse l’aide de l’infirmière pour me diriger vers ma chambre, de nouveau de mauvaise humeur maintenant que la seule personne capable de m’apaiser va devoir partir.